It's a long time coming, a long time gone away

Tout d'abord je dois avouer en préambule que je suis un inconditionnel absolu d'Au Revoir Simone depuis que je les ai découvertes en 2008. Il y a quelque chose de fascinant dans la musique désuète, naïve mais terriblement attachante des ces trois New-Yorkaises qui nous invitent à "mesurer les étoiles dans le jardin avec une calculatrice et une règle" ("Stars" sur The Bird Of Music). En bon monomaniaque, leur dernier album, Still Night Still Night (2009), était resté coincé dans mon autoradio pendant presque une année entière. Puis un break pendant 4 ans : le temps pour Erika Foster de changer de nom (Spring) et de s'offrir une parenthèse solo (Erika Spring EP 2012 (très bon)), pour Heather d'Angelo de finir ses études de microbiologie et enfin pour Annie Hart de devenir maman et partir en tournée avec les Pursesnatchers. Et non, je ne parlerai pas de leur collaboration avec Etienne Daho sur un titre de son dernier album, il y a des choses qu'il vaut mieux occulter.

Autant dire que j'attendais avec impatience l'opus de leur réunion. Et quand est sorti le premier single "Somebody Who" en juin, je me suis précipité pour l'écouter. Avec une petite déception au début, le son étant beaucoup plus rythmé, avec des beats plus présents qu'ils ne l'avaient été jusque là. Plus pro aussi, l'arrangement est sans défaut, presque lisse, sobre et sérieux. On ne rigole plus. Le refrain arrive et n'a rien de spécial : "Somebody who can stay awake I need somebody who." Mais vient ensuite un son tout à fait singulier, un assemblage sonore indescriptible et distordant à la limite de l'harmonie. Et c'est bien là que j'ai retrouvé le groupe que j'adore, avec ce son qui transporte autant qu'il surprend, puis sur lequel se calent les voix des des trois filles en chœur dans une perfection beach boyesque, le côté planant en plus.
Bref, un son radicalement différent de leur précédent album, une évolution vers quelque chose de plus dynamique, tout en gardant ce qui faisait le sel du groupe.

Puis en août le second extrait, "Crazy" a été dévoilé. Moins pesant que "Somebody Who", mais définitivement plus Rock (pop ?), influencé par les apports d'Annie Hart dans la batterie grâce une pratique de l'instrument qu'elle a développé durant le hiatus du groupe. Les claviers, comme toujours chez Au Revoir Simone, reprennent le dessus après le refrain, avec le même côté distorsion que sur "Somebody Who" qui accentue le côté Rock du morceau. On pardonnera les paroles et le refrain simpliste parce que... juste parce que. Si la chanson ne paie pas de mine à la première écoute elle reste férocement en tête.

Et maintenant qu'il est sorti, mon avis sur l'album en entier :
More Than : Habitué par les deux premiers extraits de l'album, j'ai pu d'avantage apprécier ce titre dès la première écoute, elle reste dans la même veine eletronica-pop-rock. Un morceau tout en progression qui en fait un excellent titre d'ouverture. Mon préféré pour l'instant. La voie d'Heather d'Angelo fait des merveilles en solo avant d'être complété par les deux autres voix du groupe sur le refrain qui, comme pour les deux précédents titres cités, est plus qu'entêtant. Il y a certes un simplicité dans les paroles, mais elles ne sont pas pour autant vides de sens et servent la musique à la perfection.

The Lead Is Galloping : Un titre qui joue sur les brisures de rythme et de ton entre les couplets et le refrain. Plus mélancolique que les autres avec encore une fois un refrain efficace. Les paroles sont assez énigmatiques en revanche. Moins accrocheuse que les deux autres, mais sympa quand même.

Crazy : voir plus haut.

We both Know : Le point noir de l'album, à mon goût le titre le moins réussi du groupe tout album confondu. Quelques notes avec un son distordant en boucle et une grosse impression de répétition contemplative. En soit si l'intro de la chanson n'avait pas duré 3 minutes j'aurais pu l'apprécier, mais là j'ai du mal. Peut-être est-ce aussi le but de ce titre qui décrit une tromperie : difficile d'en faire un titre plaisant. D'ailleurs je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec "Fallen Snow" (The Bird Of Music), ma chanson préférée du groupe, qui commence par le même "We both know" et semble raconter la même histoire vue du point de vue de l'autre femme, d'un amour fugace et interdit.
(edit post-scriptum après plusieurs jours d'écoute : je retire ce que j'ai pensé à la première écoute, cette chanson est belle !)

Just Like a Tree : Excepté sur la partie rythmique, plus proche dans le son des autres albums du groupes pour le thème principal. Alternance de longue nappes de synthés entrecoupées de passages plus dynamiques. Les harmonies de voix sont très réussies. Pas le meilleur titre de l'album, mais assez plaisant pour la musique.

Somebody Who : Voir plus haut.

Gravitron : La courte intro est sublime. Le titre est rythmé, on continue sur l'influence pop-rock et on prend de la hauteur : "such high I won't come down", la chute est décrite dans les quatre morceaux suivants.

Boiling Point : La chanson la plus calme de l'album. Douce, triste et mélancoliques, accentuées par les notes dissonances finales.

Love you don't know me: Impossible de dire à quel chanson celle ci me fait penser, mais les dernières notes du refrain me rappellent quelque chose. Refrain, c'est un grand mot, il n'y en a pas vraiment: "Love you don't know me" sont les seules paroles. Le titre est faible à mon goût, mieux que "We both know", mais pas un titre qu'on a envie d'écouter en boucle.
(edit post-scriptum après plusieurs jours d'écoute : l'impression de déjà vu est passée, la chanson est honnêtement pas mal.)

Hand Over Hand : Une des rares chansons de l'album qui n'ait pas un côté très rythmé, on retrouve un peu des sonorités des précédents albums. L'accent est porté sur les voix.

Let The Night Win : Ce titre donne un sacré vertige par son arpège très "harpien", ses paroles et la voix d'Erika qui par empathie vous fait vous rappeler votre pire chagrin de cœur. Très beau final.

Même si l'on préférait (comme moi), le son des précédents albums et l'apogée qu'était "The Bird Of Music" (notamment au niveau des textes) on appréciera aussi cet album du renouveau. Plutôt que faire de la redite, le groupe a préféré chercher de nouveaux sons tout en gardant ce qui faisait la particularité du groupe : les harmonies de voix, Les mélanges d'accords étranges entre claviers, tout en intégrant des influences rock à son répertoire par une batterie plus travaillée et quelques distorsions bien placées. Le son, globalement, est plus travaillé sur cet album, c'est ce qui se remarque le plus. Les thèmes également ont évolués : c'est un album moins optimiste, centré sur les aspirations sentimentales contrariées et les relations qui lâchent. Le principal regret pour moi est que les textes n'aient pas été autant travaillés que le son. Il y a beaucoup de non dit, de choses laissées libres d'interprétation. Difficile de détailler les sujets douloureux, les paroles sont plus abstraites qu'explicites. La tendance avait été amorcée dans "Still Night Still Night" qui avait déjà sa part d'ombre ("Shadows"). L'optimisme du groupe à ses début semble s'être un peu perdu. La vie n'est pas toujours rose.

En conclusion [TLDR]: un son nouveau pour un album introspectif, mélancolique mais dynamique. Un album moins facile d'accès que les précédents mais riche et réussi qui gagne beaucoup en ré-écoutes.
alain_alain
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le 27 sept. 2013

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