On peut noter une récente reconnaissance du documentaire réalisé en animation. Ce fût le cas de My Favorite war de Ilze Burkovska Jacobsen, qui avait gagné le prix de la compétition Contrechamp en 2020 avec un récit autobiographique racontant l'enfance de la réalisatrice durant l'indépendance de la Lettonie et la chute de l'URSS, ou encore en 2021 avec Flee de Jonas Boher Rasmussen, qui avait gagné le Crystal du long métrage, et nominé aux Oscars pour 3 catégories dont meilleur documentaire. L'année 2022 ne fait pas exception à la règle avec notamment deux films à résonance documentaire: Le Petit Nicolas: Qu'est ce qu'on attend pour être heureux ?, un film docu-fiction sur la vie de Sempé et Goscinny qui a reçu le Crystal du Long métrage 2022 et grand favoris pour le césars du meilleur film d'animation, ou encore Interdit aux Chiens et aux Italiens, Prix du jury au Festival d'Annecy et Prix de la fondation Gans.

En terme d'animation et de réalisation, le film est admirable. Alain Ughetto, lors de l'avant-première où j'ai assisté, nous a parlé de son rapport au matériau et à la construction, disant que c'est quelqu'un de manuel qui aime être en contacte de la matière, et cela se ressent à chaque seconde du film. Il y a une attention toute particulière aux textures et la manière de suggérer des variations dans l'environnement à travers différents jeux de points de vues ou de traitement du matériau. Le film ne se limite pas tant à du carton et du plastique, mais va utiliser de vrais éléments naturels, comme des légumes, pour pouvoir montrer des arbres vu du ciel avec des brocolis, ou encore des maisons Suisse qui prennent la forme de Citrouilles. On a un vrai plaisir ludique à regarder le film tant tout transpire d'une poésie enfantine, et d'une maturité d'exécution incontestable. Si l'on peut rire de barrages formé avec des carrés de sucre, ou même de grotte où le sol semble liquide, c'est parce que le film se veut plus comme une impression de décor qu'un décors fidèle. Enfin, la stop motion assume la trace humaine du réalisateur en incluant le réalisateur comme un personnage à part entière au récit, dans son atelier. Si le réalisateur est définit comme un personnage non animé, il est présenté comme un personnage témoin, un élément extérieur qui permet de créer un rattachement entre l'imaginaire et la réalité de l'histoire en jeux, replaçant l'histoire et la hiérarchie de la famille vis-à-vis du réalisateur, et nous offrant des scènes techniquement bluffante où marionnette en stop motion et réalisateur peuvent interagir en simultané sous une seul temporalités alors qu'elles ont deux notions du temps différentes (celle du réalisateur en temps réel, et celle de la marionnette en image par image). Le film est plastiquement passionnant, un tour de force remarquable et époustouflant, et rarement j'ai vu une stop motion aussi réussit que dans ce film.

Malheureusement, si la réalisation est exemplaire, l'écriture est vraiment problématique. Le soucis étant qu'un film racontant le récit de personnages (que ce soit fictionnel ou documentaire) doit définit précisément où est ce qu'il part, que doit-il faire, surtout où est ce qu'on arrive, et que le film, par manque de recul, laisse beaucoup trop le spectateur dans le flou total face à un récit très personnel. Nous suivons donc les grand parents d'Alain Ughetto de 1899, de leurs Italie natale, en Amérique, en passant par la France et la Suisse, jusqu'à leurs morts

1932 pour le grand père, et 1962 pour la grand mère

Le soucis étant, qu'à vouloir montrer la famille unis comme un personnage à part entière, avec très peu de scènes mettant en avant les membres importants de la famille (suffisamment pour qu'on puisse suivre clairement un personnage), on est très vite perdu lorsque la famille accueille six nouveaux membres d'un coup, ou lorsque d'autres meurent à à peine 19 ans. On est perdu entre les différents membres de la famille, et on est surtout perdu dans l'espace temps, à vouloir rattacher péniblement les morceaux. On n'a pas de carte, pas de frise chronologique, on rencontre des événements historiques majeurs comme la monté de Mussolini au pouvoir qui ne sont même pas tant précisé, on n'aura pas de guide ni même de personnages stable à qui nous fier... le film est un bordel sans nom, extrêmement difficile à suivre, émotionnellement parlant on reste très en dehors, et le temps devient très vite long tant on ne sait pas quoi suivre, ni attendre. C'est extrêmement dommage de devoir batailler autant à suivre une histoire, alors qu'elle nous est présenté de la plus belle des façons. On a alors ce sentiment d'être mis à l'écart et de devoir attendre la fin, sans jamais pouvoir une seul seconde être introduit dans l'histoire, avec toutes les clefs nécessaires pour pleinement apprécier le film. Sans doute que le film aurait mérité un travail d'adaptation et un plus grand recul sur l'écriture.

10,5/20

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Activité sur Interdit aux chiens et aux Italiens