Free Fight
6.6
Free Fight

Manga de Tetsuya Saruwatari (2003)

Celui Kiichi connait en baston

Suite et fin de Tough, ce manga d'arts-martiaux imparfait, racontant le parcours initiatique de l'héritier d'un art martial secret qui devra prouver sa valeur par ses combats incessants contre des ennemis de plus en plus forts, qui auront tous une certaine humanité qui rendra les affrontements encore plus riches en enjeux.
La question qui se pose au début est bien sûr de savoir si une suite était vraiment nécessaire. Car la conclusion de Tough, si elle était douce-amère, offrait un accomplissement satisfaisant pour au moins un des personnages. Mais pas pour Kiichi, le héros, qui devenait le nouveau maitre du Nada-shinkage presque sans aucun effort.
Et je pense qu'au fond, Tetsuya Saruwatari n'était lui-même pas satisfait de cette conclusion. Lors de la publication de Tough, l'auteur était en effet devenu lui-même père de famille et avait tiré de cette nouvelle situation des interrogations sur la transmission et la responsabilité d'un père vis-à-vis de son enfant. Des questions complexes que l'on retrouvait dans le personnage du père de Kiichi, Seiko, qui passait d'un mentor monolithique au début de l’œuvre à un vrai père responsable et aimant, qui s'accomplissait à la fin de Tough en se sacrifiant pour protéger sa progéniture. Partant de là, on peut comprendre que Saruwatari n'ai pas souhaité laisser le personnage dans lequel il a le plus déversé de sa propre personne finir mal.


Et c'est ainsi que commence Free fight : New Tough.
Comme le titre l'indique, Kiichi, devenu plus vieux, participe à des combats de free-fight clandestins pour le compte d'un gangster afin de payer les soins médicaux nécessaires à son père suite à sa défaite face à son propre frère Kiryu.
Mais si vous pensez que je vous ai cité là les grandes lignes du scénario de ce manga, vous faites erreur. Car New Tough, plus encore que Tough avant lui, est une série sans réel fil narratif.
Nous commençons donc par suivre Kiichi dans ce milieu de combats underground, sous les ordres d'un mafieux ambitieux faisant affaire avec d'autres loustics tout aussi peu recommandables, mais rapidement, notre héros se retrouve à devoir concourir lors d'un tournoi (Encore !) qui prendra la majeure partie de la série, avant d'enchainer sur un pseudo-arc de transition qui ne sera pas sans rappeler Rocky, pour conclure avec la dernière partie de la série mettant en scène une école d'arts-martiaux rivale au Nada-shinkage.


Le début avec le free-fight semble promettre une intrigue mêlant mafia et combat, ce qui aurait été plus qu'intéressant pour l'évolution de Kiichi, devant prostituer ses aptitudes guerrières pour le compte de gens fort peu recommandables, dans le seul but de gagner suffisamment d'argent pour soigner son père brisé. Des enjeux forts, mais qui sont gâchés dès l'introduction du tournoi, où la sous-intrigue mafieuse devient plus que secondaire, et alors que Seiko est guéri de ses blessures par un Deus ex Machina, certes cohérent, mais qui plombe un peu l'ambiance. L'objectif du héros est donc atteint à peine arrivé à la moitié de la série et les enjeux promis à la base sont presque totalement effacés.
On pourrait bien sûr considérer cela comme de la mauvaise écriture, mais s'il est vrai que Saruwatari fait preuve de beaucoup de maladresse, il choisit de se recentrer avant tout sur une histoire plus humaine, une histoire de famille. Et sur ce point, je considère la série comme difficilement attaquable.
Le grand trio central de la fin de Tough, Seiko-Kiryu-Son O, est donc mis sur le devant de la scène. Kiryu, qui à la fin de Tough ressemblait à un Yujiro Hanma (Baki) du pauvre, brutal, égoïste et arrogant, gagne en personnalité et finit même par devenir attachant, malgré ses énormes défauts. Son O, au contraire, devient bien plus monolithique, il perd son aspect de Jésus des arts-martiaux pour devenir au final assez terne, et être réduit à un but à atteindre supplémentaire pour Kiichi.
Mais celui qui aura droit à toute l'attention de l'auteur est bien évidemment Seiko. C'est le modèle de Kiichi, son mentor, celui qu'il est amené à dépasser. L'association entre transmission maitre/élève et transmission parent/enfant, déjà présent dans Tough, se retrouve dans cette série, et gagne même en maturité grâce à une révélation troublante lors de l'affrontement père-fils, qui rend les deux acteurs de ce combat encore plus flamboyants qu'ils ne le sont déjà.
Mon Dieu, quelle noblesse se dégage de Seiko Miyazawa, et quelle maturité a acquis Kiichi, lui qui était un gamin vantard insupportable dans la première série.
Il est assez fascinant d'observer les relations complexes qui lient le quatuor du Nada-shinkage, entre amour filial sincère, rivalité d'artistes martiaux et respect mutuel.


L'arc de transition qui suit... est franchement raté. Mis à part toute l'intrigue autour du lutteur raté que Kiichi va encourager à se dépasser, très touchante et rappelant comme je l'ai dit Rocky et son message plein d'optimisme, il n'y a pas de réels enjeux dans cette partie. Kiichi pourrait prendre le risque de perdre sa liberté s'il perd un match, mais on sait parfaitement qu'il est bien trop fort pour qu'on ait une quelconque menace crédible en face de lui. De plus, cet arc amorce l'arrivée d'un personnage présenté comme une menace sérieuse pour nos héros, Phantom Joe, mais qui est rapidement désamorcée car le personnage n'est pas si dangereux que ça. Saruwatari gâche complètement le potentiel de son personnage pour en faire un simple tremplin vers l'arc final du Yugen-shinkage.


Un dernier arc lui-même en dent de scie. Plusieurs affrontements contre de nouveaux adversaires, mais au final un seul de réel important, à savoir le boss de fin. La conclusion en elle-même est bonne, mais le chemin pour y arriver est bien trop long.


Une chose est sûre, le dessin a continué d'évoluer en bien. Dès les débuts de la série, il frôle l'excellence et ne cesse de se bonifier avec le temps. Les combats sont puissants et ultra-dynamiques. Ils perdent certes en réalisme mais gagnent en spectaculaire.


Free fight : New Tough est donc une bonne suite à la série d'origine. Elle approfondit ses personnages et offre enfin à ses 2 protagonistes centraux l'accomplissement qu'ils méritaient.

Arkeniax
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Créée

le 23 nov. 2019

Critique lue 735 fois

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Arkeniax

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