Succès mérité.

Arrêtez avec l'hypocrisie des chiffres. Les bons scores au Billboard n'a de sens que quand vous le voulez bien. Nous devrions être heureux que le Hip-Hop soit un genre musical qui s'en sort plutôt bien avec le mélange entre le mainstream et une relative qualité.

Combinez le rap grand public le plus intéressant de ces dernières années avec des rythmes rap rétro et un flux croustillant et cela donne l'un des meilleurs albums que 2020 a à offrir.
"Good News" de Megan Thee Stallion offre une expérience amusante ultime tout en montrant une capacité de créer un album pertinent. Oui, Oui.

L'année dernière, la mixtape "Fever" était une vraie réussite et portait parfaitement son nom. Et Megan s'est fait remarquer avec des collaborations stellaires. Plus particulièrement celui avec Beyoncé sur son morceau "Savage" (qui se retrouve dans l'album) et "WAP" qui est devenu viral et surtout lui a offert la première place du Billboard top 100 avec sa pote Cardi B.

Dans "Good News", Megan essaie de répandre la positivité dans une année qui a été si sombre qu'elle avait besoin d'un remontant. Cependant, cela ne signifie pas qu'elle évite les sujets importants. Dans "Shots Fired", avec l'échantillon de "Who Shot Ya?" de Notorious BIG, elle fait allusion à l'incident avec Tory Lanez en ridiculisant le personnage qui lui a tiré dessus (sans jamais le nommer) et ceux qui ont pris son parti.
D'autres échantillons semblent pointés de leur intention. Le piano électrique sur Outside vient de Something in My Heart de Michel'le, l'auteur-compositeur-interprète de R&B qui a enduré une relation physiquement abusive (surtout très agressive) avec Dr Dre. parmi beaucoup d'agressions, lui aussi, lui a tiré dessus. Mais que voulez-vous? L'indignation populaire est à géométrie variable dans ce bas monde. Certains ne se retrouverons jamais dans le questionnement de la séparation de l'homme et de l'artiste, allez savoir pourquoi... Bref...
Tiens, ça me permet d'ajouter aussi que cette année, elle a lancé le Fonds de bourses d'études "Don't Stop" pour les femmes noires et a écrit un éditorial pour le New York Times intitulé "Pourquoi je parle pour les femmes noires".
Mais à part "Outside" et le morceau d'ouverture, sur "Good News", elle continue de se concentrer sur le plaisir et est toujours une fière déclaration sur la féminité. Son érotisme est devenu plus dur et plus direct (en particulier sur "Body" et le single "Don't Stop" avec Young Thug), et elle a abandonné les expériences de "Suga" avec le R&B pour une approche hip-hop plus traditionnelle.
Son contenu met également en lumière une chose fondamentale qui a souvent été noyée par le brouhaha de la controverse et des discussions sur les réseaux sociaux: elle est réellement très forte dans ce qu'elle fait. Megan Thee Stallion est une rappeuse historiquement douée avec son flow croustillant et percutant, ses paroles grouillantes d'images sexuelles pointues et humoristiques.
Comme cela a été clairement prouvé sur "WAP", Meg ne peut pas être éclipsée, quel que soit le talent de sa co-star. Ici, cela est d'autant plus clair que les liens avec Big Sean, Young Thug et Popcaan voient le flux de l'artiste principal dépasser celui de ses co-stars. Même sur "Freaky Girls" avec SZA, voyez Meg s'imposer. Toujours solide, la position de Meg en tant que guerrière féminine du stéréotype du rappeur masculin ne faiblit jamais, garantissant que ses paroles incisives sur le sexe, l'argent et la justice sociale l'emportent. "Don't fuck me like that, fuck me like this", note-t-elle en aparté sur "'Cry Baby", une ligne qui montre la main qu'elle joue encore et encore.
Meg explore de nombreuses nuances de musique populaire à travers les 50 minutes de Good News, du dancehall sur "Intercourse" à la pop des années 90 et même à la disco sur "Don't Rock Me To Sleep". À chaque moment, Meg maintient le rythme.

Aussi Mainstream que "Good News" puissent paraître, Megan rend plus hommage à ses ancêtres qu'on ne le pense. Avec les échantillons cités au-dessus, de Notorious Big et Michel'le, on peut ajouter que "Girls in the Hood" retravaille Boyz-n-the-Hood d'Eazy-E. La prod de Juicy J sur "Freaky Girls" est carrément enracinée dans le G-funk du début des années 90, et "Go Crazy" incorpore un clin d'œil à "OPP" de Naughty By Nature.
C'est pour moi, jeune quadra, à souligner, à remercier même. Car on s'éloigne ici du penchant des rappeurs SoundCloud amorcé depuis quelques années de rejeter le passé historique du hip-hop pour le réinventer. Ce qui n'a pas toujours été une réussite.

Les 17 chansons offrent 50 minutes de soleil et de plaisir. Écouter l'intégralité de l'album sans sourire est tout simplement impossible. Par conséquent, Megan Thee Stallion excelle dans ce qu'elle entreprend de faire, non seulement pour rendre ses fans heureux, mais aussi pour créer un battage médiatique si bien mérité qu'il est difficile aujourd'hui de nier son talent.

7,5/10