Anthony Braxton est déjà depuis pas mal de temps à Paris lorsque ses deux compagnons, Leo Smith et Leroy Jenkins, le rejoignent pour cet enregistrement. Entre temps il a beaucoup joué avec les musiciens de l’Art Ensemble, au Lucernaire, à l’American Center et même au festival d’Avignon. Il a également fréquenté les rencontres musicales initiées par Byg Records.
Membre de l’AACM de Chicago, c’est un musicien particulièrement ouvert à toutes les musiques et à toutes les expériences qui entrent dans les studios « Saravah » en ce mois de septembre. Steve McCall, un pilier de l’association, sera le quatrième homme de l’aventure sonore.


Avec cet album nous voilà aux frontières de la musique contemporaine, à l’écoute le cousinage s’impose, d’emblée. Pourtant il faut modérer très vite cette impression, on ne fait pas disparaître si facilement une tradition bien ancrée dans le jazz et le musique noire. C’est d’ailleurs à cette période, pour balayer définitivement ce problème d’étiquette, que les jeunes musiciens se retranchent derrière le terme très approprié de « Great Black Music ». De plus, même si la musique est convenue à l’avance, préparée, codée et schématisée, elle n’échappe pas à ce qui fait l’esprit du jazz : l’improvisation, toujours d’actualité. On peut remarquer également un schéma typique du jazz présent sur le titre de Leroy Jenkins « Simply Like », en effet la structure académique thème/improvisation/thème est toujours présente.


Par contre le rôle de Steve McCall a fondamentalement évolué. Il ne marque plus le rythme derrière ses fûts, comme le veut la tradition. Il devient coloriste, distributeurs de sons et bâtisseur d’univers sonore, à l’égal de n’importe quel autre musicien. Il s’échappe de son ancrage terrestre pour s’élever dans l’espace et jouer de l’infinie diversité des percussions.


Par ailleurs tout est égal, il n’y a plus de dynamisme vertical, plus de bruit, de colère ou de fureur comme souvent dans le Free Jazz, à part pendant quelques rares moments, la musique est calme, structurant le silence, elle puise son énergie dans la diversité des sons, dans la richesse des timbres, dans l’envolée virtuose…


Parfois, dans ces projets innovants, on sent poindre l’ennui au coin du bois, rien de tel à l’écoute de cet enregistrement, l’intérêt est maintenu pendant tout l’album, plusieurs écoutes successives sont même très stimulantes. Cet album fait décidément honneur à la série Byg Actuel !

xeres
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes BYG Records - La série "Actuel", Du Free Jazz sans concession! et "Ils voyagent en solitaire..."

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le 6 mars 2017

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