Une simple galéjade. Voilà ce qu'était le projet Porcupine Tree à ses débuts. En 1987, déjà occupé avec le relatif succès de No-Man, le jeune informaticien Steven Wilson décide de créer un groupe imaginaire en association avec son ami Malcom Stocks. Adorateurs de légendes progressives telles que Pink Floyd ou Yes, ils se lancent dans l'élaboration d'un concept-groupe inspiré de leurs idoles, lui inventant un passé à la fois historique et discographique. D'après ces affabulations, Porcupine Tree serait un obscur duo de personnalités hors du commun, Sir Tarquin Underspoon et Timothy Tadpole-Jones, qui aurait participé à certains grands évènements musicaux lors de la décennie précédente, comme un concert mémorable lors d'un festival reconnu. Pour rendre sa supercherie tangible, Wilson comprend rapidement qu'il doit concevoir de vrais morceaux comme preuves à conserver dans l'esprit déjanté de l'historique du groupe nouvellement créé. Ayant déambulé dans sa jeunesse au sein du milieu néo-prog anglais, il utilise sa connaissance du domaine et ses nombreuses influences psychédéliques et psytrance pour réaliser une cassette intitulée Tarquin's Seaweed Farm. Considérant ces démos suffisament réussies pour être commercialisées, il les envoie à divers magazines spécialisés du monde underground de l'époque. Richard Allen, journaliste au magazine Encyclopedia Psychedelica, responsable du fanzine Freakbeat sur le point de créer son propre label, voit dans ces maquettes une matière nouvelle à travailler. Il propose donc au groupe (alors composé uniquement de Wilson, Stocks ayant abandonné le projet) de participer à un compilation psychédélique avec d'autres formations alternatives. Wilson profite du renouvellement financier en découlant pour produire un nouvel album, qu'il intitulera the Nostalgia Factory. Conquis, le label de Richard Allen, dès lors nommé Delerium, signe son premier artiste : le projet potache devient réalité, Porcupine Tree est désormais plus qu'une simple blague entre amis. L'album On The Sunday Of Life, compilation des deux cassettes Tarquin's Seaweed Farm et the Nostalgia Factory, sort en 1991, pressé à uniquement mille copies.

A cette époque, Porcupine Tree n'est qu'un projet solo : Wilson se voit responsable la totalité du travail de composition de la complitation. N'ayant aucune connaissance technique de la batterie, il a recours à la fameuse boîte à rythme, si employée dans les milieux new-wave des années 80. Il s'agit ici d'un des principaux défauts de ce premier effort : l'absence de batterie se fait cruellement ressentir, créant un vide ôtant toute consistance à la plupart des compositions. En pleine euphorie de création psychédélique, Wilson oublie (ou ignore) que les plus grandes réussites du genre sont redevables à d'immenses parties de batterie. Ozric Tentacles par exemple, dont il s'inspire avec évidence, possède en Marvin Pepler un excellent ambianceur, collant directement avec l'atmosphère spatiale du groupe psychédélico-progressif. La batterie fait farouchement défaut à la production de Wilson, déjà très moyenne dans son ensemble. La boîte à rythme ruine parfois des morceaux au potentiel indéniable : "Jupiter Island" et son chant habité sont immédiatement accrocheurs mais se révèlent vite exempts de tout relief marquant. L'ambiance psychédélique ne prend pas et la boîte à rythme a pour unique don de rendre le tout très amateur. L'autre défaut primordial de la compilation réside dans sa durée excessive qui, sans être rentabilisée par quelques compositions mémorables, ne permet pas son écoute d'une traite. Quelques morceaux se détachent de l'ensemble ("Footprints", "Radioactive Toy"), mais les trop nombreuses interludes instrumentales inintéressantes ne peuvent empêcher l'auditeur de tomber dans l'ennui le plus profond assez rapidement. On The Sunday Of Life est un premier essai tâtonnant et peu consistant, finalement assez mauvais. Nous retiendrons tout de même "Radioactive Toy", la nette préfiguration de ce que sera Porcupine Tree dans sa période Signify / Coma Divine.
BenoitBayl
4
Écrit par

Créée

le 3 oct. 2013

Critique lue 421 fois

3 j'aime

Benoit Baylé

Écrit par

Critique lue 421 fois

3

D'autres avis sur On the Sunday of Life…

On the Sunday of Life…
GuillaumeL666
6

Comme un dimanche

Après avoir été conquis par In Absentia, j'ai enfin trouvé la motivation pour explorer la discographie de la bande à Steven Wilson, et dans l'ordre tant qu'à faire. Je ne suis pas vraiment déçu, ce...

le 2 juil. 2021

On the Sunday of Life…
Maxou140
6

Musique de drogué

Ce premier album officiel de Steven Wilson - sous le pseudonyme de Porcupine Tree - compilant certains titres des cassettes audio Tarquin's Seaweed Farm et The Nostalgia Factory - est assez inégal...

le 10 nov. 2016

On the Sunday of Life…
Silvergm
7

Pantalonnade musicale

Fondé en 1987 par Steven Wilson et Malcolm Stocks, Porcupine Tree est à l'origine une pantalonnade musicale, une sorte d'hommage mythomane aux seventies. Les deux amis inventent de toutes pièces ce...

le 20 mai 2021

Du même critique

First Utterance
BenoitBayl
9

Critique de First Utterance par Benoit Baylé

Souvent de pair, les amateurs de rock progressif et de mythologie connaissent bien Comus. A ne pas confondre avec son père, Dionysos, divinité des intoxications liquides et autres joies éphémères, ou...

le 9 déc. 2013

23 j'aime

Alice in Chains
BenoitBayl
9

Critique de Alice in Chains par Benoit Baylé

La révélation mélancolique Il y a maintenant 5 ans, alors que ma vie se partageait entre une stérile végétation quotidienne et une passion tout aussi inutile pour le basket-ball, je découvris la...

le 9 déc. 2013

22 j'aime

2

Kobaïa
BenoitBayl
8

Critique de Kobaïa par Benoit Baylé

A l'heure où la sphère journalistique spécialisée pleure la disparition pourtant prévisible de Noir Désir, espère la reformation du messie saugrenu Téléphone et déifie les nubiles BB Brunes, les...

le 5 déc. 2013

15 j'aime

1