En plongeant dans le premier tome d’American Gods, cadeau résultant d’une formidable rencontre et d’une très belle surprise, je ne savais pas grand-chose. Premièrement, j’avais très envie de le lire. Deuxièmement, c’est écrit par le grand, l’immense Neil Gaiman. Troisièmement, j’ai littéralement craqué sur la bande-annonce de la série d’Amazon Prime, surtout avec ce bison blanc aux yeux enflammés ! Bon le troisièmement n’apporte pas grand-chose à mon introduction, mais j’avais envie de placer ce bison blanc aux yeux enflammés.


« Voici les dieux dont personne ne se souvient. Même leurs noms sont perdues. Quand les dieux meurent, nul ne les pleure ni ne se les rappelle. Il est difficile de tuer une idée qu’un être vivant, mais ce n’est pas pour autant impossible. »
« Ombre avait fait trois ans de prison. Comme il était plutôt costaud et avait l’air d’un dur à cuire, son plus gros problème était de trouver à s’occuper. »
(Contient les épisodes American Gods : Shadows #1 à 9)


Notre héros s’appelle Ombre. Cela fait quatre ans qu’il est en prison, pour coups et blessures. Détenu exemplaire, à la carrure imposante, Ombre attend avec impatience sa libération anticipée. Cela est pour dans quelques jours. Un bain bien chaud et mousseux, un peignoir douillet et des pantoufles, il prendrait ensuite sa femme Laura dans ses bras avant de s’enfermer dans la chambre avec elle pour rattraper tout ce temps perdu ! Peut-être un pizza après ça.


Alors qu’il lui reste moins d’une semaine de prison, ce délai est encore raccourci, afin qu’il puisse se rendre à l’enterrement de Laura, sa femme, morte dans un accident de voiture, en compagnie de son meilleur ami. Ombre accuse le coup, et ne parvient pas à réaliser, à commencer son travail de deuil. Tout cela lui semble irréaliste, impossible ! Des sentiments encore accentués lorsqu’il découvre que Laura et Robbie, son meilleur ami, étaient amants !


Ombre, personnage peu expressif, semble spectateur de sa vie, de ce nouveau départ, il glisse sur les événements et se laisse porter par le courant. C’est alors qu’il rencontre, dans l’avion le ramenant chez lui, monsieur Voyageur ! Un homme énigmatique et mystérieux qui semble tout savoir, dans les moindres détails, sur la vie de Ombre ! La prison, la mort de Laura, tout, de plus il tient à lui proposer un emploi.


Comme le ferait n’importe qui, Ombre éconduit poliment cet étrange personnage, mais ne parvient pas à s’en débarrasser. Où qu’il aille, il se retrouve avec ce monsieur Voyageur dans les pattes. Plus il le croise, plus ils discutent ensemble et plus cet homme lui paraît bizarre, nous apparaît étrange. Néanmoins, pour le lecteur, plus monsieur Voyageur se présente, se livre à Ombre, plus on ne peut s’empêcher de faire le lien avec le titre de ce comics.


N’arrivant pas à se débarrasser de ce nouvel « ami », ne parvenant toujours pas à faire le deuil de sa femme, et après avoir fait l’amour avec le « fantôme » de cette dernière, Ombre finit par céder et accepte de suivre Voyageur et son offre d’emploi.


A ses côtés Ombre va rencontrer des personnages hors du commun, totalement originaux, hors norme. Très souvent, à leurs côtés Ombre semble complètement largué. Voyageur et ses « vieux » amis ne font que parler par métaphores, par images, par non dits, à travers des souvenirs qui paraissent bien plus anciens que l’âge de ces personnages. Voir carrément ancestraux, immémoriaux ! Et puis il vit des choses inimaginables, inconcevables, et les doutes ne sont alors plus permis ! Voyageur est un dieu !


Pas Dieu, mais un ancien dieu, Odin pour être précis. Et tous ces compagnons sont également d’anciennes divinités païennes. Quelque chose d’énorme se prépare, et Voyageur a besoin d’Ombre a ses côtés !


Très franchement, je dois bien reconnaître que les débuts sont un peu poussifs. J’ai mis un peu de temps à rentrer dans l’histoire. Mais à partir du moment où l’on comprend de quoi Neil Gaiman veut parler, tout devient alors plus fluide. On plonge dans le récit, dans les récits qui nous sont proposés. Puisqu’à côté de l’intrigue principale, Neil Gaiman, et Craig Russell, qui adapte ce roman, nous présentent la vie d’autres dieux, d’autres créatures fantastiques comme les Djinns ou les Leprechauns. De petites histoires courtes qui viennent ponctuer l’intrigue principale.


Ce récit de Neil Gaiman est, à mon avis, un pamphlet contre les nouvelles technologies. On est tellement accroc à nos téléphones, à nos réseaux sociaux, à nos télévisions que Neil Gaiman associe cette dépendance excessive et néfaste à de nouvelles idoles, à de nouveaux « dieux ». Tous ces vieux dieux, qui se retrouvent « bloqués » aux États-Unis de par l’immigration, les voyages de leurs croyants, de leurs fidèles dans des temps très anciens ont peur d’être définitivement oubliés, et donc de « mourir » de disparaître, se décident à livrer une « guerre » contre ces nouveaux dieux !


L’idée est géniale ! Déjà rien que le fait d’imaginer que ces anciens dieux errent sur les terres où leurs fidèles sont allées. Comme le fait de voir Odin errer aux États-Unis suite au passage des Vikings il y a des centaines d’années. Mais le fait d’opposer ces vestiges du passé à de nouvelles divinités, matérielles, comme toutes ces nouvelles technologies, utiles au quotidien mais qui nous gangrènent malgré nous, c’est juste incroyable. Certes ce ne sont que des objets, mais on y voue, de manière générale, un culte comme à l’époque des dieux païens. Qui ne connaît pas un ami qui croit tout ce qui est dit sur internet, simplement parce que c’est internet. Combien de fois voyons nous en concert ou durant un événement sportif des gens qui regardent l’événement à travers leurs téléphones. Il y a tellement d’exemple.


Graphiquement, c’est très artistique. Je ne connaissais pas du tout Scott Hampton. C’est très épuré, l’artiste se contente du strict minimum, mais cela suffit. Il appui sur les éléments importants, les sublime, va à l’essentiel et capte notre regard avec des approches artistiques très différentes.


Bref, j’avais envie de me jeter dans American Gods, sans trop savoir où j’allais. Après des débuts un peu lents, un peu compliqués, j’ai complètement été happé par les prémices de ce formidable combat qui se prépare entre les anciens dieux païens et les nouveaux immatériels et technologiques. L’idée est géniale, l’écriture l’est encore plus, le développement extraordinaire. Vivement la suite, et je pense me lancer sur le roman.

Romain_Bouvet
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le 21 juil. 2019

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Romain Bouvet

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