Enfer éthéré

De Sandman, je ne connaissais que le premier volume. C’est donc avec gourmandise et délectation que je lis la suite. Si l’ensemble est d’une excellente qualité, je préfère m’attarder sur les histoires les plus remarquables.

• L’effet marchand de sable

Petite aparté. Après avoir fini la BD, j’ai lu les (très) nombreux bonus de ce volume. Les lisant généralement le soir, je me suis souvent endormi sur les pages. Le marchand de sable m’a touché aussi. Et quand un volume d’un tel… volume vous tombe des mains, le réveil est étrange.
Outre ce pouvoir du Sandman qui traverse les pages, je ne peux m’empêcher de penser que ces bonus sont à la fois extrêmement intéressants et terriblement ennuyeux.

• Calliope : La création du viol

L’expression « accoucher d’une idée » prend ici un sens terrible. Après chaque viol, la muse Calliope enfante les créatures illégitimes et violentes d’un auteur stérile. Par cupidité et lâcheté, les violeurs ne brisent pas que son corps, mais aussi sa magie, son essence.
Un terrible avertissement, sorte de mise en abyme au sombre reflet de Neil Gaiman sur le processus de création.

• Le songe d’une nuit d’été

Une histoire fascinante, d’une grande culture et d’une intelligence rare. Mon principal regret est de ne pas avoir lu (et encore moins vu) la pièce de Shakespeare. J’ai trop bien compris en lisant que je ne saisissais pas tous les nuances et l’habileté de ce récit où Gaiman joue du théâtre dans le théâtre avec délectation, arrivant à intégrer sa propre création, ou créature, comme impulsion créative de l’œuvre de Shakespeare. Malicieux, audacieux, osé.
Mais je suis reconnaissant de cette édition qui offre le scénario d’origine de l’épisode. Les nombreuses annotations de l’auteur offrent des outils de compréhension.
Je reviendrai surement sur cette histoire après avoir lu la pièce.

• La saison des brumes - chap. 2

Le chapitre qui m’a le plus surpris. Alors que l’on s’attend à un combat épique, Gaiman conduit à un pied de nez à l’issue d’une mise en tension et un suspens menés de main de maître. Et le comble, cela paraît logique. L’empathie avec le Sandman est à son comble, car la surprise et l’incompréhension sont partagées.
Cet épisode est un pur plaisir où l’on est joué de la malice du diable. Une douce torture inattendue.

• La saison des brumes - chap. 3 & 5 : Une négociation d’enfer

La négociation de la clé de l’enfer est aussi un beau morceau de tensions et de surprises. Les invités sont en soi un délice. Certains préfigurant même American gods.
Nous ne sommes presque plus dans le fantastique, mais dans la politique. Un véritable jeu de cour, avec ses courtisans et ses comploteurs. Avec un dénouement qu’on ne saurait deviner. Et Gaiman nous piège de nouveau avec un Deus ex machina des plus malicieux.