Lionheart
7.1
Lionheart

Album de Kate Bush (1978)

Lionheart (1978), second album de Kate Bush après The kick inside plus tôt dans l'année n'a généralement pas toujours bonne presse chez les fans au regard de l'exceptionnelle qualité discographique de la chanteuse. Il faut dire qu'après le premier disque, original et audacieux sur le fond, proposant un vrai sang neuf dans la chanson pop (qui influencera de nombreuses vocations chez des chanteuses comme Björk, Madonna ou Natasha Kahn de Bat for Lashes), Lionheart semble en faire moins : les chansons sont plus calmes, plus apaisées, moins d'instruments, moins d'orchestrations, le disque pourrait presque sonner un peu creux.


Néanmoins Lionheart possède d'autres qualités qui lui confèrent un certain petit charme.


Déjà visuellement, Kate a sorti le grand jeu, c'est opération séduction.
Il fallait bien ça pour rattraper la pochette étrange et décalée (foirée ?) sur le plan photo/graphisme de The kick inside. La pochette nous montre ici une Kate animale, peluche vivante, cheveux de lionne brune/rousse (je répète que le disque est pourtant assez apaisé hein), qui attend presque que l'auditeur vienne la caresser pour ronronner. Troublant. Le tout dans une chambre d'enfant aménagée dans un grenier de vieille maison, une peluche de lion (pour témoigner qu'on est encore plus ou moins dans l'enfance --Kate n'a que 20 ans au moment où elle sort ses deux premiers albums, eh oui), un cocktail magique.


Au verso de la pochette du CD (et vinyle), Kate qui nous regarde droit dans les yeux, avec son immense chevelure, dans une lumière rougeâtre qui anticipe presque les années 80. Comme si l'artiste se confiait ouvertement et disait par le regard "mangez, ceci est mon disque, donc par extension, ceci est mon corps". Là aussi c'est d'autant plus troublant que la sincérité de la jeune fille n'a jamais été à remettre en cause. Opération marketing ? Peut-être mais doublée avant tout d'une vraie volonté d'aller vers ses fans et de les faire plaisir avant tout.


Sur le plan musical disais-je donc, c'est plus calme et apaisé que le disque d'avant.
Cela ne veut pas dire qu'on a négligé la qualité, attention. C'est juste qu'au regard de son exigeante discographie, cela fait un peu pâle. Mais quand même, il y a une poignée de chansons assez belles. Comme souvent chez Kate Bush, il y a une dimension "homéopathique" : ses chansons réconfortent, encouragent, font du bien. D'autant plus qu'elle ne se borne pas qu'à parler de l'amour comme le font trop souvent nombre de chanteurs et chanteuses. En fait dès le départ (elle ne se destinait pas spécifiquement à la musique même si elle fut aidée par David Gilmour --qui produisit son premier album-- et l'aida dans sa longue galère pour percer) Kate a un registre plus que varié. Cela est aussi bien lié à sa culture musicale (déjà bien importante) qu'à son goût autodidacte (apparemment, voyant qu'elle pourrait pas percer dans la musique, elle était même prêt à travailler dans la médecine ou le social).


Du coup, ici, elle se risque à parler des sentiments avec Symphony in blue, elle évoque l'homosexualité sur Kashka from Baghdad, livre un hommage aussi bien à sa bien aimée chère patrie sur Oh England my lionheart, qu' aux studios de la Hammer avec Hammer Horror. Il y a aussi un goût pour l'expérimentation qu'on sent poindre par petites touches. Des samples de violons sur Hammer Horror, un bruit de gong à la fin du morceau, ce piano qui sonne volontairement en décalage (avec un ton plus rock en contraste) sur Fullhouse, la création d'une ambiance de théâtre glamour ou pub anglais sur Coffee homeground quand ce n'est pas un peu de fantasmagorique en ouverture de Wow...


Pour autant l'album sonne peu homogène, les musique peuvent un peu lasser. Finie l'énergie brute du premier disque, son goût pour l'inventivité. Si Kate Bush est sur la bonne voie, il lui manque les fulgurances nécessaires et le goût du risque car en l'état on a juste au final une suite de chansons, on pourrait aussi bien raccourcir l'album ou faire figurer le tout sur diverses compiles que ça ne nous ferait ni chaud ni froid. Au regard de ce qui va suivre (le formidable Never for ever juste après), on comprend que cet album fait presque figure de disque de transition.


Bref Lionheart ? Un petit disque bancal mais sympa de la grande soeur qu'on aime écouter régulièrement mais qui ici manque parfois de passion et de chaleur. Allez savoir.

Nio_Lynes
7
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le 28 févr. 2018

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