Cherchez dans n'importe quelle liste de "best rap albums ever" ou de "best rappers ever", vous avez de grandes chances d'y trouver Big Pun et le seul album studio sorti de son vivant, "Capital Punishment". Sorti en 1998 et succès tant critique que commercial, il s'annonçait comme le début d'une grande carrière. Mais voilà, de telles histoires finissent forcément mal : deux ans plus tard, le Punisher trouvera la mort, non pas par assassinat comme d'autres Big, mais par une crise cardiaque.


À croire que son destin était gravé ‎dans son nom : à sa mort en 2000, Big Pun pesait 311 kilos. Big Pun n'a jamais eu une vie facile : sans père et avec une mère abusive, il quitta le domicile familial à 15 ans, puis devint rapidement père d'un certain Chris Rivers qu'il allait devoir élever avec sa femme sans aucun soutien extérieur.
Après des évènements traumatiques, certains compensent par la drogue, d'autres le crime, d'autres le travail. Big Pun ce sera la nourriture. Les nombreuses cures qu'il suivra n'arrangeront jamais le problème. Le succès de Capital Punishment apporta un gain de confiance en lui, mais qui s'accompagna des lourdes responsabilités du deuxième album. Sa situation ne pouvait que se dégrader.


Ce qui est vraiment impressionnant chez Big Pun, c'est que malgré ses problèmes de santé, ce dernier a des qualités techniques indéniables, quasiment inhumaines. Son flow est extrêmement rapide et pourtant compréhensible. Les rimes semblent riches car elles partent dans tous les sens et la vitesse est trop élevé pour qu'on puisse contredire Pun. On ne peut que s'asseoir et être stupéfait devant la maîtrise du rappeur.
Autre détail qui change la donne : l'accent de Big Pun n'a rien d'afro-américain, car il est latino. Il possède donc un accent du Bronx moins marqué que d'autres rappeurs. Ce qui le place encore une fois à part d'autres rappeurs du même calibre. 
Bref, le style de Big Pun va parfaitement avec son physique atypique : dans l'extrême. Aussi extrême que peut l'être une peine capitale.


L'instrumentation ne suit pourtant pas la même veine. Le flow de Big Pun se suffit à lui-même, et il est bien mieux mis en valeur par une instrumentation facile mais efficace. Une production plus violente aurait nui à la fluidité de l'ensemble. Notons que les morceaux sont tous relativement courts : aucun ne dépasse 5 minutes. L'ensemble passe donc à merveille, ce qui n'est pas toujours le cas dans le hip-hop. Avec 24 morceaux au compteur (dont quelques skit inintéressants), ce n'était pourtant pas gagné.


Le tout reste étonnamment varié : "Dream Shatterer" et ses violons déchainés est incroyable tant le flow furieux du Punisher s'accorde parfaitement aux beats. La reprise de "Deep Cover" de Dre et Snoop Dogg prend une nouvelle ampleur grâce à la participation de Fat Joe. "You Ain't a Killer" et son piano pourrait presque faire penser à du Mobb Deep. Des morceaux plus pop comme "Punish Me" contrastent complètement et apportent un certain degré de variété.
Et il y a bien sur "Still Not A Player", remix de "I'm Not a Player" également présente sur l'album, qui sera le plus grand tube de Big Pun.


Le Punisher du Bronx est un autre destin tragique du monde du hip-hop. Capital Punishment est un excellent album et mérite qu'on s'y attarde encore aujourd'hui.

Mellow-Yellow
8
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le 28 déc. 2016

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