Ego Trippin’
6.1
Ego Trippin’

Album de Snoop Dogg (2008)

Il était temps que les amateurs de rap Westcoast acceptent une fois pour toute que Snoop Dogg ne concevra jamais un Doggystyle bis (ni une suite à son dernier classique certifié Tha Last Meal), la mode du G Funk appartient au siècle dernier même si des irréductibles la font perdurer (même dans nos contrées du Val II Marne). Mais Snoop n'a pas attendu l'avis des conservateurs pour poursuivre son évolution artistique, il avait d'ailleurs scandalisé son fidèle public avec R&G The Masterpiece en 2004. Pour Ego Trippin', le rappeur de Long Beach tenait absolument – au départ – à réaliser un album sans aucun invité, très personnel, produit uniquement par The Neptunes et sur lequel il pourrait faire trembler sa luette comme il le sentait. Une démarche audacieuse carrément à l'opposé d'un Tha Blue Carpet Treatment featuring la côte ouest au complet plus des grands noms rap/r&b en tout genre, artistes et producteurs confondus. À l'arrivée, le résultat n'a rien à voir avec ce qui était convenu : Quatre artistes se sont greffés à ce projet supervisé par QDT Muzik...QDT ? l'acronyme de Quik/Dogg/Teddy, plus précisément un trio formé de Snoop, l'illustre producteur Westcoast DJ Quik et Teddy Riley, la légende urbaine qui a inventé le New Jack à la fin des années 80 et produit Dangerous de Michael Jackson.
Après écoute des 21 pistes, aussi différentes les unes que les autres, il fallait une analyse complète et précise de cette œuvre surprenante point de vue créatif.
—–
Press Play:
Kurupt introduit ce morceau, ça démarre à peine que j'me dis déjà qu'on a affaire à la tuerie de l'album. Il la sort d'où cette production de malade DJ Quik? Il nous rappelle toujours – malgré sa discrétion – qu'il reste un génie. Sample du magnifique "Voyage to Atlantis" des Isley Brothers, une valeur sûre auquel il a rajouté quelques cuivres, noyé une guitare électrique et crédité les vocalises d'une charmante chanteuse qu'on retrouvait déjà sur "Promise I" de R&G. Juste magnifique!

SD Is Out:
Ça fait plaisir de retrouver Teddy Riley en studio surtout pour travailler avec Snoop Dogg. On remarque qu'il n'a pas perdu la main: le vocoder est toujours de sortie, ambiance laid-back, petite mélodie crescendo, et des vocalises de Charlie Wilson dont on a de plus en plus l'habitude de voir apparaître aux côtés de Snoop. Le morceau vous plonge dans une autre dimension, tant bien même qu'il semble reprendre le même fond de basse qu'un certain "Drop It Like It's Hot" qu'avait produit ses poulains des Neptunes.

Gangsta Like Me:
De retour avec Teddy Riley aux commandes derrière un titre très étonnant. Un morceau folklo mélangeant tout et n'importe quoi, et qui devient vite irritant. Difficile de s'y accrocher tout au long de ses 4min26. Limite seul le solo de Jamie Foxx vers la fin fait ressortir un intérêt à l'écouter.


Neva Have 2 Worry:
Morceau confession où Snoop Dogg parle de tout son parcours jusqu'à aujourd'hui, la star mondiale qu'il est devenu ("Out the hood to be a big star" comme dirait Uncle Chucc sur le refrain). Et le moins qu'on puisse dire, c'est que le titre Ego Trippin' prend tout son sens ici car il n'y va pas de main morte sur les autocongratulations. Mais en même temps comment le lui reprocher et surtout qui peut se vanter d'avoir une carrière, une réputation toujours aussi solide malgré les années passées. Snoop Dogg reste bien le Boss dans le monde du Hip Hop quoi qu'on en dise.

Sexual Eruption:
Touchant à tout Snoop Dogg rend hommage à travers ce morceau à la musique des années 70, au Funk et aux légendes que sont Zapp & Roger Troutman. Avec utilisation de la fameuse talk box, Snoop nous plonge de plus bel dans son univers de Pimp pour un single sexuellement sensuel. Shawty Redd lui livre un tube tout fait dont on est pas prêt d'oublier.

Life Of Da Party:
And everybody's celebratin'.... voilà comment on pourra résumer ce morceau. Le déjanté Mistah Fab et le plus gros pimp de l'histoire j'ai nommé Too $hort viennent épauler Snoop Dogg dans son devoir de divertir et ambiancer la foule le temps d'une soirée bien arrosée.

