Voici une nouvelle preuve que les bons concepts ne font pas les bonnes fins, ou qu'à trop vouloir entrer dans un schéma à dix épisodes quand on a tout dit en huit épisodes, on finit par perdre son âme (et le téléspectateur) en sacrifiant l'intrigue à grands coups de twist pas finauds, carrément éculés, le tout pour aboutir à une fin navrante. Oui, rappelez-vous, c'est à peu près ce que vous aviez ressenti avec l'ultime épisode de la saison 1 de True Detective, ce sentiment qu'on ne sait pas trop comment boucler la boucle et qu'on préfère quelques images choc et cradingue en guise d'explication.
Et bien c'est à peu près pareil dans Tunnel. Un tueur mystérieux, aux motivations pas claires : que cherche-t-il à dire ? est-ce un fou ? un activiste ? un groupuscule ? La police est larguée et se fait mener par le bout du nez durant des épisodes où celui que la presse appelle le Truth Terrorist arrive à ses fins sans être jamais sérieusement inquiété. Pendant ce temps, la police se perd dans des fausses pistes que le téléspectateur lambda a bien vite reniflées comme ce qu'elles sont, des leurres savamment orchestrés. Et les boulettes commencent à s'entasser : on remet une clé USB bourrée de preuves accablantes et personne ne semble s'y intéresser (alors qu'on a bien vu un mec se faire dessouder pour ces preuves). On ne reparle de ces preuves qu'au dernier épisode, comme ça lâché dans une phrase, comme si le script s'était lui aussi rendu compte qu'on a laissé un trou dans la raquette. On essaye d'arrêter un barbouze, il parvient à s'échapper, enlève un flic et manque se fait abattre par un gang marseillais (deux blaireaux avec un fusil à pompe et un sniper riffle qu'ils utilisent pour descendre un as de l'infiltration (qui s'est bêtement campé dos à une fenêtre, chapeau l'artiste), avant de débouler comme des pipes en terre cuite pour se faire cueillir comme des bleus qu'ils sont....après ça, il n'est plus question de retrouver ce mec, soupçonné d'avoir descendu un flic entre autres mais qui peut tranquillement aller à un match de rugby...
Et fin du fin,
le Truth Terrorist s'avère être un cocu qui se venge et provoque son adversaire dans une scène directement repompée de Seven où il veut démontrer une ultime vérité en se faisant abattre par un père éploré dont il vient de tuer le fils.
Ce dernier épisode qui accumule les clichés comme on enfile les perles, multiplie les révélations de dernière minute (pour solde de tout compte) et se termine sans vraiment boucler quoi que ce soit, c'est vraiment la goutte qui fait déborder le vase. Même si la série se laisse regarder grâce à un casting sympa et une localisation qui change de l'ordinaire parisien, ses gros défauts finissent par la plomber.
Quelques épisodes de trop, une fin explicative - justificative bidon, un positionnement international qui ne sert pas à grand chose car les différences culturelles ne sont pas du tout exploitées et les incessantes navettes en Shuttle finissent par ressembler à une grosse arnaque de placement produit.
Au final, Tunnel pêche par les mêmes côtés que Braquo : une surenchère permanente qui finit par s'essouffler faute de combustible.