Dark Horse
6.5
Dark Horse

Album de George Harrison (1974)

De toutes les carrières solos des ex-Beatles, c'est sans doute celle de George Harrison qui est la plus méconnue (avec celle de Ringo, mais bon là ...). Nous nous devons donc de réparer cette injustice.


Les Beatles, plus grand groupe de musique ayant existé, se séparent fin 1969, John Lennon déclarant qu'il en a assez, assez des divergences créatives et financières (coucou Apple et Magic Alex). Cela reste cependant secret, pour l'instant. Ironique, c'est Paul McCartney qui annoncera la dissolution du groupe dans un communiqué de presse factice, inclus dans la pochette de son premier album, McCartney en 1970, à la fureur de son ancien collègue.


Les quatre Beatles sortent des disques solos en 1970, McCartney pour Paul, Plastic Ono Band pour John, Sentimental Journey et Beaucoups of Blues pour Ringo, et enfin All Things Must Pass pour George, sorti en un luxueux coffret 3LP. A la surprise générale, c'est ce triple album qui aura le plus de succès, porté par son single "My Sweet Lord". Album réellement magnifique et réussi donc, dont nous risquerons de reparler dans le futur.


Cependant, là n'est pas notre sujet, aujourd'hui nous allons parler de Dark Horse, cinquième opus solo de Beatle George (la bande originale du film Wonderwall de1967, et Electronic Sound, premier album expérimental au synthétiseur Moog de 1969 étant inclus ici) sorti en décembre 1974. Il fut très mal accueilli par le public et la critique, injustement.


1973 et 1974 sont des années difficiles pour George sur le plan personnel. Le successeur d'All Things Must Pass, Living In The Material World laisse les opinions divisées, le comparant toujours à son prédécesseur, le succès total escompté n'est pas là. De plus, Apple Records, la société créée avec ses collègues Beatles est en train de mourir. Allen Klein, pourtant chaudement recommandé et imposé par John Lennon, a arnaqué le groupe, comme il l'a fait avec les Rolling Stones (Jagger les avait prévenu, mais bon ...)


Il crée son propre label, Dark Horse Records, censé prendre le relais dès que son contrat avec EMI et Apple prendra fin. Egalement, sa femme Pattie Boyd le quitte pour son meilleur ami Eric Clapton (Layla, c'est elle !). Elle est lassée du prosélytisme croissant de George, accueillant ses amis religieux dans la maison du couple, lassée également des infidélités de son Beatle de mari, donc elle le lâche pour Slowhand, Derek Claptoe, le dieu de la guitare (leur union n'aura pas plus de succès, mais bon ...). George a également une aventure avec la femme du pauvre Ringo Starr, Maureen, ce qui provoquera un divorce entre eux.
Ajouter à cela une consommation croissante d'alcool et vous obtenez un cocktail des plus charmants. Comme vous l'aurez compris, George pourrait aller mieux.


Il part en tournée avec son ami Ravi Shankar, et fait tout pour détruire son image de Beatles, changeant les paroles des chansons, indiquant au public qu'il pourrait mourir pour la musique indienne, mais certainement pas pour le rock qui l'a rendu célèbre.


Dark Horse est enregistré dans son studio personnel au manoir de Friar Park. Harrison, trainant une sale laryngite suite à sa tournée, voit ses capacités vocales assez diminuées. Entouré de ses amis, il se démène dans une période qui commence à le dépasser.


L'album contient neuf chansons, et contrairement a ce qu'en ont pensé les critiques de l'époque, Dark Horse est un très bel album, rempli de spleen et de mélancolie. Harrison s'est entouré de ses amis, Ringo Starr, Klaus Voorman, Billy Preston, et la formation varie pratiquement sur chaque chanson.


Il s'ouvre par un instrumental, "Hari's On Tour" (on notera le jeu de mots), réalisé avec le groupe accompagnant Joni Mitchell à l'époque, L.A. Express, c'est une piste très intéressante où la guitare grelottante de George se marie au sax héroïque de Tom Scott, censée représenter l'ambiance, l'effervescence d'une tournée. C'est ma chanson préférée de l'album en fait.


Suit, toujours avec L.A. Express, "Simply Shady", où la voix de George sonne rocailleuse, cela dû à sa laryngite. On retrouverait presque le génie d'All Things Must Pass ici, c'est très réussi, un peu dans la continuité de "Hari's On Tour". La collaboration avec L.A. Express s'arrête là, et le reste de l'album défile, plus classiquement.


"So Sad" témoigne (incroyable) de la mélancolie d'Harrison suite à sa rupture et à son futur divorce. C'est agréable, mais en aucun cas quintessentiel, pareil pour la reprise modifiée des Everly Brothers, "Bye Bye, Love" sur laquelle sont crédités , sans qu'ils n'aient jamais été là (ironique), Eric Clapton et Pattie Boyd. Cela représente un nouveau style, plus pop et léger, qu'il exploitera encore plus sur son prochain opus Extra Texture (Read All About It). "Maya Love" termine la face A , ce n'est pas une chanson très marquante, exception faite de son étonnante introduction.


"Ding Dong Ding Dong" est la chanson de Noël du répertoire de George, Lennon a eu son "Happy Christmas (War Is Over)" en 1971, Macca aura "Wonderful Christmastime" en 1980 et Ringo y consacrera un album entier au début des années 2000. Malgré le battage intensif réalisé autour de celle-ci (publucités, vidéoclip), ce sera un échec commercial.


"Dark Horse", la chanson titre, est superbe, une des grandes réussites de l'album. C'est celle-ci qui est incluse dans les best-of et dont on a tendance à se souvenir. Ici, c'est la laryngite d'Harrison qui brille! Réussite.


"Far East Man", co-créditée avec Ron Wood, ex-Faces et futur Rolling Stones est aussi un des morceaux brillants du disque, et parce qu'il fallait bien que ça arrive, l'album se termine par une petite chanson Hare Krishna, "It Is He". Pour être honnête, c'est terriblement mineur, et même ridicule. Ce prosélytisme est une des raisons pour laquelle sa femme l'a laissé tomber. Cette chanson nous donne aussi envie de laisser tomber l'album (on ne comprend absolument rien, le texte entier étant de l'indien baragouiné par Beatle George, Dieu est grand, blablabla, ce genre de choses...), mais heureusement c'est terminé. Si cela peut vous rassurer, c'est la dernière chanson de ce type qu'il fera dans sa carrière.


Pour conclure, Dark Horse est au fond un album sympathique malgré sa mauvaise réputation. Sa pochette parodique de Sgt Pepper réalisée par Tom Wilkes (celle de Tommy des Who, c'est lui) ne marquera pas votre discographie du sceau de la médiocrité. On voit une volonté de l'auteur d'y créer un matériel inédit pour une tournée qui suivra. McCartney avait déjà fait ça pour le premier album des Wings, l'excellent Wild Life sorti en 1972.
Après cela, George Harrison ne marquera plus les charts jusqu'en 1987, année de Cloud Nine, malgré de bons albums (George Harrison, 1979) quoique tous un peu ennuyeux.


Mais espoir ! Georgie Boy a retrouvé l'amour ;) Si vous avez le vinyle, jetez un oeil sur le macaron de la face B... :)


Viva !


Dark Horse, album complet

lyons_pride_
7
Écrit par

Créée

le 2 janv. 2022

Critique lue 106 fois

2 j'aime

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