René Petillon est décédé en 2018. Ce n’est pas une année plus bête qu’une autre pour mourir. Mais il ne faudrait pas que sa mort fasse oublier le souvenir d’un scénariste et dessinateur drôle et talentueux, créateur de l’inspecteur pas très futé Jack Palmer et adapté à deux reprises au cinéma avec L’Enquête Corse en 2004 et King Guillaume en 2009. Heureusement la profession l’avait sacré de son vivant avec le prestigieux Grand Prix de la Ville d’Angoulême en 1989, succédant à Jacques Tardi, Enki Bilal ou Hugo Pratt, tout de même.

Pour que l’oubli post-mortem ne recouvre pas son souvenir, il faut replonger dans ses œuvres et les faire redécouvrir, et La fin du monde est pour ce soir est un bon candidat pour l’exercice. En effet, l’album reprend des histoires courtes de René Pétillon, où l’auteur exprime toute sa fantaisie, dans des palettes d’humour qui ont un peu moins les pieds sur terre que les mésaventures de Jack Palmer par exemple.

Petillon utilise notamment un humour par l’absurde qui fait des étincelles, comme en témoigne cette histoire autour de familles de tyroliens suisses qui se coupent en deux, littéralement, pour obtenir la propriété de la scierie familiale. Sans que cela ne les dérange pas tant que ça. Ou de ces légionnaires de la légion étrangère que l’on croit piégé dans un désert à l’article de la mort, jusqu’à ce que la dernière page révèle qu’ils sont dans le sable d’un jardin d’enfants. Je crois que ma préférée reste tout de même ce détective normand dans Bloody Calva, parodie bien fofolle des films noirs.

Il y a plein de bonnes idées, déclinées en plaisanteries au sein des histoires mais aussi en gags visuels, parfois cachés dans le décor, comme dans les scènes de foules dans « Les carottes sont cuites ».

Certaines histoires sont même fortement référencées, Pétillon s’amusant avec la culture de l’époque, comme dans « C’est un drôle de train », enquête loufoque dans un train peuplé de célébrités, ou quand l’auteur s’amuse avec Tintin dans les deux pages qui font cauchemarder le reporter d’Hergé de scènes en scènes marquantes de ses albums. L’exercice reste tout de même un peu vain pour le deuxième exemple en dehors du jeu de la référence.

L’album réunit des histoires parues ici et là, sur plusieurs années. On peut donc y découvrir un Pétillon qui s’amuse parfois à changer de style, à tenter la ligne claire, ou des illustrations plus fouillées. C’est expérimental à son niveau, mais l’ensemble est toujours lisible, sans ruptures de ton majeures. Le recueil propose des histoires longues, mais aussi des strips ou même des gags en une case, démontrant dans le meilleur des cas tout le talent de Pétillon pour faire rire.

La fin du monde est pour ce soir, parait-il, mais d’ici là il ne serait pas inutile de jeter un œil à cet album de bande dessinées à l’imagination folle et à l’humour ravageur, entre situations absurdes et plaisanteries amusantes. La diversité des histoires proposées démontre toute la richesse d’un auteur à l’aise un peu partout, qu’il ne faudrait pas oublier trop vite. On a toujours besoin de rire grâce à Pétillon.

SimplySmackkk
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le 23 mars 2023

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