Questo sarà il nostro Vietnam !

Une bande de gamins vivote dans une ville-champignon, à l’ombre de l’usine ANIC, un mastodonte d’acier perdu quelque part dans les campagnes de l’Italie. Entre les barres d’immeubles et les terrains de foot financés par les industries pétrochimiques, les garçons désoeuvrés s’ennuient dans une enfance qui tourne en rond : ils profitent de leurs derniers étés de tranquillité, pendant qu’ils sont encore à l’école, avant d’avoir l’âge de rejoindre l’usine. Le soir, ils foutent le feu à des crapauds crevés, et s’amusent à respirer les vapeurs toxiques qui s’échappent de l’usine ...

Davide Reviati sert tout cela avec un dessin assez âpre : presque des gribouillis, tout au stylo-bille noir, aucun encrage et aucune mise en couleurs. Le découpage des vignettes est assez surréaliste, les angles de vue sont renversants, et tout ce graphisme halluciné convient bien à l’ambiance de délire déprimé qui colle à cet Etat de Veille. La narration est elle aussi saccadée, les dix-huit épisodes s’enchaînent brutalement : neuf fragments d’une enfance décousue, puis soudain un saut de peut-être dix ans, et neuf autres morceaux d’un âge adulte presque désespéré.

Une BD complètement surréaliste, avec Childéric le germain qui vit en-dehors du village, ou bien Lario et ses ailes d’ange, le dernier des super-héros ... Un noir & blanc époustouflant pour une histoire sans espoir, truffée d’allégories, mais dont les deux derniers chapitres un peu trop métaphysiques pourraient rebuter certains lecteurs.

Prix du meilleur album au Festival de Naples 2010 ? Amplement mérité !