Meliora
7.3
Meliora

Album de Ghost (2015)

Cliché parmi les clichés, celui qui consiste à dire que la Suède, la Finlande et autre Norvège est un vivier de groupes de metal satanistes qui boivent du sang, brulent des églises et prient l’ange déchu lors de diaboliques messes noires a la peau dure. Pourtant c’est bien de Suède que vient Ghost et ce sont bien des odes à Lucifer qui composent la majorité de leurs textes. Le groupe encore tout jeune – c’est en 2008 que Ghost voit le jour – ne cesse de progresser dans les charts français atteignant la 17ème place la semaine de la sortie fin aout de Meliora, leur 3ème album, belle performance pour des metalleux accumulant les stéréotypes. Intrépide lecteur vous l’aurez compris, c’est de metal et plus précisément de doom metal que l’on va parler alors accrochez-vous !


Du doom metal ? Mais qu’est-ce donc ? Le doom est un style qui a vu le jour à rebours du metal ultra-rapide en vogue dans les années 1980 – le thrash – dont des groupes tels que Slayer ou Megadeth s’en sont fait les chantres. Le doom se caractérise donc par des sonorités plus lourdes, plus épaisses et surtout plus lentes que celle du metal « classique ». Meliora ne déroge pas à la règle : les guitares saturées, très saturées, la lenteur relative des riffs et l’utilisation d’orgue sur plusieurs morceaux contribuent à rendre l’atmosphère de l’album pesante à souhait. Tout ceci ne peut qu’être renforcé par l’imagerie qu’utilise les membres du groupe : le satanisme.


Resté dans l’anonymat le plus total, le groupe se présente comme une communauté ecclésiastique vénérant Satan où les cinq musiciens représentant les fidèles – les Ghouls – tout de noir vêtus et cachés sous des masques vénitiens sont menés par leur antipape en chasuble ornée de croix inversés, le chanteur. De même les paroles sont assez explicites à ce niveau-là : « A fallen angel in His lair, In midst of sinners kneeling down before his clout » (Majesty). Il s’agit donc d’un groupe reprenant tous les codes visuels du black metal, un des styles les plus extrêmes du genre, les sonorités du doom et qui semble ouvertement sataniste, mais pourquoi avoir choisi ce titre ? Où est la pop dans tout ça ? Elle arrive. L’ambiance lourde et malsaine que Ghost arrive à créer dans Meliora est contrebalancée avec malice par un chant mélodique et claire, véritable échappatoire de l’album. Papa Emeritus III, le chanteur, insuffle ainsi un vent épique à From the Pinnacle to the pit, des sonorités dignes du hard rock des années 1970 dans Absolution, tandis que He Is sonne comme une balade pop avant d’être rattrapée par les guitares distordues. Ces petites bribes de pop se baladent un peu partout dans l’album avant d’atteindre leur apogée dans Deus In Absentia, dernière chanson de Meliora où les claviers se font plus bruyants que les guitares.


Cette pop, tant décriée par des inconditionnels du chant guttural, en total contradiction avec l’esthétique du groupe, permet aux six trublions d’accoucher de l’un des albums les plus originaux de ces dernières années. En prenant à rebours les poncifs du metal, le groupe représente pourtant toute l’essence du genre: comment être plus anticonformiste qu’en retournant les codes (clichés ?) d’une musique anticonformiste ?

Créée

le 19 mars 2016

Critique lue 182 fois

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