The piper's calling you to join him

Vous trouvez dommage que Led Zeppelin n'ait fait qu'une seule Stairway to Heaven ? Ce délice d'arpèges acoustiques se fondant progressivement en un déluge hard rock...

Non ?

Eh bien moi oui, et Wishbone Ash aussi, du coup ils ont sorti Argus.

Impossible en effet de ne pas penser à ladite chanson à l'écoute de ces 7 longs morceaux mêlant intros acoustiques, riffs bien sentis et solos électriques. Et la comparaison est encore plus parlante quand on sait que l'album n'est sorti que 6 mois après !

Pour autant, résumer cet album (aujourd'hui relativement oublié malgré sa superbe pochette conçue par Storm Thorgerson) à une simple copie du divin original serait un peu trop simple.

D'abord l'album a une influence prog très nette, plus que hard-rock, Sometimes World par exemple part au bout de 3 minutes dans un délire très Yes. Surtout, Andy Powell à une voix bien plus propre et moins agressive que celle de Robert Plant, qui donne une ambiance souvent bien différente, rêveuse comme peut l'être In the Court of the Crimson King.

Mais surtout, le groupe comporte 2 guitaristes, ce qui est, vous en conviendrez, mathématiquement supérieur à 1, mais aussi inférieur à 3 ( <3, si ça c'est pas de l'argument en béton). Le groupe apparaît ainsi comme un précurseur en construisant un jeu à 2 guitares, rythmique et mélodique, qui en influencera tant d'autres, Iron Maiden en tête.

Il y a un dernier point sur lequel la comparaison avec Stairway to Heaven est flatteuse : les morceaux trouvent leur originalité dans des schémas de composition à chaque fois differents, le groupe s'attachant tant que possible à ne pas se répéter et évitant le schéma couplet-refrain comme la peste. Chacune des chansons en a sa propre richesse, tissant autour de thématiques moyen-âgeuses un univers quelque peu irréel.

Je trouve assez mystérieux que Wishbone Ash ne soit pas aujourd'hui crédité d'une place entre Led Zeppelin et Deep Purple parmi le panthéon du hard-rock, et soit aujourd'hui pratiquement oublié du grand public. Quand on écoute cet album, tout y est, des compositions accessibles mais de qualité, des mélodies mémorables et une influence durable sur un pan entier de la musique... Avec un peu de chance, cette critique saura vous convaincre de ressortir sa majestueuse pochette du grenier pour l'écouter, et rétablir à cette petite échelle un semblant de justice !