Rubicon
7.5
Rubicon

Série AMC (2010)

Rubicon est une série d'espionnage dans laquelle il n'a pas de gadgets ultra-perfectionnés. Il n'y a pas de course-poursuite entre un hovercraft et un hélicoptère de combat, ni de mocassins lance-missile à guidage par la pensée. Il n'y a pas non plus de nano-caméras en résolution 6000*4000 avec un son DTS HD 7.1 ou de logiciels capable d'améliorer une image de vidéo-surveillance pourrie pour y lire une inscription au dos d'un ticket de métro. Les personnages de Rubicon ne sont pas des types en Ray-Ban capable d'émasculer un bourdon au pistolet à 1Km de distance...

Dans Rubicon il y a des codes, des indices, des traces, des filatures, des tromperies...
Dans Rubicon il a des complots et il y a des analystes.
Un analyste qu'est-ce que c'est ? Quelqu'un qui analyse ! Captain obvious to the rescue.
Ce sont des gens qui ont un esprit aiguisé, qui réfléchissent, qui échafaudent des théories avant de les confronter, de les vérifier et de les valider... ou pas. L'analyste est chargé de vérifier chaque renseignement afin de déceler la contradiction ou la piste importante.
Un travail long, fastidieux, précis, frustrant... des rats de bibliothèque qui essayent de sauver le monde avec un papier, un stylo et beaucoup de matière grise.

Le suicide d'un industriel, des mots croisés suspects, un accident de train... et si ces 3 évènements avaient un lien ?
C'est la question que se pose Will Travers, analyste particulièrement brillant au API ( Un institut indépendant chargé de vérifier les renseignements utilisés par le gouvernement américain ). En partant d'une simple observation il va mettre le doigt dans un engrenage d'une ampleur insoupçonné.
La moindre décision est pesée, les conséquences sont calculées. Ainsi le rythme de Rubicon est lent... il n'y a pas de scènes d'action. Quand il y a des assassinats ou des attentats ou tout autre situation propice à une explosion : elle n'est pas montrée. Oui, Rubicon est lent, lent mais pourtant passionnant de bout en bout.
Passionnant grâce à un scénario construit comme un puzzle géant. S'il n'épargne pas quelques clichés (la société secrète assez peu originale) ni 2/3 approximations (Une maison sous surveillance d'où peuvent néanmoins partir des courriers à haut risque) il reste très solide et intéressant.
Passionnant grâce au soin apporté aux personnages et à la qualité de l'interprétation. Entre le charismatique Kale Ingram, le reservé Will Travers, le passionné Miles Fiedler ou l'énigmatique Truxton Spangler, ils ont tous des motivations, des aspirations qui sont profondes et logiques.

Au delà de ses qualités d'écriture Rubicon tisse une ambiance tendue et envoûtante qui donne du corps à cette histoire de mecs qui réfléchissent dans un bureau. La mise en scène élégante et sans fioriture renoue avec les thrillers paranoïaques des années 60/70, renforçant encore un peu plus l'approche « réaliste » du show. Une ambiance qui n'est pas désuète pour autant puisque la série aborde des thématiques tout à fait contemporaines (guerre de l'information, terrorisme proteïforme, omniprésence de la surveillance, inertie du système, Amérique vacillante depuis le 11 septembre 2001, etc...) et reste résolument moderne dans le ton et les références.
Le travail sur l'ambiance doit aussi beaucoup au score musical de Peter Nashel, outre un superbe générique, ses mélodies aux accents Bernard-Hermanniens accompagnent à merveille chaque séquence.

La froideur initiale de l'intriguant pilote se transforme petit à petit en fascination au fil des 13 épisodes de la saison 1. Chaque révélation est une porte ouverte sur un nouveau mystère et à mesure que l'histoire se densifie on n'a plus qu'une seule envie : savoir la suite. Les enjeux s'étoffent, la progression dramatique s'intensifie. En un mot comme en cent cette saison 1 est une véritable réussite.
Cette saison 1... cette saison 1... cette unique saison, en fait. Victime de la jungle audiovisuelle américaine Rubicon ne connaitra jamais de saison 2, faute d'audiences suffisantes nous dit-on.
Une décision assez surprenante de la part d'AMC, chaîne reconnue pour retenir d'avantage la qualité des programmes (Breaking Bad, Mad Men qui n'ont pas connu des audiences fulgurante en première saison mais qui ont eu leur chance malgré tout) que les courbes d'audimat.
Une décision injuste vu les qualités indéniables de cette saison 1.
Une décision douloureuse puisque le dernier épisode ne fait clairement pas office de conclusion définitive et offre des pistes intéressantes pour une suite.
Une décision qui tombe en même temps que l'annonce de la reconduite de The Walking Dead pour une seconde saison. C'était l'autre nouveauté de AMC pour la grille automnale de 2010. Une série moyenne voire médiocre, aussi bien dans l'écriture que dans l'exécution, mais une série qui a cartonné. Dans la balance de la rentrée 2011 la confidentialité de Rubicon n'a pas pesé lourd.

Rubicon est une excellente série mais, en temps que projet avorté, sa vision peut se révéler frustrante. Frustrante car on aimerait connaître ce qui nous échappe encore, frustrante car on aimerait savoir comment vont évoluer ces personnages attachants après ce qu'ils ont vécu, frustrante car s'il y avait une nouveauté meilleure que toutes les autres à la rentrée 2010 c'était bien Rubicon.
Une série qui n'a pas eu sa chance, une série sacrifiée mais une série qu'il faut définitivement voir.
Vnr-Herzog
8
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le 19 févr. 2011

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