La célébrité d'Idaho est, hélas !, tristement ironique : elle repose pour l'instant exclusivement sur l'insuccès notoire du groupe. Les chansons de Jeff Martin ont beau être d'un classicisme somptueux au point d'exister par elles-mêmes, elles souffrent pourtant d'un revers de médaille pervers et fatal en ce qu'elles excluent de leurs charmes la participation de l'auditeur. Ce dernier, empêché d'y projeter ses propres impressions, se voit réduit au simple rôle contemplatif et peine à trouver sa place dans ce monde hermétique. Sept albums et une poignée d'EPs plus tard, Idaho n'est jamais parvenu à se dépêtrer de son misérable succès d'estime, ni de l'indifférence qu'il semble lui-même entretenir au fil des années. Pour se relever de ce sentiment d'échec permanent, Jeff Martin, perdant magnifique resté seul aux commandes du groupe, a aujourd'hui l'excellente idée de rééditer l'album "Alas", sorti il y a exactement dix ans (lire la chronique parue à l'époque sur POPnews), en y ajoutant un EP sorti en 1997 et resté inédit chez nous : "The Forbidden EP". Derrière ce titre pas très engageant, on retrouve cinq "nouvelles" chansons, brillantes et feutrées, portées par une mélancolie lancinante et lumineuse, qui élèvent plus que jamais Idaho au rang des chefs de file du mouvement slowcore - dans la foulée duquel on a vu fleurir les futurs Mojave 3, Joseph Arthur, Sophia ou encore Arab Strap. La réédition de ces quinze chansons est en outre augmentée d'un second disque de six titres inédits récemment composés pour des fictions télévisées américaines, ainsi que d'un luxueux livret rétrospectif. Bien décidé à ne pas faire les choses à moitié, Jeff Martin ressuscitera également prochainement les chansons d'"Alas" et de "The Forbidden EP" sur les scènes européennes. Une chance supplémentaire d'enfin démythifier Idaho et d'écouter le groupe pour ce qu'il est : un Eldorado doux et cotonneux, plus insaisissable qu'inaccessible. (Popnews)


Depuis ses débuts en 1993 avec l’album "Year After Year", Jeff Martin reste un de ces trésors cachés, uniquement partagé par quelques fans fidèles. Longtemps associé au mouvement slowcore avec Low, Red House Painters ou encore Mark Eitzel, Jeff Martin demeure comme les autres auteurs de ce mouvement rebutant, un songwriter de génie, profondément touchant. Espérons que la réédition de l’EP "The Forbidden" et de "Alas", sortis il y a 10 ans, apportera un coup de projecteur salutaire pour Idaho.Sur "The Forbidden", on retrouve les nombreuses figures de style d'Idaho. Jeff Martin enveloppe ses morceaux de guitare acoustique lancinante, d’arpèges cristallins et de basse mélodique sur lesquels on s’abandonne sans difficulté. Le chant se fait nonchalant et touchant, comme celui d'un vieil ami que l’on sent plus heureux que naguère. Après quatre titres de pop éthérée (The Tick And The Thin, Hold Everything, Goldenseal et Apricots To Armagnac), le songwriting de Jeff Martin se fait plus aérien avec le superbe Bass Crawl. On y entend de long feedbacks de guitares électriques, une des marques de fabrique d’Idaho, dont les notes semblent vouloir tenir jusqu’à leur dernier souffle. Ce morceau est indéniablement le sommet de "The Forbidden" dont l’écriture introspective est absolument bouleversante.Alors que les premiers albums d’Idaho étaient encore trop marqués par des guitares lourdes et l’envie de crever quelques abcès, "Alas" propose une orchestration plus mélodique et complexe, évoquant de nombreux paysages cinématographiques. Si chaque morceau évoque une écriture folk ou rock, quelques expérimentations musicales viennent enrichir l’album : Les feedbacks déjà cités, le chant chuchoté de Melissa Auf der Maur et quelques touches de glockenspiel. Autant d’éléments au service d’un spleen accompagné d’un sentiment de quiétude et de sérénité. A l’évidence, le qualificatif de chef d’œuvre n’est pas ici galvaudé tant les pop songs d’Idaho planent au dessus de la mêlée et s’inscrivent à l’épreuve du temps pour un bon moment. Après ces deux disques, Jeff Martin continuera a épurer sa musique en réalisant les superbes "Heart Of Palm" et "Levitate". Une quête de l’abstraction qui trouvera son apogée avec le magnifique "The Long Gunman" sorti il y a deux ans. Avec "The Forbidden" et "Alas", on tient ici une belle brochette de pépites musicales qui brillent de mille feux. Incandescent. (indiepoprock) 
bisca
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le 1 avr. 2022

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