Profane de la scène Black Metal, je m'arrête aux classiques et cherche rarement plus loin dans la jungle touffu qu'est cette scène. Même avec des blogs pour m'éclairer, la pléthore de démos, Myspace et Soundcloud me refroidissent ; me refroidissent d'autan plus que le style n'est pas abordable à la première écoute. Mais quand en guise de promo Iron Bonehead m'a envoyé la pochette gatefold de l'album avec ma dernière commande, je me suis dit que c'était une bonne invitation à écouter Cult Of Fire.
Il faut dire que le « package » est magnifique : entièrement travaillé par David Glomba de Teitan Arts, avec un superbe poster A2 ET une brochure de huit magnifique illustrations, ça donne l'eau à la bouche. On s'imagine déjà une musique sombre et secrète, avec des mélodies aussi diverse que les représentations du contenu du booklet. Même la pochette est terrible, et laisse présager un groupe qui a réussi à capturer une essence occulte dans un studio d'enregistrement. Je pense tout de suite à Paul Chain et Mortuary Drape, même si ici c'est beaucoup plus tape à l'oeil. On est pas loin de quelque écriture shamaniques trouvées dans un obscure temple troglodyte où pratiquent en bons ascètes quelques cénobites, avec pour autel la photo que l'on trouve en ouvrant la pochette. S'il vous en faut plus tirez les rideaux, brûlez de l'encens, buvez un thé ou encore allumez votre machin aux herbe, sinon le groupe ne peut rien faire de plus pour vous mettre dans l'ambiance avant que vous ne lanciez le disque.


Le premier morceau avec son introduction orientale plutôt honnête okay. Cette instrumentale doit nous emmener vers une lourde atmosphère, pourtant elle se révèle poussive.
Pas grave, déjà commence un Black Metal qui joue un exercice de style au travers d'une guitare froide et minérale. Heureusement qu'elle est soutenu ici par une discrète cithare. Le son clean rappel un peu Emperor, mais en tellement agaçant que ça fait plutôt penser à un moustique qui nous frôle l'oreille. C'est la technique du tremolo, servi à l'excès, façon mandoline.
Toujours dans l'exercice de style, le chant est sauvage et bestial à souhait. Malgré ça aucune émotion ne semble passer et fait plutôt penser à une imitation de mots inarticulés ou des voyelles formées avec la mâchoire que un réel texte récité. Ce même chant est sauvé par les récitals à voix clair, plus convaincants.


La suite est déjà plus sympa, avec un orgue Hammond qui fait penser à God Seed, et avec enfin des riffs et des mélodies correcte. Plus loin un clavier fera une discrète apparition, genre « c'était ouvert et allumé, alors je suis rentré ». La fin bancal remet en question la recherche réel des compositions, et l'utilisation des arrangements exotique : plus cosmétique que authentiquement partie intégrante du travail, pourquoi sont-ils si en retrait ?
La batterie est plus espacé (sur les deux premières minutes du moins), et délivre de jolis roulement et d'amples frappe. Elle donne une dimension et un volume à la musique.
Le retrait des « blast » nous permet de profiter de la basse. Propre et « confortable », c'est elle qui va nous empêcher d'étouffer. Le contraste avec la guitare est recherché, mais ça n'empêche pas qu'on puisse ne pas aimer.
Même le chant n'est pas trop mal. Les« aeiouy-aeiouy » du premier morceau sont bien moindre.


Les bons moments sont là tout de même, comme sur "When Death Is All", où malgré la guitare qui persiste a faire grincer des dents, l'intense et frénétique duo batterie/orgue amène cette atmosphère qu'on ressent trop rarement. C'est un des point fort du disque : une production qui aide les rythmiques à donner cette sensation d'humidité, de grotte qui suinte de condensation.
Pareil pour la guitare qui peut jouer des riffs sombres et qui nous font dire « yes, ça démarre ». Mais le même instrument va remettre encore et encore ce tremolo. Ou parfois se sont pour des maladresses, comme un solo avec un son style « musique du fond des ages », le tout sur un bruit de bûches qui brûlent... Quelques passages qui traînent en longueur ne sont pas là pour l'aider, comme sur "Khanda Manda Yoga". Sur Kali Ma, retour de l'instrument qui vient foutre par terre l'arrangement fait sur le chant profond et en retrait. Tout d'un coup, alors qu'on soupir en attendant la suite, un piano se met en branle sur la « mélodie », n'apportant rien. D'accord ça fait parti de l’empreinte de Cult Of Fire, mais quand même.
Pire, le chant qu'on apprécie quand il est clean, un comble.
Grosse déception sur la modestie des textures exotiques. Le Black Metal a un conservatisme qui lui est propre, et se démarquer n'est pas facile et ça peu être vite casse gueule. Une introduction et une outro qui évoquent l'Inde, un peut de cithare par-ci, on coup de bong par-là mais ça ne va pas plus loin et cette timidité ne nous séduit pas du tout.
Ce qui me fait le plus mal, c'est que même après plusieurs écoutes, dans des conditions différentes et avec de l'indulgence, la composition général de l'album m'a donné une impression de manque d'audace et de prévisibilité qui ne permet pas de comprendre les singularités du culte de Kali, ni par un chemin de l'introspection ni par un chemin du rêve ouvert.
Là on a bonnes idées, de belles performances, de bons passages malgré les écueils, pourtant la prière ne marche pas. Non pas que l'investissement des musiciens soit remis en cause, non pas que l'on doute de leur attachement à Kali, mais la réflexion et les émotions promises ne sont pas au rendez-vous.


Pourtant, beaucoup de gens ont apprécié ce disque et y ont trouvé leur lot de méditation. Et tant mieux pour eux, ils ont de la chance. Pas moi vu que je suis passé à côté de disque, tout comme je suis passé à côté de Negură Bunget. Je ne pense pas être le seul à être rebuté et à trouver les premières écoutes laborieuse. Le groupe a diligemment uploadé l'album sur Youtube, à vous d'essayer.
Attention à ce que certain nommes « Black Metal hindouiste » : ce n'est pas vrai. On va même jusqu'à dire que Cult of Fire « transcende les frontière », que Ascetic Meditation Of Death est une « masterpiece du Metal ». Là il est peut-être temps d'arrêter de s'emballer et d'attendre le troisième album.


Conclusion : un bon second disque, une musique sincère, une artwork superbe, de bons extraits flingués par une guitare/chant ennuyeuse, ainsi qu'une ambition trop grande traduite par des compositions banales habillées par quelque instruments orientaux.

Dix_Elektrik
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le 6 oct. 2014

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