"Intoxicating Beauty"

C’est dans ces cas-là que je me rends compte à quel point le temps peut passer vite.
Je me rappelle encore distinctement le jour où mon disquaire préféré m’a suggéré la toute première sortie de ce groupe, l’EP Tone Of Things To Come, un bien bel objet que j’ai pris sans hésiter. C’était en 2012. Et voilà qu’une démo et deux EP plus tard, ils sortent leur tout premier album chez NWN!

Le choix de label m’a immédiatement interpellé, dans la mesure où le souvenir que j’avais de leur musique ne collait pas spécialement au style de l’écurie de Yosuke Konishi.
Car Chaos Echoes propose une musique qui a certes une base doom/death comme on entend souvent chez les combos à tendance régressive, mais elle est bien plus que ça en réalité : la progression et la longueur des morceaux, le minimalisme et le côté très hypnotique des rythmiques et des riffs (souvent résumés à une note qui tourne en trémolo avec des bends de temps en temps) sont plutôt à associer au mouvement post metal.

Ce côté post, les Alsaciens semblent l’avoir poussé à l’extrême avec ce dernier jet.
Cet album se divise en fait en plusieurs parties, mais qui ne correspondent pas forcément aux différentes plages.
La première partie, par exemple, regroupe les trois premiers morceaux, qui sont trois différents mouvements d’une même entité : une intro instrumentale doomesque et ritualiste de neuf minutes, qui se meurt dans un passage ambient à la progression très lente faite de crescendo et decrescendo des différents instruments, hypnotique jusqu’à la transe avec son vrombissement de basse continu ; encore de l’ambient, puis on passe à du death plus méchant et crasseux, avec une première apparition de la voix et un petit côté psyché avec cet orgue fantomatique et sinistre. Là encore, une construction très lente et par strates, assez typique du post.
Après le cinquième Interzone, là encore très ritualiste, un morceau en blast continu sur six minutes, socle d’un riffing halluciné et entêtant, mononote saupoudré de bends avec une basse sourde en fond mais qui semble mener la danse à elle seule.

Au-delà de ce descriptif quelque peu rébarbatif, j’en conviens, Transient est une véritable expérience sonore, alliant certes de nombreux éléments post souvent prédominants, mais assortis de ce côté extrême et ritualiste qui donne toute sa saveur et sa personnalité à ce groupe somme toute peu commun.
Même si l’on peut décrire la musique de Chaos Echoes comme du post/doom/death/psyché/rituel/machin, le travail d’élaboration allié à une exécution parfaite et des idées foisonnantes mais intelligemment retranscrites font de ce disque une perle atypique, au sein de NWN! mais également de la scène extrême. J’ai retrouvé en grande partie ce qui m’avait plu sur leur premier EP, mais en plus abouti.

On tient là à mon avis une des formations hexagonales les plus intéressantes actuellement dans le style. Si vous doutez de mon intégrité et de mon objectivité, sachez que je ne suis alsacien que d’adoption.