Ce tome fait suite à Dept. H (Tome 1): Meurtre en grande profondeur (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant. Il s'agit d'une histoire complète indépendante de tout autre en 4 tomes (24 épisodes). Celui-ci contient les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2016/2017, écrits, dessinés et encrés par Matt Kindt, avec une mise en couleurs réalisée par Sharlene Kindt. Il se termine avec des pages d'études graphiques sur la tenue de plongée pour grande profondeur (H-2 Deep Dive Suit), la pieuvre colossale, le scaphandre modèle Sardine, la créature des profondeurs Mime de Mer, le casque de scaphandre, la méduse psychique, une interview du philanthrope Blake Mortimer, une couverture alternative de Matt Kindt et une autre de Jeff Lemire.


Après les différents actes de sabotage de la station sous-marine, les membres s'en trouvent séparés. Mia Hardy est avec Roger qui essaye d'évaluer l'étendue des dégâts. Alors qu'il consulte les différents écrans de contrôle, il se produit une coupure de courant dans la pièce où ils se trouvent. Mia Hardy et Roger s'assoient sur le bord d'une console et commence à attendre. Mia active plusieurs bâton lumineux vert fluo pour lutter contre l'obscurité. Elle entame la discussion avec Roger : quelqu'un a tué son père dans cette base sous-marine, et quelqu'un la sabote dans les grandes largeurs. Elle pense que tous les membres de l'équipe ont participé à la mort de son père. Elle ne rêve que d'une chose : prendre un sous-marin et les laisser mourir sur place. Elle pense qu'aucun d'entre eux ne méritait de travailler dans cette base sous-marine. Elle demande à Roger de la convaincre du contraire. Roger décide de lui parler d'Aaron qui fut un des étudiants d'Hari Hardy, le père de Mia. Alors qu'il évoque l'historique de la relation entre Aaron et Hari Hardy, Aaron se trouve dans une autre partie de la base sous-marine, avec Jerome le biologiste qui n'a plus toute sa tête. Aaron indique à Jerome qu'il a lu son carnet privé et qu'il sait que Jerome a trouvé quelque chose au cours de ses recherches. Jerome se gratte les croûtes sur l'avant-bras gauche, puis se lève et invite Aaron à le suivre. Ils se rendent dans le laboratoire de Jerome, et celui-ci prend une méduse qui se trouve dans un aquarium. Il s'en sert pour frapper violemment Aaron à la tête, en lui disant qu'il vient de le contaminer. Aaron reprendre ses esprits, se redresse et poursuit Jerome qui s'est rendu dans une autre pièce de son laboratoire. Aaron découvre ce que Jerome tenait secret.


Roger et Mia Hardy ont constaté que l'eau monte dans leur local et ils savent qu'ils sont tributaires de l'aide que pourront leur apporter les autres, sous réserve de rétablir une communication entre eux. Il parvient à contacter Bob et lui indique qu'il leur reste environ une demi-heure d'oxygène. Bob se trouve avec Raj Hardy, encore un peu mal en point. Il l'aide à se mettre debout et lui demande de le suivre. Il va essayer de trouver comment vider de son eau, la pièce où se trouvent Mia & Roger. Le cheminement s'avère ardu car des débris bloquent plusieurs sas. Raj estime qu'ils ne peuvent rien faire. Bob lui répond que c'est une réponse de scientifique, ce qu'est Raj, mais que lui pense en tacticien et qu'il a une idée en tête. Avec de l'eau arrivant presqu'aux épaules, Mia se souvient que Bob est le spécialiste également en armement et en explosifs. Il est tout désigné pour être le saboteur de l'installation. Roger lui raconte la première fois qu'il a rencontré Bob : celui-ci était couvert de sang, il y avait des morts tout autour de lui, et ça se passait dans la jungle du Belize, dans un endroit appelé Trou Vert (Green Hole). Ce fut le début de la relation professionnelle entre Hari Hardy et Bob, ancien Navy Seal.


Le lecteur se replonge dans cette histoire très curieux de découvrir qui a assassiné Hari Hardy et pour quel motif, et qui a saboté le complexe sous-marin en grande profondeur et pour quelle raison. Matt Kindt continue de dérouler son intrigue à sa manière qui peut être un peu déroutante. Dans ces épisodes, il n'est plus question de la période de la vie du professeur Hardy quand il était responsable d'une équipe de scientifiques à bord d'une station spatiale. Par contre, le lecteur découvre l'une de ses premières expéditions dans la jungle du Belize. Alors qu'il avait supposé que la mention d'une pandémie à la surface fût un élément mineur de l'intrigue, il en est à nouveau fait mention avec une importance capitale pour deux membres de l'équipe. Alors qu'il pouvait penser que Mia Hardy allait commencer à procéder à des déductions sur la base des indices qu'elle a observés, elle semble ne pas s'en préoccuper de cette manière. Le scénariste joue habilement sur les attentes implicites du lecteur, en les déjouant, et en lui proposant quelque chose de plus original. Ce dernier se souvient que Matt Kindt est un fin connaisseur des ressorts des différents types de roman policier, les ayant mis en œuvre dans Du sang sur les mains (2013).


