Passé presque inaperçu dans nos contrées à sa sortie, en raison d’un changement de label, In The Raw présente une nouvelle évolution du groupe qui revient à ses premières amours en nous proposant un hard rock direct et sans fioritures, un peu moins lissé que sur l’album précédent, auquel il insuffle une bonne dose de metal. Cela se ressent dès les premières mesures de « Hurricane », un titre puissant, rapide, porté par un riff simple et classique, mais vraiment efficace. Cette tendance à lâcher les chevaux se retrouve d’ailleurs sur « Hot Love » qui lorgne sur le heavy à la Judas Priest, tout en conservant des racines hard rock. C’est exactement ce qui se passe sur « Hold On for Your Life », un des plus beaux titres écrits par le groupe, sur lequel David Feinstein livre de magnifiques solos et un beau refrain sans jamais perdre de la puissance.
Le passage sur Shrapnel semble avoir laissé les coudées franches au trio qui s’empresse de s’inscrire dans le courant de l’époque. On retrouve ainsi une proximité avec Krokus sur le très AC/DC « Can't Get Enough of the Fun », le côté metal des solos en plus. Ces influences se ressentent également sur « Go For Broke » qui évoque les premiers albums des Australiens ou ceux de Starfighters.
Les surprises ne viennent pourtant pas de là, mais plutôt du virage metal enclenché par le groupe. L’introduction acoustique de « Witches Brew » nous annonce un tempo lent et binaire très sabbathien. L’ambiance sombre, nouvelle chez le groupe, ainsi que les paroles tournées vers le fantastique étonnent, mais cela fonctionne parfaitement. Il en va de même sur « Hot City » à la tonalité très sombre, étrangement coupée par un break plus léger menant à une déferlante rythmique touchant au speed metal. S’appuyant toujours sur des riffs épais, The Rods se permet même de réviser le douze mesures sur « Another Night on the Town » en le saccadant pour le gorger de metal et nous offrir un véritable hymne qui n’est pas sans rappeler le « Man On The Silver Moutain » de Rainbow.
Ce tournant plus metal ne doit pas faire oublier les racines du groupe qui semble vouloir explorer de nombreux chemins. « Street Fighter » flirte avec le folk et le southern rock à la Outlaws, en y injectant des notes soul dans le refrain. C’est étonnant et entêtant, même si on peut se dire que le groupe n’est pas allé au bout de son expérimentation. En revanche, il l’a fait sur l’étrange « Evil Woman », chanté par Gary Bordonaro, dont la construction plus torturée qu’à l’habitude, évoque « Mississipi Queen » de Mountain.
Meilleur que ses prédécesseurs, et surtout plus équilibré et plus ambitieux, In the Raw mérite d’être remis sur les platines.