Aououououououououououououououououououou ouhou !
Ha! Ha ! Ha ! Ha! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha !


Hurlements de loups et rires démoniaques, voilà le programme du quatrième tome des aventures du reporter Guy Lefranc !



De la fin du monde aux querelles de voisinage



Après trois aventures d'espionnage haut en couleur, Lefranc joue les enquêteurs puis les justiciers dans une intrigue qui, dépourvue d'Axel Borg et presque sans l'Inspecteur Renard, peut sembler bien faible.
Minimaliste dans ses enjeux, troquant les intrigues apocalyptiques contre un bon vieux polar à énigme à la Agatha Christie et surtout à la Conan Doyle, tant l'intrigue semble s'inspirer du Chien des Baskerville, Le Repaire du loup est une aventure à part, à l'opposé de ses aînés. Son format, plus court, peut laisser croire qu'il n'a rien à dire. Son titre, qui semble tout droit sorti de la collection des Sans Atout de Boileau-Narcejac n'est guère là pour enjoliver les choses ...
On aurait cependant tort de sous-estimer ce très beau nouveau Lefranc et ce serait un contre-sens fatal que de le mesurer à l'aune des aventures bondiennes qui le précèdent.



La (Grande) Menace Fantôme



Oui, Le Repaire du Loup ne joue clairement pas dans la catégorie des trois premiers albums.
Pourtant, son ambiance n'a pas à rougir devant les catastrophes en crescendo interchangeables auxquelles Martin a fini par nous habituer. Proche du conte de fées, dont il reprend des lieux commun, Le Repaire du Loup marque les esprits dès les premières cases du récit, rompant avec la science-fiction très réaliste des premiers album et installant une aura de mystère et de terreur fantastique dans un petit village qu'une menace mi-terroriste mi-spectrale coupe d'entrée de jeu de la civilisation.
Cette menace ? Le dessin sommaire d'une tête de loup dans un triangle pointe en bas, une catastrophe souvent mortelle et un ricanement inhumain pour ponctuer le tout. Est-ce le Diable auquel le pont détruit initialement fait allusion qui se cache derrière tout cela ? On sait qu'avec Guy Lefranc, la chose est peu probable. Mais, tout de même, cela accroche le lecteur à une histoire qui sera plus bouleversante qu'il ne s'y attend.
Une explosion, un rire malveillant et un village en proie à la peur et la colère, voilà le décor planté pour une partie assez particulière des Loup-Garous de Thiercelieux dans un village bien nommé: le village de Saint-Loup. Tandis que l'attention de Guy Lefranc est attiré par les sommets, où se trouve la sordide résolution de l'énigme, celle des habitant effrayés est axée sur leur héros, qu'ils regardent à travers les vitres fermées, encadrées de rideaux de théâtre, comme une métaphore, une mise en abyme de notre lecture de la nouvelle aventure de Lefranc qui s'offre à nous.



Une forêt de symboles



A l'instar de cette représentation interne des lecteurs et du sentiment que doit provoquer sur eux le récit, tout dans cet album est symbole.
Le Loup est symbole de violence, pour épouser la silhouette de la menace mais aussi de vengeance pour accompagner la fin de la narration.
De même, la focale axée sur le haut de la montagne, où tout est blanc et neiges éternelles, souvenirs du temps jadis et amnésie se verra substituer la chute mortelle d'un des personnages de l'histoire lorsque la vérité, sortie du puits, redescendra jusqu'au village.


Une symbolique qui se nourrit aussi des topoï de contes de fées et de contes célèbres tels que Hansel et Gretel, Le Petit Chaperon Rouge ou encore Le Joueur de flûte de Hamelin pour mieux jouer avec le lecteur. Sans oublier Faust et Le Chien des Baskerville !
Mais attention: les coupables ne sont pas forcément ceux que l'on croit et, lorsqu'ils le sont, ils ont de bonnes raisons de l'être. L'album est entrelacs de fausses pistes s'achevant sur un splendide ascenseur émotionnel baigné dans une ambiance fantastique plutôt jouissive !



Le Coup de gueule (du loup)



Une ombre cependant à ce tableau.
On pourrait se poser la question du choix du symbole du loup par les terroristes mais le nom de village visé suffirait à répondre.


Non, le hic viendrait plutôt d'une scène où le comportement de Guy Lefranc, encore qu'explicable par l'excitation qui le fait se mouvoir, est du dernier ridicule.


Fouinant aux abords de l'église du village de nuit, il voit s'enfuir hors de la tour à la cloche une silhouette apparemment pressée. Dilemme: poursuivre l'inconnue ou aller inspecter la tour. Lefranc décide d'inspecter la tour et est surpris par le sonneur de cloche. Et, là, ça dérape ! Au lieu d'expliquer sa présence, Lefranc ment, se confond en excuse, stoppe nette sa démarche d'investigation inachevée et ... décide de tenter vainement de retrouver la silhouette qui, on s'en doute, a forcément réussi à s'évanouir dans la nuit. C e qui a pour conséquence de le faire assisté impuissant, revenu bredouille de sa poursuite insensée, à l'explosion plus que prévisible de la tour !
Un passage bien grotesque dans un récit pourtant si maîtrisé dans tous ses autres fils ...


Le Repaire du loup tranche donc avec l'horizon d'attente posé par La Grande Menace, L'Ouragan de feu et Le Mystère Borg pour créer une atmosphère plus fantastique et intimiste voisinant avec les contes de fées.
L'album a quelque chose d'holmésien, oscillant entre crimes étranges et secret tragique, qui, loin d'être désagréable, aurait tendance à rendre la lecture plus enjouée que celle plus savante mais parfois plus assommante de perfection des albums initiaux.
Un album tout désigné pour qui voudrait enter dans la série mais hésiterait à le faire par crainte du verbe à foison et de la longueur de l'intrigue.

Frenhofer
9
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le 30 nov. 2018

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Frenhofer

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