Les actes de sabotage commis à la fin du tome précédent ont fortement compromis l'intégrité du complexe sous-marin, et disséminés les 8 membres dans des endroits séparés par des sas et des décombres : Roger & Mia, Aaron & Jerome, Bob & Raj, Lily & Q. Avec ses dessins à l'apparence toujours plus esquissée que peaufinée, presque réalisés sur le vif, Matt Kindt donne à voir cette installation sous-marine de grande ampleur. Il commence par un rappel : une vue générale de l'extérieur (déjà présente dans le tome 1) qui permet au lecteur de positionner chaque duo de personnages et comprendre les déplacements qu'ils doivent faire pour se rejoindre. Dans le tome 1, le lecteur avait pu constater que les coursives sont relativement spacieuses, deux fois plus larges que celles d'un sous-marin. L'artiste ne joue donc pas sur la sensation de claustrophobie. Pour autant, il montre bien l'eau monter dans la salle où se tiennent Mia et Roger, et Sharlene Kindt ajoute une très belle couleur verte, pas tout à fluo, du fait de l'utilisation de bâton de lumière par Mia. Aaron et Jerome évoluent dans des zones non détruites, mais avec de l'eau jusqu'au genou, et le lecteur finit par sentir l'humidité le gagner, peut-être même un peu froide. Raj et Bob évoluent dans une autre partie de la base, avec plus de câbles et de gains, ainsi que plus de grosses conduites et de débris en travers des salles qu'ils souhaitent traverser. Le lecteur se rend compte qu'il retient son souffle quand ils doivent se déplacer dans des conduits étroits immergés, même s'ils portent leur combinaison de plongée, car elle semble très fragile. La situation de Q. et de Lily est également différente : ils se trouvent dans la salle des générateurs, immense, une vaste installation industrielle. À nouveau, le lecteur est surpris que ce qui ressemble à de simples esquisses rendent aussi bien compte des machines, des volumes, des passerelles et des cheminements sécurisés. Roger évoquant le passé de chaque membre, l'histoire s'aventure dans la jungle de Belize, et c'est un enchantement. D'une part, le lecteur sort du lieu confiné et fini qu'est le complexe sous-marin ; d'autre part les caractéristiques des dessins et la mise en couleurs font des merveilles pour évoquer la végétation et les animaux, ainsi que le grand espace ouvert donnant sur un cratère inondé, laissant supposer l'existence de magnifiques grottes sous-marines telles qu'on en trouve au Mexique ou au Belize.


La narration visuelle de Matt Kindt et Sharlene Kindt repose sur une direction d'acteurs de type naturaliste, l'apparence croquée sur le vif les rendant très naturels. Les visages ont également très expressifs, avec des états d'esprit et des émotions nuancées et adultes. Même s'il peut éprouver un manque d'appétence pour l'impression donnée par les dessins, le lecteur se laisse vite emmener par la narration visuelle, oubliant ses a priori au bout de quelques pages. Il comprend vite que Mia Hardy poursuit son enquête mais sous une forme très différente que celle de se déplacer et d'interroger les suspects ou de chercher des indices matériels, puisqu'elle est bloquée avec Roger dans une salle où l'eau monte. Le scénariste déroule concomitamment deux fils narratifs : le lecteur voit un duo de personnages tout faire pour se tirer de la partie du complexe sous-marin dans laquelle ils sont coincés, tout en dialoguant pour trouver des idées et évaluer leurs chances de réussite, et dans le même temps, Roger raconte à Mia, comment l'un de ces personnages (ou les deux) a rencontré son père, leur implication et leur façon de fonctionner sur le plan professionnel et relationnel. Il devient évident que l'enquête sur le coupable ne va pas se contenter de chercher des indices matériels : elle comprend également un volet psychologique. Dans la mesure où il est systématisé sur 4 épisodes, le procédé a un aspect un peu artificiel. Mais, effectivement, les personnages s'incarnent plus aux yeux du lecteur, et en miroir se dessine le portrait de Hari Hardy, ce scientifique explorateur que tant de monde était prêt à suivre.


Avec ce deuxième tome, Matt Kindt continue de raconter son histoire, dans la droite continuité du premier, mais pas dans la direction que pouvait présupposer le lecteur. Ses dessins provoquent toujours une aussi bonne immersion dans le complexe sous-marin, avec de l'eau minimum jusqu'au genou, le lecteur finissant par se demander comment il va faire sécher tout ça, avec une mise en couleurs parfaitement en phase. Le lecteur apprend à un peu mieux connaitre les différents suspects qui deviennent de plus en plus innocents, ou en tout cas dépourvus de motifs pour commettre un assassinat sur leur mentor, leur modèle. L'intrigue gagne également en épaisseur avec la menace de la pandémie, et avec le mystérieux plongeur fantôme.

Presence
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le 28 mai 2020

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