La pochette du premier album des Residents est une parodie de l'album "Meet the Beatles !" plutôt réussie, mais quel rapport existe-t'il entre les deux groupes ? D'un côté un supergroupe représentant de la culture pop, de l'autre un groupe totalement inconnu s'inscrivant dans la contre-culture ... leur exacte antithèse donc ... et objectif atteint.


A noter que la pochette fût censurée par EMI et Capitol records. Toutefois, c'est l'image figurant au verso où étaient mentionnés les noms de John & George Crawfish, Paul McCrawfish et Ringo Starfish avec des images de crustacés habillés des costumes des Beatles, qui sera utilisée comme couverture. Finalement ce qu'il faut retenir c'est le soin qu'ils apportent à la présentation de leur album : https://assets.catawiki.nl/assets/2015/10/1/4/9/5/495d9afa-6842-11e5-94a1-5d59e2eb25cf.jpg.


Le contenu, lui est également unique pour l'époque : mélange de jazz, blues, opéra, musique classique, mais interprétée de manière délibérément amateur ... on retrouve la base de leur musique qu'ils avaient entamé avec Santa Dog, dans le même esprit, en plus élaboré, mais également plus brut, plus râpeux que ce qu'ils produiront par la suite.


L'album commence par un medley, les six premières chansons s'enchaînant pour former une sorte de suite composée de mélodies au piano déglingué, de paroles dadaïstes, de rythmes étranges aux percussions et de voix bizarres. L'intro musicale commencant par une déconstruction d'une citation de la chanson "These Boots Are Made For Walkin'" de Lee Hazlewood et se terminant par le morceau emblématique "Smelly Tongues". On retrouve des personnages imaginaires aux vocalises, des voix ridicules, de l'arythmie, des perturbations rythmiques, des entrechocs harmoniques, des convulsions mélodiques, signatures du groupe.


Le morceau suivant "Rest Aria" a une atmosphère complètement différente, sorte de cabaret japonisant surréaliste ... la face A se terminant sur le morceau désarticulé "Skratz".


La seconde face est composée de morceaux essentiellement instrumentaux à base de percussions construisant une musique de plus en plus chaotique. On assiste ainsi à un travail sur les voix décalé et ironique (Spotted Pinto Bean), un morceau rappelant Captain Beefheart, mais se mettant au funk (Infant Tango) et surtout leur premier hymne de pop destructurée (N-Er-Gee).


L'on a déjà en germe des oeuvres futures, comme "Duck Stab" (1978) par le travail sur les voix, "Commercial Album" (1980), de par les morceaux courts qui jonchent le vinyl, "Freak Show" (1991) par l'aspect cabaret d'un piano capricieux.


Sans aucun potentiel commercial, dans le plus pur esprit Dada, en dehors des sentiers battus par le business, l'album sera un bide commercial, ne trouvant que 50 acquéreurs. Mais encore aujourd'hui, comme à l'époque, vous êtes confus à la première écoute, mais progressivement vous adhérez au contenu.


Symboliquement, l'album clôture le rock des seventies pour s'ouvrir sur la musique alternative des années 80.


S'il fallait donner des qualificatifs pour définir leur musique je dirais : Transgressif - Obsédant - Radical - Mystérieux - Iconoclaste - Parodique - Expérimental - Etrange - Inquiétant - Chaotique - Dissonant - Déjanté.


Vous voilà averti.

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le 13 juin 2021

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PiotrAakoun

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