SKINS
5.4
SKINS

Album de XXXTENTACION (2018)

Encore plus que par le passé, il va être difficile de défendre XXX avec cet album auprès du grand public et notamment les plus réfractaires à sa musique.


Sur "17" c'était encore assez abordable pour le non-initié, et sur son dernier album de son vivant "?" il y a avait une homogénéité, une diversité musicale.


SKINS est un album posthume avec tout ce que ça implique, manque d'aboutissement sur certains titres, une direction artistique un peu brouillonne, il est évident que l'album aurait été bien meilleur si l'artiste en question avait eu le temps de préparer le terrain pour sa sortie.


Et pourtant, malgré la délicatesse de sortir un projet aussi attendu que redouté, SKINS est un ovni du rap américain et gagne à être réécouter plusieurs fois.


SKINS commence avec une intro qui n'est pas vraiment une musique mais une simple voix robotique, c'est une invitation à rentrer dans l'esprit de XXXTentacion. Elle n'a pas de matière à être écouter comme une musique, c'est l'expression d'une émotion véhiculée par l'âme de XXX, comme il le dit lui-même... une âme en perdition.


Ensuite, le premier son de l'album commence Guardian Angel, cette musique sonne clairement comme une suite à "Jocelyn Flores". Sonorités similaires, voix monotones identiques mais un format différent et un rythme plus saccadé.


Train Food vient ensuite couper l'ambiance du précédent son avec une voix de XXX plus grave, plus engagée. Là c'est clairement un titre exprimant une certaine détresse de la part de l'artiste et un constat qu'il fait du monde qui l'entoure.
L'ambiance du son est accentuée grâce aux rires des passants et au bruit du train. C'est vraiment réussi je trouve, et même si ce n'est pas un son à mettre dans un repas de famille, ça reste une pierre intéressante qui vient se greffer à son édifice.


L'écoute se poursuit avec le titre Whoa (mind in awe), petit coup de cœur pour ma part. La mélodie est très entrainante, la voix de XXX est légère et se laisse emporter par l'instrumental. Sur ce titre assez long, XXX reste toutefois avare en paroles. C'est davantage une mélodie accompagnée d'une "chorale" dont se charge seul le défunt rappeur. Un titre qui amène donc une petite dose de lumière dans un univers musical sombre.


On continue avec le hit BAD!, dévoilé avant la sortie de SKINS, c'est clairement une réussite et les refrains chantés par XXX sont puissants.
Dans BAD!, le rappeur parle de lui-même, il se questionne comme il l'a souvent fait, et se demande si certains choix sont bons pour lui. XXX montre clairement qu'il est un homme comme un autre, vulnérable et détruit par une femme à qui il a donné une certaine confiance.
Ce n'est pas le son le plus "confessionnal" qu'il ai fait, mais ça reste une belle performance.


Vient ensuite STARING AT THE SKY, alors j'adore ce son. Première impression que j'ai ressenti a été un rejet du son, sûrement parce que je m'attendais pas à ce que la voix de XXX parte en feu.
Avec quelques notes de guitares et un petit refrain qui rentre facilement en tête, le son n'a pas besoin de se compliquer la tête pour nous faire ressentir le sentiment que XXX avait sur le moment.
C'est intrusif, peut-être déroutant pour les non-fans mais c'est tellement représentatif de l'univers du rappeur qui mélange de nombreux styles dans ses musiques, utilisant un style ou un autre en fonction de son humeur.


Et quoi de mieux que One Minute pour faire suite, Kanye West commence le morceau d'une voix décidée. C'est le seul featuring du projet, même si certains vont pester en se disant que Kanye s'est invité voire imposé sur le projet, nous sommes là avant tout pour juger la valeur musicale du son et donc, qu'est-ce que ça donne ? C'est de la folie !
Kanye pose un gros couplet, il débite efficacement et prépare le terrain avant que XXX ne vienne cracher toute sa rage dans le son. Un putain de featuring très tourné sur le rock, et quoi de mieux que d'avoir mis Kanye sur le son qui est un habitué du hip hop experimental et des croisements entre le rock/rap.


Puis, une petite interlude avec difference (interlude), à l'image de l'intro il n'y a pas beaucoup de matière pour analyser longuement la chose. C'est est un petit bout de quotidien de l'artiste qui prend la forme d'une interlude, XXX joue de la guitare avec une voix très suave.


Après ça on a I don't let go, un morceau lunaire à la fois technique et très mélodieux. Les gimmicks de XXX viennent appuyer la force de ses paroles, ses "AYEE" entre autres qui sont reconnaissables entre milles et qui feront esquisser un sourire aux fans. Ce n'est pas un titre très dense, on en fait vite le tour mais dans une playlist il peut parfaitement se placer et je l'écouterai toujours avec plaisir.


L'album se finit avec ce qui est sans doute le meilleur titre de SKINS, what are you so afraid of. Comme à son habitude, XXX ne va pas s'aventurer dans les profondeurs de la psychologie humaine, justement il la concrétise et la met "physiquement" en musique.
Il ne parle pas d'un homme à bout, il ne parle pas de suicide pour se victimiser. C'est un homme déçu qui, à chaque minute qui s'écoule, se demande si sa place est au bon endroit.
Personnellement c'est une musicalité qui me parle beaucoup, qui fait le constat d'une émotion que tout le monde peut ressentir à un moment donné et elle est là toute la puissance de son univers.
Certains jugeront son rap suicidaire, dépressif, mais au contraire c'est un rap pas commun qui dénote une sincérité de la part de XXX.
Il pourrait très bien parler de tout l'argent qu'il a amassé et du luxe dont tous les rappeurs peuvent profiter, mais à travers ses musiques il a essayé de se reconstruire et de faire partager ses difficultés. C'est surement ça qui avait rendu le lien avec ses fans très fort, très authentique.


En conclusion, SKINS est un projet que je trouve réussi, qui aurait pu être perfectionné évidemment. C'est très court, les musiques ne durent qu'une minute ou deux, on aurait aimé en avoir plus forcément.
SKINS nous fait passer par plusieurs émotions. De la rage avec du rock, de la détresse avec des mélodies mélancoliques. Et quelques fois des ambiances rythmées, très imagées, notamment grâce à des gimmicks et surtout la manière avec laquelle XXX joue avec sa voix.
Le rappeur se fait son propre jugement, son auto-critique. Il laisse entrevoir ses blessures... en quelque sorte son jugement dernier, avant l'heure.


(Note : 6,5/10)

Eren
7
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Créée

le 8 déc. 2018

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Eren

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