The Bagatelles Vol.5 – Kris Davis Quartet


Cet album se situe dans second coffret des Bagatelles qui contient encore trois autres albums. Kris Davis est pianiste, elle aussi est partie en tournée pour rôder son quartet, entre deux mille quinze et deux mille dix-neuf, donnant des concerts et des représentations ici ou là. A ses côtés il y a Mary Halvorson que l’on retrouve à la guitare, Drew Gress à la basse et Kenny Wollesen que nous connaissons bien maintenant, à la batterie.


Kris a arrangé les thèmes de Zorn et a organisé les solos dans les compos, elle est assez Monkienne dans son approche, elle désarticule et détourne avec talent, toujours en mouvement, vive et précise, mais, il faut bien le reconnaître, Mary Halvorson est ici la principale attraction.


Sans doute moins identifiable que dans ses propres albums elle utilise tout de même les déformations du son avec pas mal de reverb, comme elle aime, chacune de ses interventions retient immédiatement l’attention, elle attire la lumière comme une star...


Côté rythmique c’est extrêmement solide avec deux géants de leur instrument, l’assise est ainsi très jazz, et l’auditeur ne risque pas de perdre ses repères. La bagatelle#88 est une ballade que Kriss a particulièrement travaillée, on y entend une magnifique Mary Halvorson !


Ce second coffret est construit autour du monde des claviers…

***


The Bagatelles Vol.6 – Brian Marsella Trio


Voici un trio piano, basse, batterie des plus classiques avec Brian Marsella dans le rôle du pianiste, Trevor Dunn dans celui du bassiste et Kenny Wollesen dans celui du batteur. Un trio avec des pointures à chaque poste, John Zorn ne va pas dans l’inconnu, deux sont des familiers et surtout ces trois-là ont enregistré le volume trente et un du Book of Angels, et quand il est satisfait il aime faire appel aux formations dont il est le plus admiratif.


Brian Marsella est également membre de Banquet of the Spirits et de Zion 80, et les deux autres sont des historiques, mais parlons plutôt de cet album vraiment magnifique, ce petit joyau miraculeux, on ne sait quelle bagatelle admirer le plus, la cent dix-neuf qui ouvre l’album ? La quarante et une qui ménage un réel suspens ? La deux cent soixante-quatorze vive et sautillante ? La cent cinquante-trois plus atonale qui frétille comme du Cecil Taylor ? Ou encore la deux cent quatre-vingt-huit qui est si belle et magique, une ballade à deux faces, qui avance en serrant le cœur…


On ne sait de quel côté tourner la tête, on admire la vivacité du trio, sa facilité à pénétrer dans l’univers de Zorn, sa capacité à improviser et à défricher des territoires à conquérir, la finesse d’interprétation qui élève ces « petites choses » au rang d’œuvre d’art.


***


The Bagatelles Vol.7 – Brian Marsella


Et voici à nouveau Brian Marsella, mais cette fois-ci en solo, de quoi appréhender le musicien sous un angle nouveau. Incontestablement il est doué, et même très, dans la case virtuose, sans discussion, d’ailleurs ils s’y bousculent les virtuoses, dans la case, que c’en est désolant…


Ce qui le différencie un peu c’est qu’il n’est à sa place nulle part, pas trop à l’aise dans les réseaux jazz où son toucher est jugé un peu trop formaté par l’éducation classique, ni mieux perçu dans le monde de la musique « savante » où il apparaît saugrenu et débridé, presque sauvage… Bon je rigole, mais il y a de ça…


Du coup il est bien chez Zorn où se réfugient les déglingués et les inouïs, les affreux et les mécréants, et même les surdoués un peu foufous. Prenez la « Bagatelle #292 », toute mignonne et toute simplette, sous les doigts de Brian elle prend la forme d’une comptine montée en œuvre d’art, la simplicité apparente d’une sublime bagatelle, de quoi en énerver plus d’un !


Et la « Bagatelle#289 », elle avance vive et joyeuse comme extraite d’un dessin animé, pourtant des accords graves la soutiennent, comme pour lui donner un côté sérieux ! Et la « Bagatelle#238 » dépouillée et simplette, presque nue, ingénue, qui s’enroule et se déplie, toute mignonne autour d’un thème qui déploie ses jolies variations, sur un rythme badin et répétitif.


Que dire de Brian Marsella, sinon que Zorn ne s’est évidemment pas trompé sur ce musicien, tellement à l’aise ici qu’il exploite chaque bagatelle de façon à la fois personnelle et futée, avec une grande finesse et beaucoup de sensibilité, chacune d’elle possède son charme et son identité, de quoi passer un merveilleux moment à leur écoute…


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Bagatelles Vol. 8 : John Medeski Trio


A l’origine les Bagatelles sont un pensum de trois cents morceaux dans lesquels les musiciens invités par le maître peuvent puiser pour en donner leur interprétation, tout en conservant leur style et leur personnalité, ce qui donne des versions extraordinairement différentes et des albums aux identités très variées, à l’image de la série des Book of Angels qui contenait, elle, trente-deux volumes.


Les bagatelles se présentent comme de petits coffrets contenant quatre Cds assez onéreux, il faut dire que John Zorn a besoin de remplir les caisses à la suite de la déconvenue des « Book’s Beriah » où il s’est fait escroquer, ayant placé sa confiance dans un distributeur véreux.


On se souvient qu’il avait été question précédemment du premier coffret de la série des « Bagatelles » de John Zorn au travers du « Mary Halvorson Quartet » qui en était le premier épisode et dont j’avais parlé ici. Il précédait « Erik Friedlander And Michael Nicolas », le volume deux, puis « Trigger » le volume trois et « Ikue Mori » qui fermait le premier essai.


Voici donc venir le second coffret des « Bagatelles », les volumes de cinq à huit avec le Kris Davis quartet pour l’épisode cinq, Brian Marsella Trio pour le six, Brian Marsella au piano solo pour le sept et le John Medeski Trio pour le volume huit. C’est de ce dernier dont je vais plus particulièrement parler.


Les Cds sont assez chics avec des éléments en relief sur la couverture, une protection autour du Cd, celui-ci est formé de trois volets assez rigides, photo et texte signé du musicien vedette, ici l’organiste John Medeski, accompagné par le guitariste David Fiuczynski et du batteur G. Calvin Weston. Je ne connais pas ces deux derniers musiciens mais on peut faire confiance à John Zorn, ils sont à la hauteur.


Ici l’atmosphère est assez électrique, voire rock, on connaît John Medeski et son jeu ample et puissant qu’il aime déployer sans limite. Il s’est essayé à l’exploration de ces pièces lors du « John Zorn Bagatelles Marathon » tournée qu’il a effectué au travers de l’Europe, en bonne compagnie.


Ça frôle parfois le métal ici, sinon dans l’esprit du moins dans la forme, comme sur Bagatelle # 157 qui ferme l’album de façon grandiose, mais rien d’uniforme ici, sinon la formule de départ. John Medeski est un monstre de l’instrument, une sorte d’ogre de l’orgue dont il est un expert unanimement salué, la démonstration ici est d’ampleur.


Elle se rockifie au son de la guitare électrique de David Fiuczynski qui strie l’espace et riff volontiers. Calvin Weston est également très carré dans son accompagnement assurant une assise solide et puissante aux envolées de ses compères.


Un album à la destinée assez simple et volontiers grand public, pour peu qu’on aime le son de l’orgue, bien sûr…

xeres
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le 3 août 2023

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