Faites monter la bière et les sandwichs !

Probable résultat de l’improbable accouplement entre les films de Georges Lautner et un bouquin d’histoire, ce premier tome des Mystères de la Cinquième République est en fait un polar noir sur fond de Guerre d’Algérie. Malgré sa quatrième de couverture racoleuse qui nous promet des révélations sensass’, cette BD se contente de montrer que certains Français soutenaient le FLN, notamment dans les milieux intellectuels. Ce qui n’est pas vraiment une révélation ...

Mais ici, ce qui attire l’œil, c’est la forme : traits épais, dessins contrastés, jeux d’ombres et graphismes expressifs, bienvenue dans l’univers des enquêtes noires sur des affaires pas très claires. Dommage que François Ravard s’emmêle les pinceaux et se trompe parfois dans les variations d’ombres d’une vignette à l’autre (page 17). Malgré ces petites erreurs, le trait reste un bel hommage aux films policiers âpres des années 1960, de ceux qui avaient souvent Jean Gabin dans le rôle-titre (Le Pacha, ...).

Hommage oblige, le scénario reprend lui aussi les ficelles du cinéma de ces années-là : une histoire d’amour et une intrigue policière, apparemment sans lien aucun entre l’une et l’autre, mais qui finissent évidemment par se rejoindre ... sans grande surprise. Ajoutez à cela une certaine confusion dans le développement de l’intrigue, Philippe Richelle promène brutalement ses lecteurs d’une ville à l’autre (Rouen, Orléans, Paris ...). Sans compter que trois des personnages principaux sont des bruns moustachus aux cheveux mi-longs, ce qui ne simplifie rien !

Enfin, la morale de l’histoire est maigre. L’affrontement entre partisans et opposants à la guerre aurait pu être mieux brossé, d’autant que tous les personnages étaient là (la DST, les français partisans du FLN, les miliciens démobilisés, l’Eglise) : il aurait fallu trancher un peu dans le polar graphique mais sans surprise, pour injecter un peu plus de matière dans l’intrigue.

Ce premier tome reste un bel hommage aux commissaires du cinoche des années 1960.