Le troisième opus des aventures de Gil Jourdan peut paraître décevant.
Un coupable presque auto-désigné dès son entrée en scène, une histoire plutôt courte, moins de péripéties de d'accoutumé.


Pourtant, La voiture immergée fourmille de belles trouvailles !


D'abord, la clef de voûte de l'édifice.
Ayant découvert le passage de Gois qui relie l'île de Noirmoutier (ses pommes de terre uniques !) et le continent, un chemin praticable à marée basse uniquement, vite recouvert par la mer autrement, l'esprit enpolaré de Maurice Tillieux s'est représenté tout une intrigue criminelle autour de ce phénomène naturel singulier. Il en ressort une technique meurtrière redoutablement efficace et cruelle, où l'assassin ne se salit pas les mains et laisse la tâche ingrate à la mer. On peut y voir d'ailleurs une résurgence du premier polar rédigé par le père de Gil Jourdan dans sa jeunesse, Le Navire qui tue ses capitaines.
D'ailleurs, on ne soulignera jamais assez le phrasé de Tillieux tantôt digne d'Audiard, tantôt digne de Zola, un style dans lequel l'auteur insatisfait voyait bien trop de pompe. Un extrait de ce beau pseudo-rococo: "Le courant les pousse rapidement, tout au bout de la nuit, vers l'infini de l'eau glacée."


Ensuite, l'humour, toujours aussi piquant, meilleur même que d'accoutumé.
Des gags en veux-tu en voilà, menés par le tandem Crouton-Libellule, véritables Laurel & Hardy de l'univers de Gil Jourdan.


On appréciera tout particulièrement le passage, lorsque s'immerge la voiture des trois larrons, où Crouton devient un parfait Captain Obvious au grand dam de Libellule jusqu'à l'hilarant:
- Vous n'êtes pas noyé ?
- Non ! Et je le regrette ! Je n'entendrais plus vos questions idiotes !


Un humour qui parfois quitte l'Audiard pour rejoindre l'autre côté de la Manche et les Monty Python de La Vie de Brian:


comment ne pas rire devant le policier qui demande au cambrioleur pris sur le fait, en pleine escalade d'une façade d'immeuble, cisailles en main, s'il a une "raison valable" d'agir de la sorte ?


Humour mais aussi élégance et attirance !
L'assassin, quant à lui, s'il n'est pas bien difficile à démasquer ne manque cependant pas d'élégance, masqué comme un véritable tueur de slasher !
Et, conscient d'avoir beaucoup insisté sur l'élégance et le sex-appeal de Natacha, sachez mesdames, mesdemoiselles, que Gil Jourdan conserve dans cet album son élégance à la Bogart. Plus, il fait tomber la chemise et, à défaut de l'y voir en tenu d'Adam, vous pourrez le contempler torse nu et en slip de bain bleu !


Humour, classe et scénario puisé à même la mer et ses trahisons, voilà un bel album dont la brièveté est sans doute plus à imputer au bon moment de distraction qu'il procure qu'à sa simplicité de surface.
Avis donc: allez vous immerger dans la lecture de la troisième aventure de Gil Jourdan et sa voiture !

Frenhofer
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le 27 avr. 2019

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