C’est vraiment triste de grandir. Alors que tu avais passé toute ta jeunesse à ne pas te soucier de grand chose, puis remis à demain ce qui était à faire pour hier lors de ton adolescence, voilà d’un seul coup que s’abattent sur toi responsabilités, horaires, deadlines et hiérarchie.


Heureusement pour le petit morceau d'âme d’enfant qui sommeillait encore en toi, il restait Animal Collective : le collectif américain te permettait d’échapper à la routine, te rappelait l’insouciance de ces longues après-midi d’été à t’écorcher les genoux, te donnait envie de te présenter à des entretiens d’embauche en uniforme scout, ou de transformer ta vie en film de Wes Anderson. Animal Collective c’était ta jeunesse idéalisée, mais avec plus de LSD.


Malheureusement, l’écoute de Painting With risque bien de te sortir de cette rêverie, tant le groupe semble avoir complètement perdu de vue cette insouciance pour proposer quelque chose de terriblement formaté et caricatural. Et ce tout simplement parce que AnCo a décidé de faire de la pop alors qu’ils en sont malheureusement incapables, comme peut en témoigner le dernier Panda Bear. On assiste donc à une succession de gimmicks, qui s’ils peuvent tenir sur un morceau, deviennent horriblement agaçants au bout de 40 minutes de pop faussement expérimentale. Car si l’idée des deux voix s’entrelaçant était agréable sur "Floridada", le fait de devoir les supporter sur douze morceaux l’est nettement moins, surtout vu la qualité des refrains.


Pire encore, on s’interroge alors ce qui est arrivé à la capacité du groupe à provoquer l’émotion et à susciter la nostalgie : tout apparaît ici faussement naïf, cynique même parfois tant l’exubérance a l’air forcée, à l’image d’un "Vertical" absolument atroce. On en vient même à la fin de l’écoute à se demander si on ne s’est pas laissé abuser pendant toutes ses années : et si Animal Collective n’était qu’un groupe faussement original cachant une absence de talent derrière beaucoup d’artifices ? En l’attente d’une réponse définitive, on ne peut pour l’instant qu’être écœuré par ce Painting With et avoir l’impression que la génération Pitchfork s’est un peu fait avoir par les Américains. Oui vraiment, c’est triste de grandir.


Critique initialement publiée sur Goûte Mes Disques

Gweilo
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste I Am Made of Endless Hours

Créée

le 30 mars 2016

Critique lue 309 fois

4 j'aime

3 commentaires

Gweilo

Écrit par

Critique lue 309 fois

4
3

D'autres avis sur Painting With

Painting With
ArthurDebussy
6

Grosse fatigue...

La première écoute de Painting With déroute. Le son est dur, aride, et plein de bruits intempestifs gâchent le plaisir auditif. On les entend beaucoup, et même beaucoup trop : et pour cause, le «...

le 19 févr. 2016

4 j'aime

Painting With
Gweilo
4

Un genou à terre

C’est vraiment triste de grandir. Alors que tu avais passé toute ta jeunesse à ne pas te soucier de grand chose, puis remis à demain ce qui était à faire pour hier lors de ton adolescence, voilà d’un...

le 30 mars 2016

4 j'aime

3

Painting With
Heard
6

Il n'est pas encore temps de perdre espoir !

Grand fan du groupe, qui est pour moi l'un des plus importants des années 2000, je ne suis jusque-là descendu en dessous de 8 en note Sens Critique qu'à une seule occasion : pour Merriweather Post...

le 21 févr. 2016

2 j'aime

4

Du même critique

Harmony in Ultraviolet
Gweilo
10

Haunt Me, Haunt Me Do It Again

"Ce que j'essaye de vous traduire est plus mystérieux, s'enchevêtre aux racines même de l'être, à la source impalpable des sensations" Paul Cézanne Comment aborder un disque de Tim Hecker ? La...

le 20 juil. 2015

26 j'aime

1

Opus Eponymous
Gweilo
7

Satanisme en carton

Quand on parle de satanisme et de metal, on s’attend généralement à ce que soit évoqué le black metal ou le groupe de death metal Deicide, et non pas Ghost, groupe entre doom metal et hard rock. Et...

le 21 juil. 2014

25 j'aime

1

Symbolic
Gweilo
9

Seigneur Schuldiner

Chuck Schuldiner, on le savait, était un guitariste exceptionnel et un homme avec une vision très précise des choses, son groupe n'étant au final qu'une extension de lui-même, Chuck en étant le seul...

le 24 oct. 2014

23 j'aime

4