Un album qui était dans ma liste car je pensais avoir déjà écouté par hasard un bout de l'oeuvre du bonhomme, mais je confondais en fait avec Alejandro Escovedo. Bon pour ma défense ce sont deux singer-songwriters états-uniens, dont les noms se finissent en 'do' et qui devraient à priori être plus connus qu'ils le sont...
Et avec un peu de chance cet album c'est le bon pour notre Damien, parce que non seulement il est remarquablement travaillé (compositions et textures - la production est assurée par un membre des Shins et les chansons s'appuient sur bien plus qu'une guitare), relativement original, mais surtout c'est sacrément beau. Jurado est de ceux qui savent aussi bien installer une atmosphère dense immersive que faire voyager l'auditeur dans des paysages fantasmés, en plus de s'appuyer sur un solide sens mélodique et rythmique, et évidemment sur sa voix d'une clarté sans pareille qui a d'ailleurs une grande place dans lesdites textures.


Ainsi l'album est parfaitement fluide et cohérent ; même si certaines chansons semblent prendre fin prématurément, ne pas avoir une structure rigoureuse. Comme si elles n'avaient pas d'importance seules, n'étaient que les phases transitoires d'un long cheminement spirituel ou des épisodes filtrés par la mémoire. Une homogénéité qui n'exclut pas la variété : des chansons aux arrangements dramatiques (Metallic Cloud qui vise la grâce ; l'intense Jericho Road qui convoque les cloches du far west) débouchent sur un long jam exotique halluciné de début de soirée (Silver Donna). Dans cette dernière en particulier la prédominance du falsetto peut évoquer un Justin Vernon qui aurait repris du poil de la bête. Des chansons plus dépouillées arrivent à point nommé (Silver Katherine et Silver Joy, la plus intimiste) et constituent le coeur émotionnel du disque, qui s'achève ensuite sur une note étrangement légère – "Beyonds the words, we are all a dreamer." souffle-t-il mais il est déjà temps d'émerger (le voyage dure un peu plus de 30 minutes).
Difficile dans tout ça de citer un morceau qui puisse sortir du lot et fonctionner hors contexte – c'est là un des reproches qu'on peut faire – mais ce serait probablement Silver Timothy (qui n'est pas le single par hasard) : la mélodie qui reste le plus en tête, un groove naturel de la section rythmique aux accents latinos et une construction parfaite qui relie introduction acoustique à une envolée psychédélique superbe.


Bref un bel album qui mérite le coup d'oreille et ceux qui ont aimé Maraqopa peuvent s'attendre à un travail plus ambitieux avec ce 'Brothers and Sisters of the Eternal Son'.

Zephir
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le 15 janv. 2014

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