Le précédent tome de Batman, le Chevalier Noir nous avait plongé dans la peur effroyable et terrible entourant le personnage de l’Epouvantail. A travers une histoire très agressive, nous découvrions, avec horreur, le passé de Crane sans pour autant lui pardonner ses actes. C’est au tour d’un nouvel ennemi de faire ses premiers pas dans l’univers New52 face à Batman. Après la peur panique provoquée par l’Epouvantail, place à la folie douce-amère du Chapelier !
Comme pour les précédents volumes, cette série se situe bien en marge de la série-mère de Scott Snyder et Greg Capullo. L’équipe artistique pouvant alors laisser libre court à son imagination pour nous offrir, jusqu’à maintenant, des histoires plus centrées action que réflexion, mais donnant toujours des histoires sans prise de tête, plaisantes à lire.

Si le célèbre détective Batman se dresse aujourd’hui devant une traînée de cadavres, il n’a pour l’instant pas l’ombre d’une piste. Durement mis à l’épreuve, son savoir-faire est doublement entaché lorsque le maniaque commence à kidnapper les habitants de la ville sans aucune raison apparente. Le Chevalier Noir aurait-il finalement trouvé plus rusé – ou plus fou – que lui ? (Contenu : The Dark Knight #16-21 + The Dark Knight Annual #1)

Avant toute chose, commençons par le sujet sensible, par le gros mauvais point pour moi : les dessins ! Et pourtant je suis un fan inconditionnel d’Ethan Van Sciver et de Szymon Kudranski. Tous les deux dans des styles complètement différents. L’un s’éclatant dans le lumineux, les explosions de couleurs, l’autre plus adepte des jeux d’ombre inquiétants. Pourquoi les associer ?? Le passage du chapitre #18 au #19 est extrêmement violent pour les yeux ! Cela en est préjudiciable pour les deux artistes. Le style chaotique et noir de Kudranski après celui d’Ethan Van Sciver, il faut du temps pour s’y habituer ! Et une fois le choc passé on réalise à quel point Ivan Reis n’est pas à sa place sur un titre comme Batman.
Ethan Van Sciver est le genre d’artiste à s’épanouir dans la lumière, dans une effervescence de couleurs ! Le voir œuvrer sur un titre aussi noir, aussi sombre que Batman ne prend absolument pas ! Et je ne sais pas s’il est allé sur ce titre en marche arrière, mais disons que ses dessins ne sont vraiment pas d’une grande finesse. Des problèmes d’anatomie (pauvre Natalya !...), des personnages approximatifs, des cases alternant entre le détaillé et le vide. Bref, Ethan Van Sciver ne nous offre vraiment pas un chef d’œuvre, bien loin de là. Pourtant sa représentation du Chapelier est assez intéressante.
A côté de cela Szymon Kudranski, nous gratifie de deux chapitres, plus annual, absolument jouissifs de par ce qu’ils arrivent à dégager ! Le Chapelier est plus qu’inquiétant, la folie est merveilleusement bien rendue, et le travail de l’artiste sur les ombres et le noir n’a plus à être encensé tant cela est maintenant de notoriété publique ! Même si ses décors restent encore assez pauvres, son travail sur les personnages est tellement fort et riche, qu’on oublie vite ce souci.
Vraiment un très curieux choix de la part de DC Comics, qui dessert totalement le récit. De plus, non seulement on passe de Reis à Kudranski en milieu de saga, mais Ethan Van Sciver revient ensuite pour le dernier chapitre…

Venons-en à l’histoire ! Gotham est à nouveau le théâtre de disparitions. De très, très nombreuses disparitions. Toutes orchestrées par le Chapelier Fou. Le dément décide de faire en sorte, sous forme d’une pièce de théâtre géante et vivante, de revivre encore et encore ce qu’il juge comme étant le plus beau jour de sa vie. Lorsque tout était idyllique. Car on découvre à travers des flashbacks sur son enfance, qu’à l’inverse de l’Epouvantail, l’enfance du petit Jervis Tetch était plutôt agréable. Du moins jusqu’à ce qu’on lui annonce une maladie génétique plutôt handicapante et assez difficile à digérer pour Jervis. D’ailleurs si Crane était une véritable victime, Jervis s’avère être son propre bourreau ! Et si l’enfance de Crane pouvait, et faisait naître une véritable empathie pour le psychopathe, ce n’est absolument pas le cas pour Jervis Tetch. Il est même assez ridicule de le voir sombrer ainsi pour de telles raisons, et plus ridicules encore sont ses motivations dans les enlèvements actuels à Gotham.

