« The big star is falling
Through the static and distance
A farewell transmission
Listen »



Il y a ces critiques qui se conçoivent clairement, et dont les mots arrivent aisément.
Qui te semblent évidentes. Et que tu mets un quart d’heure à faire, relecture et modifications incluses.

Puis il y a les autres, celles dont tu reportes sans cesse l’écriture, où tu bloques une demi-heure sur les mots à employer, sur ce que tu veux vraiment raconter.
Est-ce que je vais juste parler de façon basique de l’album, comme je le ferais avec n’importe quel album ?



Écoute.
Écoute la beauté.
Écoute la beauté de la détresse.
Celle de Jason Molina, aujourd’hui regretté compositeur de Songs : Ohia et de Magnolia Electric Co.
Celle d’un folk rock au service d’un surréalisme et d’une tristesse superbe.
« John Henry split this heart split this full moon heart »



Et voilà, je me remets à écrire ces phrases naïves et bateau déjà lues des centaines de fois, mais qui est-ce que je cherche donc à duper ?
Je doute, je doute… Comment donner vraiment envie au lecteur d’écouter l’album ?



Il y a quelque chose d’incroyablement bouleversant dans ces 8 morceaux (si ce n’est le côté profondément mélancolique des paroles).
Est-ce donc ces instrumentations folks somptueuses ?
I’ve Been Riding Through the ghost… Relation tempétueuse, traversée fantasmagorique aux côté de spectres, accompagnée de chœurs féminins superbes.
« And while you've been busy
Learning how to complain
I've been busy learning
How to make a change »

The Old Black Hen, un blues confrontant le chanteur à cette vieille poule noire, apparemment prophétique.
« Time for the Bad Luck Lullaby
You know the one it's the same one you sung
when you wrote down the Revelations »

Hold On Magnolia… Un piano offre la plus belle fin qui soit à l’album, venant mourir aux côtés des cordes et de la voix.
« Hold on Magnolia
I think its almost time »



Je suis coupable, je me suis senti obligé de rajouter pleins de citations pour prouver la soi-disant magnificence de l’album.
Certes, ma critique est plus longue du coup, mais le lecteur est-il plus convaincu pour autant ? Ne risque-t-il pas simplement de croire que je fais ça par pur remplissage ou peur de la feuille blanche, « horror vacui » ?



Enfin, la voix de Jason Molina a cette capacité à me déchirer le cœur, pas qu’elle soit torturée comme celle d’un Vic Chesnutt ou d’un Efrim Menuck (A Silver Mt Zion), non, elle est très simple, presque naïve, et joue d’une retenue sublime, que vient rejoindre régulièrement la chanteuse à la voix cristalline.



Maintenant vient la partie la plus difficile, la conclusion.
Comment la réussir ? Ne pas décevoir le lecteur ?
Se contenter d’un « Bref, excellent album, va l’écouter » serait trop brusque, sans retenue.
Non, il faut quelque chose de plus recherché.
De plus dépouillé. Sans pour autant sombrer dans le style pour le style, sans fond.



Malheureusement, Jason Molina a rejoint le club de ceux partis trop tôt, de ces poètes-compositeurs à la sensibilité exacerbée. Son œuvre élégante nous reste.
Et sur la pochette, la chouette blanche pleure. On la comprend.
Rainure
9
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le 25 janv. 2015

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Rainure

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