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Ce tome fait suite à Apocalipstick (épisodes 9 à 16). Il contient les épisodes 17 à 25 qui concluent la première saison, parus en 1996. L'histoire se poursuit dans une deuxième saison qui commence par Bloody Hell in America (saison 2, épisodes 1 à 4).


Épisodes 17 à 19 (dessins de Phil Jimenez, encrage de John Stokes) - Lord Fanny et King Mob ont été capturés par Sir Miles Delacourt et sont détenus dans un QG, accessible par un magasin de farces et attrapes. Delacourt torture King Mob et s'insinue dans son esprit pour découvrir ses secrets (son vrai nom Gideon Starorzewski, Elfayed un ancien mentor, Mister 6 un autre mentor, etc.).


Épisode 20 (illustrations de Tommy Lee Edwards) - Lucille Butler était un officier de police avant devenir Boy au sein des Invisibles. Cet épisode raconte la suite d'événements qui lui a ouvert les yeux sur la nature de la réalité et qui a abouti à son recrutement par King Mob. Épisode 21 (illustrations de Paul Johnson) - Dane Paul McGowan prend conscience qu'il ne lui reste plus d'autre choix de vie que de rejoindre les Invisibles.


Épisodes 22 à 24 (dessins de Steve Yeowell, encrage de Dick Giordano) - La cellule des Invisibles, ainsi que Papa Guedhe (Jim Crow) et Mister Six (Brian Malcom) sont tous dans le bâtiment où sont détenus King Mob et Lord Fanny pour une opération de sauvetage d'une ampleur incommensurable.


Épisode 25 (dessins de Mark Buckingham, encrage de Mark Pennington) - Le groupe de la Division X (Mister 6, Jack Flint et George Harper) est réactivé par le Ministère de l'Intérieur pour enquêter sur les manifestations observées dans le magasin de farces & attrapes, et un paquet surnaturel récupéré au 10 Downing Street.


Dès la première page, l'attention et la culture du lecteur sont mises à rude épreuve. Il découvre un dandy anglais reprenant certains des codes de James Bond, dans une tenue évoquant le swinging London, avec une narration fleurie pleine de sous-entendus. Facile, il s'agit d'un hommage appuyé à Jerry Cornelius de Michael Moorcock. Facile, c'est vite dit, car si vous avez lu les livres correspondants, vous vous rendez compte que Morrison fait référence aux caractéristiques du personnage, sans les expliciter ou les rappeler. Donc le lecteur comprend qu'il doit faire attention à bien identifier chaque référence car chacune enrichit le récit d'autant. Or Grant Morrison dispose d'une culture impressionnante et il est difficile de suivre le rythme. Certaines références ne sont là que pour ancrer le récit dans une réalité proche (contexte superficiel) ; elles restent superficielles, par exemple "Lestat le vampire" d'Ann Rice, Cosby Show ou le Cluedo, Dante Alighieri, Barbara Cartland. Les références musicales participent essentiellement à renforcer cette couleur temporelle : Sex Pistols, Pink Floyd & Syd Barrett, Madness.


Mais d'autres références donnent des clefs de compréhension du récit. Outre Jerry Cornelius, il faut avoir une connaissance de base des récits d'Howard Philips Lovecraft, mais aussi de ceux de Philip Kindred Dick (en particulier Siva, le premier tome de la trilogie divine), et une idée de ce qui fait la spécificité de Thomas Pynchon en tant qu'écrivain (en particulier Morrison fait référence à Vente à la criée du lot 49). Morrison emprunte également à K. Dick (la nouvelle "Time out of joint") une idée visuelle où un mot écrit sur un bout de papier remplace l'objet désigné, mais il s'agit là également d'un concept philosophique assez répandu sur la nature du langage et son influence sur notre perception de la réalité.


Il n'est donc pas possible de faire l'impasse sur toutes ces références qui participent au sens du récit. Du coup une partie de la lecture est consacrée à les repérer : la pièce d'interrogatoire numérotée 101 comme dans 1984 de George Orwell, King Mob suspendu à des fils téléphoniques tel Odin suspendu à l'arbre monde pendant 9 jours et 9 nuits, le 22 décembre 2012, un personnage poursuivi par un globe blanc tel le prisonnier numéro 6 poursuivi par le rôdeur, la répétition du nombre 23 (élément clef de Illuminatus!), les phrases leitmotivs telles que "Try to remember" et "As above, so below", le graffiti "Barbelith", un phénomène de glossolalie, un koan (le son d'une main qui applaudit), etc. La compréhension de la plupart des références est indispensable pour que l'histoire ait un sens.


En plus d'intégrer des sous-entendus culturels, Morrison développe son histoire à plusieurs niveaux selon une structure complexe en réseau (noeuds + liens relevant de la théorie des graphes) fortement maillé, rendant difficile la perception de la trame principale, du fait des imbrications complexes entre plusieurs fils narratifs suivant différents personnages. À condition d'une attention soutenue (et de quelques recherches culturelles complémentaires), le récit révèle sa richesse et propose un voyage inoubliable. Morrison jongle avec une grande aisance dans les 3 ou 4 niveaux différents de complot global, tout en continuant sa quête de sens de l'existence.


Les dessins de Phil Jimenez apportent un plaisir visuel immédiat. Ils sont détaillés, ils s'inscrivent dans une forme de réalisme très descriptif, et ils ajoutent une plausibilité impressionnante aux aventures. Quel que soit l'endroit où se situe l'action, le lecteur reconnaît immédiatement les éléments familiers, comme par exemple Ayers Rock (Uluru) en Australie. Les personnages gagnent également en pouvoir de séduction, à commencer par Ragged Robin. La contrepartie de cette exactitude est que le récit perd un peu de sa mystique et que certains costumes peuvent évoquer leur cousin dégénéré en élasthanne (réservé aux superhéros).


Les illustrations de Tommy Lee Edward sont noires à souhait et transmettent toute la noirceur et le désespoir du récit. Paul Johnson, utilise un style un peu léger en encrage, pas très convainquant, mais pas désagréable. Les dessins de Steve Yeowell font toujours un peu vide et superficiel, mais l'encrage de Giordano leur ajoute un petit mordant qui aide à faire passer. Buckingham utilise un style à la fois détaillé et légèrement cartoon qui donne l'impression d'être dans une sitcom comique des années 1970 ; c'est un peu déconcertant.


Avec ce tome, Grant Morrison poursuit son voyage personnel sur la quête de sens de l'existence, en s'appuyant sur sa culture impressionnante qui exige une forte participation de la part du lecteur. En parallèle il étend les ramifications et les conséquences du complot mondial et extradimensionnel en se servant d'une architecture narrative complexe et très ambitieuse.

Presence
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le 16 sept. 2019

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