Aspirine, tome 1
6.6
Aspirine, tome 1

BD franco-belge de Joann Sfar (2018)

"Je vous nique puis je ressuscite vos morts"

On sait bien désormais que le grand intérêt du travail, indéniablement impressionnant, colossal, du stakhanoviste Joann Sfar réside dans sa profusion, son étrange polymorphisme : alternant réflexions philosophiques - décalées mais souvent passionnantes - sur l'existence, la religion, etc. - et œuvres de pur divertissement fantaisiste, en passant par ce qui ressemble de plus en plus à des chroniques amoureuses, les nombreux livres de Sfar sont devenus pour pas mal d'entre nous des repères rassurants dans notre vie.


"Aspirine", one shot ou bien début d'une nouvelle série (on ne sait jamais avec Sfar), s'avère une sorte de pot-pourri de tout ce que son auteur fait, d'excellent comme de moins bon. Derrière une couverture au graphisme plus "classique" qu'à l'habitude, on retrouve l'univers - et la forme - de son regretté "Grand Vampire", l'histoire se focalisant désormais sur le personnage d'Aspirine, éternelle adolescente tourmentée : un sujet en or puisque les pulsion destructrices "normales" de l'adolescence deviennent pour le moins dangereuses quand elles tourmentent un être surnaturel aux pouvoirs immense comme un(e) vampire tri-centenaire !


Au cours des 140 pages de ce (trop long ?) volume, la rage inextinguible d'Aspirine va successivement entrer en collision avec un professeur de philosophie mignon mais irritant, avec de dangereux violeurs (car Aspirine, peau blanche et cheveux rouges, est évidemment sexy en diable !), avec sa grande sœur fort portée sur le sexe, avec d'autres personnages ressurgis des archives de Sfar (on vous les laisse découvrir), et surtout avec Yidgor, improbable fan des jeux de rôles traditionnels. S'ensuivent une savoureuse alternance de débats existentiels, avec cet habituel humour léger si typique de l'ancienne équipe de l'Association, et de scènes de violence ou de chaos qui prouvent que Sfar n'est pas plus imperméable que nous à l'imagerie envahissante des super-héros.


Il faut reconnaître que tout n'est pas excellent dans "Aspirine", et qu'on a surtout l'impression, comme souvent chez Sfar, que l'histoire avance sur le principe d'un maraboutd'ficelle vaguement négligent, d'autant plus irritant d'ailleurs que certains passages dégagent un mélange d'intelligence, de spiritualité et de poésie caractéristiques des meilleures créations de l'auteur. En l'état, voici donc un nouveau livre qui contentera largement les nombreux fans de Joann Sfar, mais ne lui gagnera certainement aucun nouveau suiveur !


[Critique écrite en 2018]
Retrouvez cette critique et bien d'autres sur Benzine : https://www.benzinemag.net/2018/06/23/aspirine-adolescence-tourmentee-et-nouvelle-heroine-de-joann-sfar/

EricDebarnot
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleures BD de 2018

Créée

le 23 juin 2018

Critique lue 584 fois

9 j'aime

2 commentaires

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 584 fois

9
2

D'autres avis sur Aspirine, tome 1

Aspirine, tome 1
Dadou-lit
6

Le fiancé d'Aspirine

C’était chouette mais… Cet album avait tout pour attirer les foules. Son auteur, Joann Sfar tout de même et son thème, l’immortalité d’une adolescente vampire traité justement, par Sfar. Aspirine...

le 9 oct. 2018

2 j'aime

Aspirine, tome 1
rimepauvre
8

Revigorante

J’ai ris plusieurs fois bien grassement, la meuf de 16 ans que j’ai été était ravie. Expérience rafraîchissante, la colère a un vrai personnage.

le 20 mars 2024

Aspirine, tome 1
BORISAO
5

Pas mal à la tête mais pas simple.

Fan de longue date de Sfar, Donjons, Professeur Bell, Petit et Grand Vampire, du Chat, des Olives, etc..., je n'ai pas été accroché ou plutôt mordu par Aspirine ou sa sœur Josacine. Peut être que je...

le 17 juin 2023

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

204 j'aime

150

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

190 j'aime

104

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

184 j'aime

25