Une BD post-apocalyptique et visionnaire

La sortie début mars de La Chute, soit quelques semaines avant le confinement suite à la pandémie de Covid-19, résonne particulièrement avec l'actualité. Et on ne peut que constater à quel point Jared Muralt a vu juste dans son récit sur les différentes étapes d'une pandémie qui peuvent mener à l'effondrement d'une société (heureusement, nous n'y sommes pas encore!) : les rassemblements interdits, la fermeture des écoles, les licenciements massifs, la dégradation des équipements publics, la saturation des hôpitaux, la pénurie alimentaire etc.
Jared Muralt, qui a entamé ce projet il y a quatre ans, s'est en premier lieu inspiré de la grippe espagnole. En y ajoutant les catastrophes futures pressenties par les collapsologues d'aujourd'hui, il a réussi à rendre son récit d'autant plus percutant. Ainsi, en plus de subir une pandémie mondiale et les dégâts économiques que celle-ci génère, les personnages principaux doivent survivre dans un monde post-apocalyptique. Dès la première page on nous l'annonce d'emblée grâce à des plans montrant des champs cramés par le soleil : l'humanité fait face à des records de chaleur et la pénurie d'eau entraîne de mauvaises récoltes.

En plus de résonner avec les thématiques actuelles, La Chute est un pur plaisir pour les yeux. Le trait de Jared Muralt est réaliste et vif, et la coloration est particulièrement réussie. Des décors jusqu'aux expressions faciales, les dessins sont impeccables et nous plongent parfaitement dans cette ambiance angoissante (une double page vous marquera forcément).
Néanmoins, c'est plus au niveau du scénario et des interactions entre les personnages que la BD pose problèmes. Les événements se succèdent à une vitesse vertigineuse, si bien qu'on ne voit pas forcément comment la situation a pu dégénérer. Et c'est évident qu'en seulement 60 pages, c'est difficile de laisser certaines scènes s'étaler en longueur. Pourtant, l'auteur s'attarde parfois sur des détails qui n'apportent pas grand chose à l'histoire.
La série se jugera très certainement dans son ensemble, il ne s'agit ici que d'une introduction j'imagine. Et malgré quelques défauts d'écriture, l'histoire fonctionne bien. Vivement la suite!

(Je vous recommande, si vous en avez l'occasion, de suivre Jared Muralt sur son compte instagram. Il publie régulièrement et montre très bien le processus de création de sa BD. C'est très instructif.)