La Révélation (1/2) - Le Troisième Testament : Julius, tome 2 par Eric17

« Le troisième testament » fait partie des toutes meilleures séries de bandes dessinées à mes yeux. J’ai du mal à trouver une histoire médiévale qui la surpasse sur le plan de la construction et de l’attrait narratifs. Je ne peux la lire et à la relire sans que je me lasse du voyage ésotérique et historique que nous offre la quête de Conrad de Marbourg. La tétralogie est terminée depuis presque une dizaine d’années maintenant. C’est avec une certaine surprise que j’ai vu apparaitre il y a deux ans un prequel de cette grande saga. Elle était sous-titrait « Julius ». On retrouve le même couple de scénariste constitué d’Alex Alice et de Xavier Dorison. J’appréhendais que ce dernier ne joue qu’un rôle mineur dans la rédaction tant son talent est grand. Tout ce qu’il raconte est brillant. Alice se chargeait des dessins dans le cycle initial. Dans le premier tome de cette nouvelle aventure, ils sont l’œuvre de Robin Recht. Dans le suivant, qui m’importe aujourd’hui, c’est Timothée Montaigne qui illustre.

« Livre 1 » nous avait plongé en Judée au premier siècle de notre ère. Julius est un général romain et prend un plaisir certain à persécuter les minorités qu’elles soient chrétiennes ou juives. Son projet de soulèvement politique est dénoncé par sa fille et lui offre un aller simple vers les mines. Il y côtoie donc ceux qu’il a tant fait souffrir et en particulier un chrétien que certains voient comme le nouveau Messie. Suite à la révolte qui libérera le camp, ce dernier décide de suivre ce que sa foi lui indique. Il doit marcher vers l’Est. Il est accompagné de ses disciples et de Julius qui ne voit encore en lui qu’un ami et non pas le frère du Christ…

Ce nouveau tome intitulé « La révélation 1/2 » nous offre donc un long voyage dont on ne connait pas encore l’issue. Les projets du héros sont nébuleux. Il répond aux voies qui lui parlent qui lui indiquent le chemin. La petite communauté s’avère intéressante. Chacun possède une personnalité finalement attachante. Julius joue le rôle du réfractaire. Quant au personnage central, son statut est assez unique. On prend plaisir à suivre leurs pérégrinations. Elles nous mènent vers la mythique tour de Babel. Le lecteur ne peut rester indifférent à une telle splendeur. Le travail graphique de Timothée Montaigne est sur ce plan est remarquable. Notre première entrée dans la cité est féérique. On est pris par son ampleur. Son immensité nous saute aux yeux. Notre montée aux milieux des Jardins Suspendus nous en met plein les mirettes. Le dessinateur arrive à marquer une réelle différence d’atmosphère entre le périple aride dans le désert et cette arrivée dans cette grande cité vivante. Ses illustrations participent de manière forte à l’immersion du lecteur dans l’univers de l’histoire. C’est une condition indispensable à la réussite d’un album. Elle est amplement remplie.

Au-delà d’un voyage, cet opus nous offre un vrai voyage philosophique et ésotérique. Les discussions entre le Messie et ses disciples sont réfléchis et intéressants. La paix qui habite le héros est bien transcrite par les dialogues, ses traits et ses attitudes. Son aura fait que chacun de ses mots prend un poids certain. On boit ses paroles qui s’avèrent sages et muris. Cette dimension est intéressante. Cela ne fait pas pour autant un bouquin bavard mais plaisant à lire. Le défaut qui en résulte est que la narration manque finalement de changement de rythme. Les événements sont finalement plutôt rares. La lecture se résume finalement grossièrement à suivre des hommes marcher. Je regrette un petit peu que la trame n’avance pas davantage. On ne passe pas un moment désagréable pour autant, loin s’en faut. Mais je n’aurais pas été contre quelques petits pics en intensité. On suit de manière ponctuelle un groupe de romains des plus inquiétants et angoissants. Mais leur place reste trop anecdotique pour qu’elle ne serve à plus de chose qu’à introduire leur présence certaine dans le prochain tome.

En conclusion, « La révélation 1/2 » est un ouvrage de qualité. Il est bien construit sur le plan du scénario et des dessins. On se laisse prendre avec plaisir dans le voyage de cette petite communauté dans des lieux et une époque qui m’intriguent. Ce nouveau cycle confirme sa qualité. Il s’avère relativement différent du premier cycle. Cela évite de tomber trop facilement dans la comparaison qui ne pourrait lui être favorable tant la tétralogie originale est un modèle quasi parfait. Je ne peux donc que conseiller aux adeptes du genre de s’y plonger. Ils ne regretteront pas de marcher dans les pas de ce nouveau Messie…