Parallèlement à la quête du Chapelier et à son face-à-face avec Batman, l’aspect Bruce Wayne est assez bien travaillé par Gregg Hurwitz, et franchement cela est plutôt navrant et risible. Lui faire prendre de telles décisions (vis-à-vis de son rôle de Batman) avec un personnage aussi creux et sorti de nulle part que cette pianiste ukrainienne, ce n’est tellement pas crédible. Et je crois que d’essayer de raccrocher cette envie à la disparition de Damian afin de la justifier est encore pire que tout ! Le pire étant la façon dont l’auteur balaie tout ça au final…

Beaucoup de violence dans ce tome, pas toujours justifiée, même si elle est l’œuvre d’un dément comme le Chapelier ! Et elle est paraît encore plus gratuite lorsqu’elle mise en image par Reis ! Comment ne pas être mal à l’aise lorsqu’on voit Jervis recouvert de sang, un fer à repasser à la main ? Alors qu’on l’est, étrangement, moins lorsque Kudranski nous montre des pêcheurs découvrir plusieurs centaines de cadavres dans la baie de Gotham. Sans doute grâce à son style plu sombre, plus abstrait.

Et si la violence est parfois dérangeante, que dire de l’humour qu’Hurwitz essaie, très maladroitement, d’inculquer à Batman. Cela met mal à l’aise tellement c’est nul et mal amené, ne collant tellement pas au personnage. Le summum étant sans doute la triste scène entre Batman et Gordon… Pourquoi essayer ce genre de chose ? Cela n’apporte rien, surtout que Batman est censé être en deuil…

Petit mot enfin sur l’annual à la fin, avec le même scénariste et Kudranski au dessin. Très plaisant à lire et donc à regarder. On y retrouve le Pingouin, l’Epouvantail et le Chapelier (les méchants des trois premiers tomes de cette série) qui se retrouvent enfermés durant une nuit dans une maison délabrée, une nuit qu’ils ne sont pas prêts d’oublier…

Bref, si j’aime la folie de Jervis Tetch, je n’aime pas sa violence gratuite. Si j’aime la noirceur des dessins de Kudranski, je n’aime pas le passage de Van Sciver sur le titre. Une histoire monotone avec des ambitions absurdes. Un travail sur Batman à l’humour navrant, un travail sur Bruce et son avenir aberrant… Si au final ce tome se laisse facilement lire, si le Chapelier est plutôt intéressant, cela reste vraiment du mauvais Batman, trop violent et avec une histoire d’amour à la sauce Amour, Gloire et Beauté.
Heureusement l’annual reste un vrai plaisir à lire !
Romain_Bouvet
4
Écrit par

Créée

le 3 juil. 2014

Critique lue 717 fois

3 j'aime

1 commentaire

Romain Bouvet

Écrit par

Critique lue 717 fois

3
1

D'autres avis sur Folie furieuse - Batman : Le Chevalier Noir, tome 3

Folie furieuse - Batman : Le Chevalier Noir, tome 3
Yradon4774
10

"Batman - Le Chevalier Noir T.1 à 3" de Paul Jenkins, David Finch, Greg Hurwitz et Ethan Van Sciver

Synopsis Tome 3 :  "Durement mis à l'épreuve, son savoir-faire est doublement entaché lorsque le maniaque commence à kidnapper les habitants de la ville sans aucune raison apparente. Le...

le 12 juil. 2019

Du même critique

Le Deuil de la famille - Batman, tome 3
Romain_Bouvet
3

Un Joker qui n'en a que le nom, un Batman qui n'en est pas un...

À peine remis de son éprouvant combat contre la Cour des Hiboux, Batman voit revenir son pire cauchemar, le plus terrible de ses adversaires : le Joker ! Et cette fois-ci le Clown Prince du Crime est...

le 14 févr. 2014

17 j'aime

4

Batman : Silence
Romain_Bouvet
4

Trop d’étalages!

Batman Silence ! Le run de 12 numéros du duo Jeph Loeb et Jim Lee, ou comment essayer de faire intervenir le plus de personnages possibles en un court laps de temps. C’est la première chose que l’on...

le 13 déc. 2013

17 j'aime

5