La santé, le plus grand combat d'une vie ?

Aux premières notes de son album, le rappeur de Montreuil «Prince Waly» nous plonge sans filtre dans son intimité sensible et sombre. Artiste qui auparavant avait conclut des projets plus «légers» que ce premier album «Moussa» qui est selon moi une grande réussite. En effet, dès le premier titre Prince Waly accorde une importance particulière à l'ambiance de ce projet en évoquant ces deux frères et leurs destins difficiles sûrement liés à la rue. L'un d'eux aujourd'hui est handicapé moteur alors que son deuxième frère est décédé. Au premier titre les filtres personnels disparaissent pour laisser place à une liberté artistique où le rappeur confie pleinement sa vie actuelle. Une évolution musicale que l'on voit tout au long de son projet à travers divers titres évocateurs. Ce premier titre met directement les «pieds dans le bain» avec ce flow sincère et vif accompagné de la collaboration de «Feu Chatterton» apportant une touche très mélodique au morceau. Collaboration ayant déjà fait des merveilles lors de son projet précédent «BOY Z».

Une sincérité de l'artiste qui sera véritable fil conducteur de ce projet sur toute la tracklist. Il y évoque par exemple son rapport à la rue et au deal. Au recul qu'il a prit sur ces démons qui l'ont longtemps impacté afin de combler ses besoins financiers comme c'est le cas dans le morceau «Walygator». Il y évoque d'abords les causes du basculement dans l'argent «sale» pour prendre le recul et la maturité propre à ce projet en y évoquant à la suite les conséquences néfastes qui en découlent. Toutefois, certains codes qu'ils soient positifs ou non de la rue restent, d'où l'importance d'un featuring avec Freeze Corleone. «Freeze» artiste pilier de ces deux dernières années, au profil artistique très sombre mais ayant un univers unique et intrigant. Un featuring qui est d'une maîtrise bluffante donnant un véritable élan à l'album. Prince Waly s'appuie aussi sur «Ali» ancien membre du célèbre groupe «Lunatic». Qui lui aussi a pris un grand recul similaire au fil des années, comme c'est le cas actuellement du «Prince» pour faire une autre très bonne collaboration dans cet album, tout en gardant cette sincérité assumée comme fil conducteur.

Car il est là le vrai intérêt d'écouter cet album, la sincérité qui découle des paroles de l'artiste. Une sincérité de plus en plus intime qui s’accroît avec le morceau «Cra$h» en collaboration avec «Jazzy Bazz» et «Enchantée Julia». Premier morceau où il fait plus clairement référence au cancer qu'il a dû affronter et qu'il affrontait encore en écrivant cet album. Une référence basée sur un parallèle avec les accidents de voitures qui sont pour beaucoup soudains et inattendus comme ce fut le cas pour Prince Waly à l'annonce de son cancer.

C'est sur la fin de la tracklist que les confidences de l'artiste seront les plus fortes. Réalisant une bascule encore plus intense avec le morceau «Broke» où la recherche perpétuelle de quitter la pauvreté connut plus jeune pour atteindre une meilleure vie, finira par se retourner contre lui le mettant en grande difficulté. Ces problèmes de santé vont venir ternir sa carrière poursuivant ce doute évoqué dans le titre «J'ai réduit mon espérance de vie, monsieur l'agent. J'ai bousillé ma santé pour de l'argent. Et même le pognon ne pourra pas soigner mes blessures. J'ai étonné, j'ai impressionné, j'ai déçu». Un doute qui est aussi par la suite artistique et qui est accentué par ses problèmes de santé car Prince Waly avait réalisée une très grande percée dans sa carrière à ses débuts. Je sais que personnellement j'ai saigné ses deux premiers projets.

Les deux derniers titres de l'album iront toujours plus loin dans ce recul. Le titre «Miroir» évoquera son cancer de manière franche et distincte ainsi que les regrets qui découlent de tout les excès qui auraient pu causer celui ci selon l'artiste. Le choix du nom de ce titre est logique car il ne se reconnaissait plus devant son miroir pendant l'effet de la maladie . Il ne se reconnaît sûrement plus aujourd'hui devant ce même miroir comme quand il dit «j'ai les cicatrices sur le torse». Cette franchise est artistiquement folle et débouche sur de véritables réflexions comme quand il dit «Soigner le mal par le mal aujourd'hui j'en paie les sentences» juste avant d'évoquer ces mêmes cicatrices. Le dernier morceau «Mercy» vient mettre un point d'honneur à cet album évoquant l'annonce de la nouvelle (en plein arrêt de prod) de son cancer jusqu'à son combat qui est un véritable «marathon». Un marathon qui n'est pas encore terminé mais qui est en bon chemin, un combat perpétuel qui débouchera sur ce magnifique album. Album qui m'a le plus marqué en cette année 2022. Album à la grande démarche artistique montrant un véritable choix et une grande maturité de Prince Waly.