Premier volet d’une trilogie de science-fiction, cette bande dessinée constitue une bonne surprise. Très en phase avec notre réalité terrestre actuelle, elle a pour thème central l’extinction de la vie sur notre planète bleue. A l’heure où une poignée de milliardaires à la tête de multinationales sont en train de s’accaparer les ressources et décider du sort de l’humanité, sans concertation et sans égard pour les populations, le sujet du livre, qui évoque cette question, est donc plus que sérieux.


Pour concevoir ce récit, Grégory Jarry s’est inspiré notamment d’un projet évoqué à maintes reprises par les plus rêveurs des scientifiques : un ascenseur spatial entre la Terre et la Lune. Un projet fou repris par la NASA mais dont on ne sait vraiment s’il verra le jour ni sous quelle forme. Quant aux circonstances de sa construction dans le récit, elles étaient liées au projet dément de provoquer l’effondrement de la vie terrestre, prix à payer pour implanter un puissant générateur d’énergie propre et infinie sur la surface lunaire.


C’est ainsi que l’on va suivre la jeune Agafia dans sa mission consistant à terminer ce que son père, décédé accidentellement, avait entrepris : rejoindre la Lune à l’aide de l’ascenseur spatial. Seule sur une terre rongée par les pluies acides, elle communique avec sa mère immergée dans un plasma qui la maintient en vie depuis 500 ans, et on va la voir se déplacer dans un exotérus, un drôle d’engin insectoïde (que l’on voit en couverture). C'est dans celui-ci qu'elle a retrouvé la dépouille de son père et qu'elle utilise désormais pour sa mission.


Quelque peu complexe, le scénario est toutefois intrigant, oscillant à coup de flashbacks entre deux temporalités différentes, ce qui ne fera que renforcer le mystère : mais pour quelle raison les instigateurs du projet (à l’exception de la mère d’Agafia) semblent-ils quasiment tous avoir disparu dans des conditions obscures ? Jarry a développé un univers cohérent en extrapolant les technologies actuelles, avec des personnages bien structurés, même si ce tome ne permet pas d’être encore totalement familiarisé avec eux.


Le trait nerveux et minimaliste de Lucie Castel, plaisant par son côté peu académique, est rehaussé par le travail sur la couleur de Robin Cousin. Les choix chromatiques permettent de poser des ambiances variées. Plus sombres, un rien fluo ou désaturées selon les passages, les tonalités suggèrent une atmosphère artificielle voire menaçante dans ce contexte où la biodiversité a totalement disparu de la planète.


Pour se faire une idée définitive, il faudra sans doute attendre de découvrir la suite (le tome 2 doit paraître fin août), mais force est de reconnaître que les auteurs sont parvenus à nous mettre en appétit et à susciter notre curiosité avec ce premier tome.


LaurentProudhon
7
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le 24 juil. 2025

Critique lue 5 fois

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