Pas très chaud
J'avais été charmé par As the Love Continues mais cette fois j'ai beaucoup plus de mal.Ce serait mentir que de dire que la musique de Mogwai est plate car il se passe plein de choses tout le temps,...
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le 1 févr. 2025
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Cette année, les glasvégiens de Mogwai fêtent les 30 ans d’existence de leur groupe, un anniversaire qui aurait dû être placé sous le signe de l’allégresse : As the Love Continues, leur précédent et excellent album, datant de quatre ans déjà, s’était classé en tête des charts britanniques (ce qui certes ne veut pas dire grand chose en termes de ventes, mais représente au moins une belle reconnaissance de leur talent!). Malheureusement, l’enregistrement de The Bad Fire (une expression de la classe ouvrière écossaise désignant ni plus ni moins que l’enfer !) a été marqué par une épreuve terrible : la grave maladie de la fille de Barry Burns, le claviériste, qui a traumatisé le groupe, et qui a fait de la création de l’album une épreuve, tout en obligeant les musiciens à travailler différemment.
Le miracle, car c’en est un, c’est que la musique que l’on entend sur The Bad Fire n’a rien de tourmentée, de sombre. Au contraire, poursuivant la mutation entamée avec l’album précédent, mais en peut-être en moins « abstrait », une grande partie des dix titres magnifiques qui le composent dégagent une forte impression de beauté, de grâce. Mieux encore, et c’est là sans doute la véritable marque laissée par l’expérience difficile vécue par le groupe, c’est l’un des albums les plus évidemment émotionnels, émouvants même, de Mogwai. Donc un album qui risque de leur valoir encore plus de fans, et, plus important encore, plus d’amour encore de la part de leurs vieux fans.
La longue introduction de God Gets You Back est l’illustration parfaite de ce désir de légèreté et de lumière, de cette réponse à « l’enfer » qui menace, mais que l’on fera tout pour éviter. Il y a d’ailleurs, comme de nombreux fans l’ont remarqué, quelque chose du psychédélisme coloré (mais sonique…) de My Bloody Valentine dans ce morceau.
Même si nous devons prendre notre parti du fait que le Mogwai d’aujourd’hui privilégiera moins les explosions sonores et l’intensité que le Mogwai des débuts, cela ne signifie pas que le mot « rock » dans « post-rock » soit désormais lettre morte ! Hi Chaos, le bien nommé, déroule un imparable crescendo qui devrait nous réjouir une fois boosté par le niveau sonore élevé du groupe sur scène. What Kind of Mix is This? revient dans les tonalités séduisantes de l’introduction de l’album, tandis que le redoutable Fanzine Made Of Flesh, qui bénéficie de quelques vocaux, adopte des tonalités guerrières, presque brutales, qui en font presque un single « commercial » (enfin, n’exagérons rien !).
Mais après cette introduction de quatre titres en forme de montagnes russes (on monte et on descend), on en arrive au cœur de l’album, avec des compositions qui ne se préoccupent que de beauté : Pale Vegan Hip Pain (encore un exemple des titres farfelus, presque « montypythonesques » dont raffolent Mogwai), et surtout le superbe If You Find This World Bad, You Should See Some Of The Others (un énoncé parfaitement approprié en ces temps de saluts nazis au plus haut niveau de l’état américain) cristallisent le projet de Mogwai, que les musiciens énoncent désormais clairement : utiliser la musique pour échapper au temps. Il y a là une sorte de splendeur bouleversante nichée au cœur d’un sentiment d’éternité suspendue, qu’on a rarement l’occasion de contempler. A ce moment là, The Bad Fire nous touche en plein cœur : aucune crainte de l’Enfer, nous voici bel et bien flottant dans les cieux.
18 Volcanoes, titre chanté et mélodique, nous rappelle à nous, quelque part, l’étrangeté planante et la maladresse désarmante d’un Syd Barrett (tout du moins d’un Syd Barrett qui aurait réussi à s’accrocher au rebord et à ne pas sombrer dans l’abîme). Hammer Room tranche sur ce qui précède avec son piano qui scande un rythme presque enjoué, avant qu’une magnifique intervention de la guitare ne déverse sur nous une quasi allégresse libératoire, lançant le morceau dans un tourbillon ascendant parfaitement enivrant : tiens, pour continuer les comparaisons « étranges », il y a dans Hammer Room quelque chose du génie du King Crimson instrumental de la plus belle eau (sur Lark’s Tongues in Aspic, par exemple). Les trois minutes réjouissantes de Lion Rumpus qui suivent nous rappellent encore une fois que Mogwai savent aussi jouer du rock direct, efficace, mais néanmoins audacieux, lyrique. Enthousiasmant !
Il est temps de refermer l’album sur une longue dérive sensorielle, rêveuse et bienveillante, Fact Boy (encore un titre qui n’a absolument rien à voir avec ce qu’on entend) : la seule chose que l’on peut se dire alors que l’album se referme, c’est bien qu’il ne mérite ni son titre, ni sa pochette menaçante. Ou alors, c’est que cette image de l’enfer a servi à Mogwai pour trouver tous les moyens possibles de résister à la peur, au Mal, et donc de développer cette musique magique, qui nous laisse finalement dans un état de douce euphorie.
[Critique écrite en 2025]
https://www.benzinemag.net/2025/01/26/mogwai-the-bad-fire-vers-la-lumiere/
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Créée
le 26 janv. 2025
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