Et la lumière fut

Franchement, je ne suis pas loin de penser que les Stones s'apparentent à la plus belle rencontre artistique de ma vie, alors lorsque j'apprend que l'immense Martin Scorsese, l'un des réalisateurs m'ayant le plus marqué, souhaite capter un concert de la troupe à Jagger, forcément l'attente devient énorme.

Déjà, il faut avoir conscience que les Stones de 2006 ne sont pas ceux du début des années 1970 et que l'âge d'or reste loin derrière eux, malgré quelques petites pépites tout au long de leur longue discographie. Capté durant des concerts au Beacon Theatre à New York, les 29 octobre et 1er novembre 2006, ce live, faisant suite à la tournée suivant A Bigger Bang, permet aux spectateurs d'entendre à la fois quelques classiques du groupe (Satisfaction, Jumpin' Jack Flash, Brown Sugar...) mais aussi quelques raretés (All Down the Line, Some Girls...) ainsi que trois réussis featuring, avec Jack White pour une belle version de Loving Cup, Buddy Guy pour l'excellent blues Champagne & Reefer ainsi que Christina Aguilera qui apporte toute son énergie pour Live With Me.

C'est d'abord réjouissant de voir les Stones dans une telle forme, montrant qu'ils sont capable d'être, encore, autres choses que des bêtes de stades à réciter une setlist sans surprise. Ici ils osent, n'hésitent pas à fouiller dans de si grands albums, mais dont les pépites sont très rarement jouées en live, que sont Some Girls, Tattoo You et surtout Exile on main Street tout en proposant des classiques joués avec efficacité, ainsi qu'une énergie débordante et contagieuse (qui est d'ailleurs bien retranscrite, de manières assez classieuses, dans la réalisation de Scorsese), à défaut des envolées magiques et improvisations de l'ère Mick Taylor. Quelques raretés comme As Tear Go By, belle ballade d'abord offerte à Marianne Faithfull ou encore le bluesy You Got the Silver sont clairement les bienvenues. D'ailleurs, aucune fausse note n'est à détecter, tant dans les raretés que les chansons plus connues, les Stones savent se montrer efficace, et parfois même à sublimer les chansons.

Ce qui fait aussi plaisir à voir, c'est la forme individuelle des Stones, ainsi que l'osmose entre les différents musiciens. Ils proposent une prestation énergétique, sont contents d'être là (tout comme les invités), ça se voit et c'est même contagieux. Keith ira même jusqu'à chanter des titres, tandis qu'il assure à merveille la rythmique, son duo avec Ron Wood se révélant adéquat. Derrière, Charlie Watts assure, tout comme les musiciens additionnels et devant, Jagger fait le show, sort l'harmonica, la guitare (notamment sur les excellentes versions de Loving Cup et surtout Some Girls, chanson géniale mais jamais mise en valeur par le groupe) et montre qu'il est toujours en immense forme, bougeant comme durant ses jeunes années. Parfois intense, le groupe sait toujours faire ressortir diverses sensations de leurs chansons, que ce soit l'émotion, à l'image d'As Tear Go By, une énergie et chaleur vraiment communicative, comme peuvent en témoigner les prestations sur Jumpin' Jack Flash ou Sympathy for the Devil et souvent l'envie de bouger ou taper du pied, comme cette belle version de Just my Imagination.

Réuni par Martin Scorsese pour son œuvre Shine a Light, les Stones proposent une prestation énergétique, aboutie et surprenante, où ils n'hésitent pas à reprendre quelques pépites rarement jouées en live et se révèlent en grande forme. Une des meilleurs galettes scéniques du groupe depuis bien longtemps.

Setlist :

Jumpin' Jack Flash
Shattered
She Was Hot
All Down the Line
Loving Cup (avec Jack White)
As Tears Go By
Some Girls
Just My Imagination
Faraway Eyes
Champagne & Reefer (avec Buddy Guy)
Tumbling Dice
Band Introductions
You Got the Silver
Connection
Sympathy for the Devil
Live With Me (avec Christina Aguilera)
Start Me Up
Brown Sugar
(I Can't Get No) Satisfaction
Little T&A
Paint It, Black
I’m Free
Shine a Light