Les géniaux Morris et Goscinny nous ont quittés il y a déjà bien longtemps: le premier en 2001, le second en 1977. Et pourtant, malgré le décès de ses deux pères spirituels (dans les deux sens du terme), Lucky Luke continue encore et toujours à vivre de nouvelles aventures, comme si de rien n’était. Les différents auteurs ayant succédé à Morris et Goscinny respectent effectivement à la lettre les codes graphiques et scénaristiques de la série, permettant ainsi au cow-boy qui tire plus vite que son ombre et à son fidèle Jolly Jumper de continuer à veiller sur le Far West, comme ils le font sans relâche depuis 1946. Parmi ces auteurs, on retrouve Laurent Gerra. Avec « Les tontons Dalton », qui vient de sortir en librairie, le célèbre humoriste et imitateur français signe son quatrième Lucky Luke, après « La Belle Province », « La corde au cou » et « L’homme de Washington ». Cette fois-ci, Gerra n’est pas seul à signer le scénario puisqu’il s’est associé au journaliste et écrivain Jacques Pessis. Quant au dessin, il est une nouvelle fois assuré par Achdé, qui imite le trait de Morris à la perfection. Dans « Les tontons Dalton », les quatre frères les plus célèbres de la bande dessinée se retrouvent dans une situation assez inhabituelle pour eux puisqu’ils sont chargés momentanément de l’éducation de leur neveu âgé de 10 ans: le colérique et très gourmand Junior Dalton. Ce dernier n’est autre que le fils d’Emmett Dalton, l’un des quatre « vrais » Dalton (ceux qui ont inspiré Morris pour l’album « Hors-la-loi », sorti en 1954), c’est-à-dire les cousins de Joe, Jack, William et Averell, qui étaient bien plus méchants et sanguinaires et qui, surtout, ont réellement existé. Comme on pouvait s’en douter, Lucky Luke est lui aussi appelé en renfort pour aider les Dalton à veiller sur l’insupportable Junior. Et le moins qu’on puisse dire est que l’arrivée de tout ce petit monde n’est pas vu d’un bon oeil par les habitants fortunés de Rupin City, qui craignent de voir leur tranquillité perturbée par ces visiteurs à la réputation sulfureuse… La principale trouvaille de ce nouvel album est un croisement inattendu entre l’univers de Lucky Luke et celui du film « Les tontons flingueurs », qui vient de fêter ses 50 ans. A cette occasion, Gerra et Pessis choisissent de rendre hommage au film de Georges Lautner et Michel Audiard, en truffant « Les tontons Dalton » de références à ce classique du cinéma français, que ce soit via des répliques célèbres (« Touche pas au frichti, Coyote! ») ou via des personnages qui ressemblent comme deux gouttes d’eau à Lino Ventura, Bernard Blier, Francis Blanche ou Robert Dalban, quelques-unes des acteurs inoubliables que l’on retrouve dans « Les tontons flingueurs ». Mais est-ce que ces références seront comprises par les lecteurs d’aujourd’hui? On peut en douter, même s’il ne faut pas avoir vu le film pour lire la BD. Au final, « Les tontons Dalton » s’avère être un Lucky Luke de facture très classique, avec quelques bonnes trouvailles scénaristiques et un dessin d’excellente qualité, mais malheureusement, l’histoire ne décolle jamais véritablement. Certes, on sourit à la lecture de certains gags, mais on ne rit jamais franchement. Parfois même, on s’ennuie un peu. Rien à faire: il manque à Gerra, Pessis et Achdé cette petite touche de génie qui transformerait une bonne histoire en un album qui reste dans les mémoires et que l’on prend plaisir à relire. Tous les ingrédients sont là, mais la sauce ne prend pas tout à fait… N’est pas Morris ou Goscinny qui veut!
matvano
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le 29 oct. 2014

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