Quand les Tuniques Bleues perdent leur mordant, et que l'humour déserte le champ de bataille

Avec Carte blanche pour un bleu, soixantième tome des Tuniques Bleues, Raoul Cauvin et Willy Lambil livrent une aventure qui, hélas, semble avoir laissé la poudre sèche et les idées fraîches au campement. Là où la série brillait autrefois par son mélange d’humour acéré, de satire militaire, et d’action, cet opus donne l’impression d’un canon rouillé peinant à faire feu.


L’intrigue, centrée sur une mission confiée à un jeune bleu maladroit, manque cruellement de souffle. Les péripéties s’enchaînent sans grande surprise, et les ressorts comiques, autrefois si efficaces, tombent à plat. Le scénario donne l’impression de jouer la sécurité, évitant tout risque narratif pour livrer une histoire qui, bien qu’inoffensive, n’a rien de mémorable.


Les personnages, pourtant si emblématiques, peinent à briller. Le sergent Chesterfield, habituellement le moteur comique et parfois même émouvant de la série, semble en pilotage automatique, répétant des gags fatigués. Blutch, de son côté, conserve son esprit sarcastique, mais même ses piques manquent de mordant. Quant au "bleu" du titre, il est trop fade pour capter l’attention ou susciter l’attachement.


Visuellement, Lambil reste fidèle à son style, mais l’énergie semble absente. Les décors, bien qu’efficaces, manquent de détails et d’ambiance, et les scènes d’action, autrefois pleines de dynamisme, manquent ici de punch. Les expressions des personnages, autrefois exagérées et hilarantes, paraissent plus rigides, comme si elles avaient perdu leur exubérance.


Narrativement, le tome souffre d’un rythme maladroit. Les moments censés être drôles tombent à plat, et les rares tentatives d’ajouter de la tension ou de l’émotion échouent à convaincre. Le ton général oscille entre l’ennui poli et le comique forcé, sans jamais retrouver l’équilibre qui faisait la force de la série.


Le plus regrettable est peut-être l’absence de cette satire piquante qui faisait des Tuniques Bleues une série si spéciale. Là où les premiers tomes offraient une critique habile des absurdités militaires et des conflits humains, Carte blanche pour un bleu se contente de livrer une farce superficielle, dépourvue de profondeur ou de pertinence.


En résumé, Carte blanche pour un bleu est un épisode décevant d’une série pourtant légendaire. Avec une intrigue sans éclat, des personnages en demi-teinte, et un humour qui manque de peps, cet album ressemble plus à une patrouille qui tourne en rond qu’à une véritable charge héroïque. Un tome qui donne envie de déserter, en attendant qu’un prochain album rallume l’étincelle des Tuniques Bleues.

CinephageAiguise
4

Créée

le 24 déc. 2024

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