Sign of the Hammer
7.1
Sign of the Hammer

Album de Manowar (1984)

Dans une interview d’Enfer Magazine publiée en janvier 1985 et consacrée à MANOWAR, on peut lire l’extrait suivant :


« Enfer : Dans votre nom, MANOWAR, il y a le mot guerre. Qu’est-ce que représente exactement cette guerre ?


Joey DeMaio : Cette guerre, c’est pour atteindre le plus grand potentiel de toi-même. Si tu veux aller au sommet, c’est un combat. La plupart des gens sont contents d’aller à l’école, de trouver un boulot. Ils n’essaient pas de réussir quelque chose, d’atteindre un but, d’aller quelque part. Ils sont contents de ce qu’ils sont. Nous ne sommes pas satisfaits de ce que nous sommes, nous ne sommes satisfaits de rien. Nous voulons aller plus loin, ne pas nous limiter à quelque chose. Tout ce combat s’apparente à une guerre parce que c’est très dur de faire cela »


Voilà des paroles tout à fait intéressants issues d’une époque bénie où Joey pensait davantage à la musique qu’à son compte en banque. Je trouve ce propos resplendissant tant il révèle tout le potentiel que renferme la musique et particulièrement le Heavy Metal : l’émancipation par la création artistique.


La musique de MANOWAR est si belle car elle transpire cette farouche volonté de s’élever, de prolonger son individualité (dans le sens positif du terme) au-delà du carcan de nos mornes existences. S’arracher à la vacuité des choses par des riffs surpuissants, des soli exubérants, des rythmiques en acier trempé, des cris sauvages ("Animals"). Notre musique ne serait pas aussi puissante si elle n’était pas habitée de cet esprit de révolte, qu’il soit conscient ou non.


En cette glorieuse année 1984, Joey et sa bande sont parvenus à atteindre leur but. Avec "Sign Of The Hammer", MANOWAR s’est élevé là où personne n’a pu les côtoyer.


À ceux qui m’ont demandé ce que je recherchais dans le Metal, j’ai souvent répondu la « puissance », « l’intensité ». "Sign Of The Hammer" me paraît constituer l’œuvre la plus puissante de l’univers et l’intensité qui s’en dégage est si forte qu’elle arrache des larmes. Et tout cela avec une formation Rock traditionnelle et quelques chœurs. Le Heavy épique tire vraiment sa force de son minimalisme.


Prenez "Thor (The Powerhead)" : il y a là l'essence du groupe. Impossible de ne pas bomber le torse et serrer le poing en écoutant ce titre. Cette chevauchée épique sied parfaitement au dieu auquel elle est dédiée : riff simple et pourtant à se damner, refrain lumineux, chœurs tout droit venus d’Asgard et LE chant d’Eric à tomber par terre. Le tout s’achève dans un final apocalyptique qui n’est pas sans évoquer Ragnarok (« Gods , monsters and men will die in the end »). Peut-on faire mieux ?


Les arpèges cristallins de la 8-cordes zébrée résonnent alors. Le contraste de "Mountains" est saisissant mais harmonieux. Le calme après la tempête. Eric pose délicatement sa voix. Frissons. On s’élève avec lui, en paix avec soi-même jusqu’à ce refrain hallucinant qui nous plonge dans une transe explosive. Ce qui est magistral dans ce morceau, c’est la communion qu’atteignent la guitare et la basse au moment du solo. Les deux instruments se répondent mutuellement, gracieusement. Ross nous offre ici une superbe leçon de feeling tant chaque note est gorgée d’émotion. Nul besoin de technique ou de rapidité ici. Divin et inégalable.


Évidemment, nos quatre warriors nous gratifient de valeureux hymnes guerriers avec le titre éponyme, cavalcade triomphante aux paroles jouissives ou encore "The Oath", rouleau compresseur ou les soli de Ross explosent de partout. L’opener "All Men Play On Ten" est également excellent avec son groove irrésistible.


J’ai remarqué que tout le monde se moque de "Thunderpick". Pourtant, par-delà la technique certes mise en avant, il y a une musicalité certaine. En tout cas, cet interlude enchaîne parfaitement sur le morceau de MANOWAR qui m’a le plus bouleversé ; "Guyana" et sa ligne de basse légendaire. À la fois technique et poignante, cette intro est une des choses les plus originales qui m’aient été données de rencontrer dans le Heavy Metal. Et lorsque la frappe de Scott Colombus se met en branle, on est persuadé que l’on tient là quelque chose de grand. "Guyana" est empreint d’un mysticisme qu’on ne retrouvera plus vraiment chez le groupe, ce qui est sûrement dû à la tragédie qu’il évoque : le suicide collectif des membres de la secte du « Temple du Peuple » à Jonestown en 1978. Écoutez ces chœurs « gospéliens », ce sont les voix des victimes de Jim Jones qu’y s’élèvent en une ultime complainte.


Nul dithyrambe n’est trop fort pour décrire l’expérience que représente "Sign Of The Hammer". Ce n’est pas seulement un album qui s’écoute, c’est un album qui se vit. Rien que pour cette œuvre sublime, MANOWAR occupera à jamais une place spéciale dans mon « Heart of Steel »


Odin/10.

Pierre_Mauduit
10
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le 8 janv. 2017

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Thorwald 1921

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