Waste Of Time:
Snoop a ce pouvoir de refaire venir les immenses artistes trop discrets. Sur le Blue Carpet, D'Angelo avait succombé sachant que Dr Dre était derrière la prod, cette fois-ci c'est la délicate voix de Raphael Saadiq qu'on peut admirer sur cette chanson de lover appréciable mais assez simpliste dans son ensemble.

Cool:
Ghoooostbuster! Oups! Non cette fois-ci Teddy Riley et Snoop Dogg ont sortis le grand jeu en samplant le groupe The Time qui ont fait vibrer la planète Funk dans les années 80 avec ce titre du même nom.

Sets Up:
Aye Pépito!! Oula décidemment... Il aurait été étonnant de ne plus voir les Neptunes ou la simple présence de Pharell sur un de ses albums. Ne vous fiez pas à son rythme lent, le morceau sent la rue à plein nez. Snoop vous invite a représenter votre quartier avec fierté comme il lui l'a toujours fait avec le sien. Un des meilleurs morceaux de l'album.

Deez Hollywood Nights
Dans un délire sonore à la Jackson 5, Snoop parle avec humour de ses folles nuits hollywoodiennes. Morceau qui devient vite soûlant et qui m'a pas plus emballé que ça.

Whateva U Do:
Un peu de mal à la cerner cette track. La production futuriste de Khao est pas mal et on se laisse porter par le message de Snoop Dogg, même si ce qu'il raconte n'est pas vraiment intéressant.

Staxxx In My Jeans:
On repasse (enfin) à du lourd! Rick Rock était le seul à pouvoir sortir un son de cette envergure. On a affaire à une sorte de version Hyphy de la bande originale du film Saw.

Been Around Tha World:
Conçu par lui même sous son blaze Niggaracci et aidé par Terrace Martin, le côté lover et romantique du Dogg revient sur le devant de ce morceau.

Let It Out:
Un air oriental ce dégage ici histoire de planer à ses vantardises sous les effets de la weed.

My Medecine:
Snoop Dogg qui fait un morceau country on aurait jamais pu y croire... Sur cet exercice de style totalement inédit et rendant hommage au célèbre Johnny Cash, le résultat est plutôt satisfaisant. Servi par Everlast, la fumette est le sujet de conversation prépondérant.

Ridin' In My Chevy:
Une piste bien vénère pour les sideshows, les rides sauvages... rien d'autre à ajouter.

Those Gurlz:
Attention! Combinaison de luxe Teddy Riley/DJ Quik sur cette chanson. Résultat soulful et harmonieux à souhait, la tchatche de Snoop Dogg assure le reste.

One Chance (Make It Good):
Encore plus forte que la précédente, le charme de cette chanson se réalise grâce au terrible sample de Prince Phillip Mitchell utilisé par Frequency. Encore un morceau romantique, le genre qui lui va comme un gant même si son côté pimp en prend un coup.

Why Did You Leave Me:
Non ce n'est pas encore Akon sur ce son, ouf! M'enfin si ce n'est pas une imitation ça doit être son frère jumeau car Chilly Chill à la même voix de canard. Produit par Polow Da Don encore une mielleuse track R&bisée peu envoûtante.

Can't Say Goodbye:
Le Gap Band est dans la place, Charlie Wilson se charge une fois de plus de jouer le refrain. La ressemblance avec un certain "Change" de Tupac mérite d'être mentionné, le même style de morceau nostalgique et sincère dans lequel Snoop raconte gros qu'il n'est pas prêt d'oublier d'où il vient, son ghetto, ses amis,...


Chaque album de Snoop Dogg décrit une évolution artistique et le franchissement d'une étape dans sa carrière, mais Ego Trippin' marque définitivement une progression nette allant bien au-delà du carcan rap habituel. La première écoute est déroutante, les suivantes permettent au fur et à mesure de rentrer dans son délire perso, puisque c'est le sujet de cet album. En moyennant l'avis de Bobby et le mien, mis à part des divergences tout à fait négligeables, nous somme d'accord sur le fait que l'innovation est le point fort de ce 9e album d'un Snoop ni gangsta, ni pimp, celui d'un genre nouveau. Teddy Riley et DJ Quik ont tous deux été exemplaires à la réalisation d'Ego Trippin', en créant une sorte d'hybride ultramoderne et vintage à la fois entre rap et p-funk, avec un coup de country par-ci, des morceaux Hyphy par-là... Les refractaires qui n'apprécient pas ce Snoop Dogg funky n'ont qu'à se réécouter ses anciens disques.
Bobby_Milk
6
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le 21 déc. 2011

Critique lue 400 fois

2 j'aime

Bobby_Milk

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