« Voyage » est le sixième tome de « Weëna ». Cette série est née il y a une petite dizaine d'années et depuis a vu naitre régulièrement les différents opus qui nous content son histoire. Celui que j'évoque dans ma critique d'aujourd'hui date de presque trois ans. Il est édité chez Delcourt, se compose d'une petite cinquantaine de pages et coûte environ quatorze euros. Il est toujours scénarisé par Eric Corbeyran qui possède déjà à son actif des sagas à succès telles que « Le chant des stryges », « Uchronies » ou « Château Bordeaux ». Je suis un adepte de ses univers et reste impressionné par sa productivité. Les dessins sont l'œuvre d'Alice Picard que j'ai appris à apprécier à travers mon immersion dans « Weëna ». La couverture nous présente deux des personnages centraux de l'histoire, Weëna et Morckoor. Ils semblent voyager ensemble du fait de la présence de deux chevaux à leurs côtés. Une telle illustration aurait été imprévisible au début de la saga tant leurs intérêts apparaissaient on ne peut plus divergents. Mais la richesse de ce type d'histoire est en partie de nous montrer que rien n'est jamais figé...

La quatrième de couverture nous offre un point dans l'intrigue : « Accompagné d'Opéra, Weëna s'engage sur la route de Nym-Bruyn, désireuse d'y trouver les réponses au mystère de ses origines. Mais grâce à ses pouvoirs magiques, Haggral sait qu'elle a survécu et se lance à sa poursuite, bien décidé à conclure la cérémonie de mariage avec le prince Morckoor. Celui-ci, éprouvé par le parasite qui lui ronge le corps, trouve en Miureal un peu de réconfort et l'espoir de rompre enfin le sort qui le lit au sorcier... »

Cette série est maintenant bien avancée. Bien des événements se sont déroulées depuis notre rencontre avec Weëna lors de sa naissance qui marque les premières pages du tome initial. Les cinq premiers tomes montraient une constance dans la qualité que j'espérais voir poursuivie dans ce nouvel opus. L'histoire apparaissait classique par les codes qu'elle utilisait mais suffisamment bien construite pour qu'on soit curieux d'en connaitre l'issue. Les dernières aventures montraient que la trame quittait un petit peu les sentiers battus de la fantasy et arrivait à faire évoluer les personnages de manière progressive. Tout cela se déroulait sans aucun succès. C'était donc avec un intérêt certain que je me suis plongé dans « Voyage ».

Le cinquième avait déplacé les lignes. Jusqu'alors la narration dissociait plus ou moins clairement trois groupes. Le premier était formé de Weëna et Opéra, deux jeunes filles en cavale. Le deuxième était composé de Morckoor et Haggral, respectivement prince et sorcier et poursuivant sans repos les deux demoiselles précédemment évoquées. Enfin, le troisième duo réunissait deux personnes liées à Weëna. Miureal était sa nourrice et Gwylym, son meilleur ami. Lorsque le tome précédent s'est terminé. Les deux derniers étaient séparés et Miureal avait retrouvé Morckoor. Pour la première fois, le fil conducteur apparaissait moins rectiligne. Ce n'était pas pour me déplaire car on voyait les repères modifier et la lecture ainsi plus captivante. Ce sixième album continue ce processus en faisant évoluer la proximité des personnages. Mais cette transformation n'est pas uniquement géographique. Elle influe également sur le statut de chacun. La frontière entre les gentils et les méchants n'est plus aussi nette. Notre vision des protagonistes évoluent de manière surprenante. De plus, à la manière de ce qu'il avait fait dans le précédent opus avec le personnage Miureal, le scénariste, en utilisant un flashback, nous fait découvrir davantage un des personnages principaux. Cela offre ainsi une intrigue dense qui ne souffre d'aucun temps mort. Les adeptes de la maladresse et de la gaucherie de Gwylym regretteront sûrement que ses aventures apparaissent comme secondaires. Mais à n'en pas douter, il reviendra dans la lumière par la suite.

La densité narrative est bien mise en valeur par les dessins d'Alice Picard. Cette dernière arrive facilement à varier les ambiances au fur à mesure des voyages. De la même manière, les flashbacks se dissocient de l'intrigue principale grâce à la dessinatrice. De plus, la présence de chaque personnage génère une atmosphère et des sentiments différents. La douceur de Weëna par exemple se démarque de l'angoisse née de la présence de Haggral. Le trait du dessin participe activement à cette variation et nous implique ainsi plus intensément dans l'histoire.

En conclusion, « Voyage » est un ouvrage réussi. Il s'adresse évidemment uniquement aux lecteurs des précédents opus tant les prérequis sont indispensables. Il confirme la qualité de la série qui contrairement à beaucoup du genre ne dilue pas son propos pour faire durer le plaisir. De plus, au fur et à mesure que je découvre les albums, je trouve que « Weëna » possède une identité propre bien que la lecture des premiers tomes dégageait un certain classicisme dans la « fantasy ». Les auteurs ne tombent dans aucun excès du genre et c'est peut-être là que réside le sentiment de qualité et de plaisir qui s'en dégage. Je ne peux donc vous conseiller cette lecture qui conviendra aux adeptes du genre. Je trouve que c'est une saga respectueuse de son lecteur et ce n'est déjà pas si mal. Il ne me reste plus qu'à me plonger dans le septième tome intitulé « Destination ». Mais cela est une autre histoire...

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Eric17
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Créée

le 1 mai 2012

Modifiée

le 17 août 2012

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