Frappés par la lumière crue de l'astre béant, des corps décharnés et nus montent les marches de cette salle angulaire où grouillent les démons d'un ancien temps. Gorgones vulvaires et déités miasmatiques s'entrelacent dans une lente ascension vers le néant, de la boue tentaculaire au trône dévorant. Le rituel est lancé.


Un an à peine après l'hallucinant kaléidoscope nippon de "Eons", et nous revoilà lâchés dans les labyrinthes enfiévrés de Neptune, avec pour seule amarre ce lancinement constant de la drone psychédélique. Charnue, charnelle, chaotique, la trame sonore s'extirpe de toute règle pour devenir une véritable transe rythmique. Difficile de mettre des visages belges sur cet orchestre de cuivres, de guitares et de percussions tant il est halluciné, habité par un fabuleux néant.


Cet album, capté en live en Mars 2020, se vit comme un pure cérémonial antique. Une dimension ritualiste plane sur cette ritournelle sumérienne difficile d'accès, avec ses vibrations orientales, ses crispations dissonantes, son ossature toujours très puissante sur laquelle copule un free jazz qui ne sacrifie jamais à l'ambiance.


Enivrant, suffocant ou planant, ce long crescendo est à l'image de son sublime artwork signé Hervé Scott Flament : l'entrée dans un monde monstrueux aux rites sacrificiels, baigné de dorures d'outre-monde. Quelque part entre Lovecraft et Giger, dans une dimension impie où grouillent les pires vices d'une humanité à jamais damnée. Alors que la basse résonne inlassablement, les variations sont multiples, proche d'un krautrock mais cousue d'une étoffe bien plus tribale et incisive - les vingt dernières minutes, incroyablement riches, ouvrent les portes d'un univers en furie.


Plus qu'un voyage dans les tréfonds d'un temple babylonien, "Solar Drone Ceremony" est une ode créatrice totalisante et passionnée, une œuvre de génie qui pousse la transe sonore à un niveau de finesse rarement atteint.

FlorianSanfilippo
9

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le 17 mai 2021

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