Selon la légende sioux, un grand mât de bois soutient notre monde, au-dessus de l’abîme. Et à chaque péché de l’Homme, le Grand-Père Castor ronge un peu plus le mât, précipitant notre monde vers sa chute. Lorsque l’Homme aura trop péché, notre civilisation sera condamnée. Pour les membres de la réserve de Prairie, ce moment est arrivé. L’agent Dashiell Bad Horse tient enfin les éléments qui permettront au FBI de faire tomber Red Crow : le témoin d’un meurtre de sang-froid perpétré par le chef de la réserve.

Scalped, c’est sans aucun doute un des meilleurs titres édité par Urban Comics. Toujours autant noir, autant polar, autant hardboiled. Dans ce tome, Jason Aaron abandonne un temps sa narration entrecoupée d’allers-retours dans le passé des personnages, pour un récit un poil plus linéaire qu’à son habitude. Un tome plus glauque que les derniers, avec des meurtres dus à la vengeance en plein jour, des personnages toujours dépeints avec le même désespoir, des figurants plus que passagers, et surtout, surtout une très grosse dose de suspense.

Le tome 5 se refermait sur un semblant de début d’étincelles d’espoir. On se disait « enfin tout va changer à Prairie Rose ». Alors avions-nous raison d’espérer un peu de mieux pour la réserve ; Jason Aaron va-t-il effectivement améliorer la situation pour nos héros indiens ? J’ai de gros doutes, surtout au vue du titre de ce tome 6 : « Rongé jusqu’à l’os ».

Tout d’abord, un mot sur R.M. Guéra, ses dessins ont gagné en force, en profondeur des traits, en expressions des visages, en tout. Ce tome 6 marque vraiment un tournant dans ses planches, renforçant encore davantage la noirceur que nous raconte Jason Aaron.

Bon et bien vous l’aurez compris, tout espoir vole en éclat. Red Crow est au courant qu’il y a une taupe parmi ses proches et il compte bien régler le problème. Le seul bon point pour Dashiell, c’est que c’est à lui que le grand chef va donner l’ordre de trouver le traitre. Bref, de se trouver. A côté de ça, Nitz arrive à la réserve, mis au courant par ce même Dashiell, qu’il y a enfin matière en arrêter Red Crow. Et quelle matière, il faut bien avouer que Red Crow c’est carrément lâché. Il devait évacuer la pression et c’est bien regrettable pour celui qui se trouvait en travers de sa route. Comme si l’intensité n’était pas assez haute, le seul témoin de ce que Red Crow a fait, est l’un des dealers de Dashiell. Le témoin menace l’agent infiltré de dénoncé son penchant pour la drogue s’il ne l’aide pas à s’enfouir !

Suspense ! C’est le mot qu’il faut retenir pour ce tome. On est littéralement pris à la gorge dès le premier chapitre, et l’étreinte ne se relâche que longtemps après avoir refermé ce tome. Pour la première fois, Dashiell est en danger, de tous les côtés. Nitz ou Red Crow, les deux sont à proches de lui tomber dessus, et la fin du héros serait alors assez douloureuse à mon avis. Jason Aaron arrive à installer une véritable tension tout au long de notre lecture. Poussant petit à petit Dashiell dans ses derniers retranchements. Le pauvre va se retrouver au bord du précipice où le seul choix qui lui reste sera de se faire tuer ou de tuer. Et à cette question la réponse va faire grimper la violence trois, quatre crans.

La tension dramatique de cette lutte acharnée de Dashiell pour rester en vie tout au long de cette histoire occulte presque le reste. En plus de tout cela, ce tome 6 voit également Red Crow mettre fin de forte belle manière à la menace des Hmong et Carol mettre fin à sa relation avec Dashiell, ce qui ne peut être que bénéfique pour ce dernier, tellement cette histoire était malsaine de par sa nature. Rajoutons à cela, sans doute, un nouveau meurtre pour l’assassin de Gina et l’on obtient un tome à 1000 à l’heure. On se rend compte que ça ne s’arrête pas du début à la fin. D’où ce sentiment d’être littéralement pris à la gorge. Jason Aaron excelle et arrive à nous faire aimer davantage son histoire tome après tome. Là où certaines séries laissent place à un peu de monotonie dans la longueur, Scalped gagne en qualité et en intensité.

Alors on se dit après tout ça, car vous l’aurez compris, Dashiell ne mourra pas dans ce tome, mais la façon dont il survit va le marquer profondément je pense, on se dit donc et bien oui il y a un espoir, un espoir pour Dashiell, d’ailleurs lui-même le crois au début, lui-même se met à imaginer le meilleur pour le futur. Voir un espoir pour Prairie Rose. Mais il va suffire d’une phrase, d’une phrase et de la dernière page du tome pour que Jason Aaron fasse tout voler en éclat. Comme une façon de nous dire « Hey, on est à Prairie Rose, ne l’oubliez pas ! »

Bref ce tome est un petit bijou, graphiquement sublime, scénaristiquement parfait. Jason Aaron réalise un sans faute sur ce volume 6. Un rythme haletant et d’une intensité frénétique, merveilleusement mise en image par R.M. Guéra. Beaucoup d’action, de suspense et de rebondissement. Ce tome 6 de Scalped c’est la définition même du polar noir !
Romain_Bouvet
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le 18 janv. 2014

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Romain Bouvet

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