De claviers, le rock progressif en est inondé. Parfois occulte, parfois ringard et souvent pompeux, il est l'une des caractéristiques principales du mouvement avec entre autres la diversité instrumentale et l'affiliation du genre avec la musique classique. Les Moody Blues, par ailleurs précurseurs de cette alliance entre musique populaire et élitiste, signent sur leur propre label un groupe progressif qui saura se détacher de cette réclusion symphonique et organique : Asgard. Pas de clavier pour ce progressisme minimaliste, loin des grandoloquences mégalomanes que Yes et Genesis cultivent à l'époque : le violon de Peter Orgil, d'une pudeur rafraichissante, remplace avec brio tout synthétiseur en vogue tout en apportant chaleureusement à l'atmosphère médiévale et héroïque qu'Asgard s'est attaché à construire.

L'héroïque. L'épique. Dans le monde progressif, ces deux sentiments de toute puissance sont globalement assimilés à des suites de quinze voire vingt minutes, pullulements de thèmes différents aux soli libérateurs. Dans In The Realm Of Asgard, unique production du quintet anglais, les huit chansons ne dépassent pas les cinq minutes. L'ensemble, même si relativement basique, propose un lyrisme latent, appuyé par quelques lignes de chant fort attrayantes, originales, baroques, mystérieuses. Le chanteur James Smith et le chanteur/guitariste Rod Harrison apportent à la cohérence générale par une science de l'harmonie vocale rare et effacée, touchant le mille à chaque retentissement.

Pour se faire une idée plus précise, l'oeuvre pourrait être comparée à une production de Wishbone Ash que les Crosby Stills Nash And Young se seraient amusés à jouer sur scène. En y ajoutant des cordes. Tout amateur de progressisme simplifié, de lyrisme sobre et appliqué, d'harmonies joyeuses et expectatives et de guitares minutieuses trouvera son compte dans le bijou In The Realm Of Asgard, à découvrir entre deux albums de Yes pour se rappeler que le rock progressif n'a pas obligatoirement à être compliqué et conceptuel pour être attachant.
BenoitBayl
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le 9 déc. 2013

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