L'autre fois, j'étais en train d'accrocher des DVD de films de Christophe Gans à mon cerisier (pour éviter que des oiseaux et des gens ayant bon goût viennent me dépouiller), et je me suis demandé pourquoi j'avais trouvé le premier Silent Hill (le jeu, hein) si terrifiant : était-ce à cause des graphismes rétros et des décors dégueulasses ou alors à cause des promenades dans les rues de la ville, où la plupart des créatures volent / courent plus vite que le personnage principal ? Evidemment, les peurs les plus indicibles trouvent souvent leur source dans ce qu'on ne voit pas, et c'est pour cette raison que l'ambiance sonore de ce premier opus a davantage d'importance que ce que nos yeux veulent bien nous montrer.

        Cette OST, composée par Akira Yamaoka, correspond également à un choix artistique qu'on ne retrouvera dans aucune bande-son des SH qui suivront. Même si la bouille et le sourire gracieux de Lisa Garland s'étalent sur la cover du disque, il est impossible de nier qu'il demeure extrêmement brutal et inaccessible pour la plupart des esgourdes.
        En même temps, le titre éponyme (ce chef d'œuvre) ouvre l'album de la plus gentille et mélancolique des manières, mais Yamaoka piège bien vite l'auditeur, lequel s'en rend généralement compte avec "Until Death", dans un style assez cruel qui mêle dark ambient et musique industriel. Evidemment, à ce stade là, les gens qui ont quitté l'aventure, prétextant que "ce n'est pas de la musique", sont légions.

MAIS MOI JE KIFFE.

        En fait, c'est assez dur à expliquer. C'est pas vraiment de la "musique qui s'écoute" (putain, c'est tellement élitiste ce que je dis) mais ça ne peut pas se laisser en fond non plus. En général, l'auditeur est à la fois spectateur intrigué et victime consentante. Il tend une oreille ahurie sur "Over", observe son ventre se serrer sur "My Heaven", admire la faculté du compositeur de proposer des interludes ambient plus accessibles (au pif "Claw Finger", "Fear of the Dark", "Not Tomorrow 1") pile au moment où on vient d'enchainer une dizaine de titres industriels bien violents. Parfois même, il peut sentir le souffle chaud d'un clébard putréfié s'insinuer sur sa nuque, à l'écoute de "Die".


        Cette galette n'est pourtant pas exempte de tout reproche, notamment en ce qui concerne la tracklist. Quarante morceaux pour un produit de plus d'une heure, c'est un brin démesuré pour ce style de musique assez éprouvant, et ça ne manquera pas de coller des indigestions (ou des maux de tête), même aux plus braves. De plus, on aurait pu virer tous les titres n'excédant pas les trente secondes, pour la simple et bonne raison qu'elle n'apporte pas grand chose au résultat final, sinon la présence de petites interludes anecdotiques.
        Et juste un petit mot à l'adresse de "Esperándote" : je ne t'aime pas, je trouve que tu ne dégages en rien l'atmosphère du premier Silent Hill, et à chaque fois que je tente de me faire un avis positif sur toi, tu me fais penser à la soundtrack du prochain Louis la Brocante.


Bref, à écouter dans le brouillard ou dans une école désaffectée.
Yoth
7
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Créée

le 24 sept. 2012

Modifiée

le 29 sept. 2012

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Yoth

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