Shangri-la a clairement de quoi attirer l'oeil à première vue avec une superbe couverture d'un homme dans l'espace et une édition cartonnée grand format de 222 pages pour une somme finalement dérisoire au vu du contenu proposé.
Je ne connaissais absolument pas l'auteur-dessinateur Mathieu Bablet, c'est donc une véritable découverte qui mérite d'être approfondie puisque Shangri-la possède vraiment de bien belles qualités. A travers un récit mêlant science-fiction et critique de notre époque moderne, l'auteur nous emmène dans un voyage sur une station spatiale où vit désormais ce qu'il reste de l'humanité, la Terre ayant été rendue inhabitable par les prédécesseurs de ces habitants de l'espace.
Critique acerbe de notre société car cela n'hésite absolument pas à remettre en cause notre modèle de consommation, nous détournant certainement des réelles valeurs que l'humain pourrait avoir. Le capitalisme et la société de consommation y sont dépeints comme une dictature douce, où l'on dit gentiment à la personne - au consommateur - ce qu'il doit faire et penser. Le scénario évoque également d'autres choses, comme les expériences sur les animaux. Au vu de notre société actuelle, le constat est plutôt juste, n'en déplaise à certains. L'auteur ne s'arrête pas là et propose une enquête sur les sphère du pouvoir mais également un récit qui joue sur l'espace-temps et légère sur une part métaphysique (le début, la fin).
Les dessins sont également magnifiques teintés généralement d'orange. Les détails sont légions. Et certaines planches sont tout bonnement magnifiques, marquant les esprits et en mettant plein les yeux au lecteur.
Deux reproches néanmoins sont à faire à Bablet. Le premier concerne justement les dessins. Cette teinte orange a parfois le don de gâcher certains détails ou certains dessins de manière plus générale, rendant par moment la lecture un peu plus compliquée.
Le second point concerne le scénario: celui-ci manque clairement de finesse par moment, même si on ne peut une fois encore reprocher le bilan fait par l'auteur. De finesse car pour exprimer son point de vue, l'auteur y va avec des gros sabots, se démarquant à peine justement de certains produits de maintenant, les références sont trop grosses. Le revirement de situation du personnage principal semble également sorti de nul part.
Bref, un dessinateur quasiment confirmé et un auteur aux bonnes idées mais qui doivent encore être mieux traitées. Shangri-la marquera néanmoins le lecteur par son propos intéressant et certains passages très forts mais aussi par certaines planches tout simplement magnifiques, répétons-le.